Il fait partie des premiers métaux travaillés par les humains. Dès l'âge de pierre, nos ancêtres ont commencé à le façonner pour en faire des armes, des outils et des bijoux. Sa découverte a revêtu une importance majeure - et ce jusqu'à nos jours. Sans lui, difficile d'imaginer le monde moderne. Car là où il y a de l'électricité, il y a presque toujours du cuivre.
Au fil du temps, le troisième métal le plus utilisé au monde a reçu une foule de surnoms: le «métal de la civilisation», l'«or rouge» et, plus récemment, le «métal de la transition énergétique». Car avec l'électrification, les besoins grimpent en flèche. En raison de sa conductivité exceptionnelle, le cuivre permet de fabriquer des câbles, des lignes et des génératrices.
Selon les chiffres de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), on en trouve par exemple:
On comprend par conséquent que les besoins en cuivre – comme ceux de nombreuses autres matières premières – vont augmenter massivement avec la transition énergétique. Plusieurs études le confirment.
Les mises en garde contre une éventuelle pénurie se multiplient déjà. Fin 2022, une analyse de la société d'audit S&P Global, connue pour ses vastes collectes de données dans le secteur, est arrivée à la conclusion suivante: les besoins devraient doubler en à peine plus de dix ans. De 25 millions de tonnes en 2021, la demande passera à près de 49 millions de tonnes en 2035.
Et à cela s'ajoute la progression de l'intelligence artificielle (IA). Selon les estimations du négociant Trafigura, elle jouera elle aussi un rôle prépondérant sur cette question. D'ici 2030, la demande pour l'IA pourrait augmenter jusqu'à un million de tonnes par an et «dépasser l'offre», a déclaré Saad Rahim, économiste chez Trafigura, lors d'un récent déplacement à Genève. Cela s'ajoute au déficit de quatre à cinq millions de tonnes que l'on devrait de toute façon observer en 2030, a-t-il ajouté.
Chez S&P, on considère que la transition énergétique elle-même est menacée. Le cuivre, métal de l'électrification, est «indispensable à tous les niveaux de la transition». L'écart potentiel entre l'offre et la demande sera probablement «très important». L'extraction à partir du recyclage et le remplacement par d'autres matériaux – par exemple l'aluminium, moins cher, mais moins bon conducteur – ne suffiraient pas à résoudre le problème.
Les spécialistes des matières premières tirent une conclusion inquiétante:
Alors, sera-t-il possible d'assurer l'approvisionnement? Pas vraiment. Même si le cuivre serait présent en quantité suffisante dans la croûte terrestre. L'International Copper Study Group chiffre les réserves mondiales à 890 millions de tonnes. Mais pour de nombreux gisements, l'exploitation n'est pas économiquement rentable.
Dans un autre rapport, S&P constate un «sous-investissement à large échelle dans les nouvelles mines de cuivre et le développement». Cela s'explique par:
Ils craignent les risques liés à l'investissement dans des sites supplémentaires, tout autant que les problèmes d'autorisation et les conditions politiques changeantes. Car il faut beaucoup de temps – l'industrie compte sur 15 à 20 ans – pour qu'une mine atteigne une production commerciale. De plus, les derniers gisements découverts sont souvent de moindre qualité, ce qui renchérit leur exploitation.
Ces prévisions bousculent littéralement les marchés – et suscitent des convoitises. Depuis le début de l'année, le prix du cuivre a augmenté d'environ 20% et se situe désormais autour de 10 000 dollars la tonne. Et la situation devrait perdurer. Les investisseurs, les négociants et les spéculateurs se frottent les mains. «Comment participer à la fête du cuivre», titrait récemment le Financial Times. Le journal cite le gestionnaire de fonds spéculatifs Pierre Andurand, qui estime que les prix pourraient presque quadrupler dans un avenir proche – pour atteindre le montant astronomique de 40 000 dollars la tonne.
Même si la valse des prix n'est finalement pas aussi intense, la plupart des analystes s'attendent à un haut niveau de prix durable. Les entreprises minières seront ainsi davantage incitées à développer leur production le plus rapidement possible. Parallèlement, les efforts de recyclage devraient également s'intensifier. En effet, le cuivre a la propriété extrêmement utile de pouvoir se recycler à l'infini sans aucune perte d'efficacité. C'est ce qui le distingue de beaucoup d'autres matières premières.
Selon les chiffres de l'Association internationale du cuivre, le recyclage permet de réinjecter environ neuf millions de tonnes dans le circuit chaque année. Elles proviennent à la fois de la «vieille» ferraille, c'est-à-dire du cuivre contenu dans les produits en fin de vie, et de la «nouvelle» ferraille, issue des processus de production et de fabrication. Ainsi, on peut considérer comme renouvelable un bon tiers du cuivre utilisé dans le monde à l'heure actuelle.
Le recyclage est préconisé pour plusieurs raisons. Ainsi, selon l'association allemande du cuivre, il consomme cinq fois moins d'énergie que l'extraction. Mais il y a un autre aspect encore plus fondamental: l'extraction du cuivre est considérée comme particulièrement sale, toxique et dangereuse.
Elle comporte des risques environnementaux massifs, comme le montrent les données de l'Office fédéral allemand de l'environnement. Dans le cadre d'un grand projet de recherche, il a analysé 100 grandes mines de cuivre, de bauxite (minerai d'aluminium) et de minerai de fer dans le but d'évaluer leur danger potentiel pour l'environnement.
Pour la grande majorité des 45 mines de cuivre, qui représentent ensemble environ la moitié de la production mondiale, l'étude a constaté un «potentiel élevé». En particulier en ce qui concerne les «conditions préalables favorisant des eaux minières acides», la «formation de métaux lourds», l'«utilisation de substances auxiliaires» (solvants toxiques) et les «déchets miniers».
La mine d'Antapaccay au Pérou illustre ces répercussions. Elle appartient à Glencore, géant suisse des matières premières. Les autorités péruviennes ont récemment documenté l'ampleur effrayante de la pollution: elles ont constaté des taux très hauts de métaux lourds et de polluants dans les sols, les plantes et les animaux, l'air et l'eau. De nombreux habitants de la région souffrent de maladies graves comme le cancer, de lésions pulmonaires ou d'anémie.
Selon le Financial Times, plusieurs mines péruviennes ont récemment été fermées ou ont vu leur exploitation ralentie suite à des protestations publiques. Même Cobre Panama, l'une des plus grandes et des plus récentes mines à l'échelle de la planète, a dû cesser ses activités fin 2023 pour des raisons environnementales.
Un dilemme de taille subsistera: les technologies de la transition doivent servir à reverdir notre consommation. Mais l'extraction de quantités astronomiques de matières premières que cela engendre reste, lui, peu durable.
(Traduit de l'allemand par Valentine Zenker)