Le chercheur américain Rick Doblin avait l'air choqué lorsqu'il a dû annoncer le revers de sa recherche. La consternation, partagée par ses collègues du monde entier, est liée à une décision de l'agence américaine des médicaments (FDA), rendue publique en août. L'autorité a refusé d'autoriser la MDMA – connue sous le nom de marque Ecstasy – comme méthode de traitement pour les patients souffrant de trouble de stress post-traumatique (TSPT).
Au lieu de cela, elle demande une nouvelle étude clinique sur l'efficacité et la sécurité de la substance. La durée d'une telle étude s'étendrait sur des années et déclencherait des coûts supplémentaires de plusieurs millions. Cette décision est lourde de conséquences, car la position de la FDA a valeur de signal international.
Rick Doblin ne se laisse pas décourager pour autant. Il a confié au Washington Post que lui et ses collègues de l'organisation américaine à but non lucratif MAPS (Multidisciplinary Association for Psychedelic Studies) continueraient à s'engager pour l'utilisation de substances modifiant l'état de conscience comme la MDMA et le LSD. Ils sont en effet convaincus que de telles substances peuvent aider les patients traumatisés.
Une étude menée en 2023 par les chercheurs suisses Peter Gasser et Daniel Liechti a confirmé que les thérapies à base de substances telles que le LSD ou la MDMA sont porteuses d'espoir: la distribution ciblée de LSD réduit de manière significative les symptômes de dépression et de troubles anxieux en combinaison avec une psychothérapie. Et ce, même un an après le traitement. Le rejet de la FDA américaine montre, selon Peter Gasser, «qu'il faudra plus de temps pour normaliser de telles thérapies que nous ne l'avions pensé dans l'euphorie des premières études qui nous ont tous encouragés».
Bien qu'aucune autre agence de médicaments au monde n'ait autorisé un psychédélique en tant que médicament, il existe en Suisse une réglementation d'exception. Certains psychiatres peuvent utiliser des psychédéliques avec une autorisation correspondante de l'OFSP.
Et la Suisse, pays pionnier en matière de thérapies de ce type, est désormais également le premier pays à avoir publié des recommandations de traitement pour les thérapies psychédéliques. Celles-ci comprennent un diagnostic correct des patients qui ne répondent pas aux méthodes thérapeutiques établies, ainsi qu'un entretien avant et après la séance au cours de laquelle le patient ou la patiente prend la substance active. Il s'agit également de se prémunir contre d'éventuelles agressions sexuelles. Mais cette réglementation exceptionnelle ne permet pas de traiter un grand nombre de patients.
Si des pays comme la Suisse espèrent tant de substances actives comme le LSD, la kétamine, la psilocybine ou la MDMA (qui n'a pas d'effet hallucinatoire) – connue sous le nom d'ecstasy –, c'est parce que l'expérience montre que ces produits fonctionnent comme une sorte de catalyseur dans la thérapie. Et facilitent ainsi l'accès aux malades psychiques. C'est particulièrement vrai pour un trouble difficile à traiter: le syndrome de stress post-traumatique. Les patients traumatisés sont terrorisés par l'horreur de ce qu'ils ont vécu et c'est précisément pour cette raison qu'ils ne peuvent pas laisser un thérapeute s'approcher d'eux.
Dans de tels cas, la recherche espère que des psychotropes à faible dose, administrés seulement quelques fois, peuvent déjà aider. «Il est prouvé que les hallucinogènes relâchent les synapses dans le cerveau et entraînent leur reformation», explique le médecin et biochimiste Franz Vollenweider, qui a publié plusieurs études sur les hallucinogènes.
Un problème méthodologique non résolu dans les études avec des substances comme le LSD ou la MDMA est celui de la «suppression de l'aveugle». Le principe du double aveugle est exigé dans les études scientifiques: le groupe expérimental auquel est administré le nouveau médicament est confronté à un groupe de contrôle qui reçoit un placebo, sans que ni l'expérimentateur ni les sujets ne sachent qui reçoit quoi. De cette manière, l'effet d'une substance doit être mesuré de manière compréhensible.
Le problème de mesure de ces substances est leur effet psychologique aigu. De nombreux sujets d'expérience remarquent ce qu'ils ont reçu, de sorte que l'aveuglement souhaité disparaît. D'autre part, il n'y a pas encore de consensus sur un placebo optimal, dit actif, qui masquerait suffisamment l'effet des psychédéliques à étudier dans le groupe de contrôle.
La FDA en est également consciente, affirment les spécialistes interrogés. Et pourtant, l'autorité insisterait sur de telles études irréalistes. Cela serait d'autant moins crédible que dans la recherche, on étudie aussi d'autres symptômes sans études en double aveugle, comme le rhume, la diarrhée ou la mauvaise audition.
Les études thérapeutiques avec le LSD et autres sont claires. Comme elles coûtent très cher, seules les grandes entreprises pharmaceutiques peuvent les financer. Mais les géants du secteur ne montrent pas ou pas encore d'intérêt. «Nous n'investissons pas dans cette forme de thérapie», répond un porte-parole de Novartis. D'autres grandes entreprises ont émis des avis similaires.
Il y a plusieurs raisons à cela. L'une d'entre elles est que des substances comme le LSD ou la MDMA ne peuvent pas être brevetées. Certes, une entreprise pourrait développer des substances aux effets similaires et faire breveter ces dérivés. Mais comme on ne délivre de tels psychotropes que pendant une courte période et à des doses relativement faibles, une autre incitation financière disparaît pour les géants de l'industrie pharmaceutique. «Big Pharma veut faire de l'argent et attend d'abord», résume le pharmacien du chanvre Manfred Fankhauser – dès qu'une petite entreprise montre des succès démontrables, une grande entreprise la rachète, ce qui arrive souvent avec les nouveaux médicaments.
Derrière la défense des autorités américaines et le désintérêt de l'industrie pharmaceutique, les pionniers voient encore un autre problème qui complique leurs recherches. Franz Vollenweider, médecin et chercheur zurichois spécialiste du cerveau, le formule ainsi:
Les espoirs extatiques de nouveaux traitements psychédéliques sont en tout cas actuellement fortement désillusionnés.
(Traduit et adapté par Chiara Lecca)