Ce fut un moment historique pour la profession infirmière en Suisse. En 2021, 61% des votants ont accepté l’initiative sur les soins infirmiers. La Confédération et les cantons se sont ainsi engagés à renforcer cette profession, à améliorer les conditions de travail et à investir spécifiquement dans la formation du personnel soignant. Depuis, la mise en œuvre progresse étape par étape.
L’été dernier, l'«offensive en matière de formation du personnel soignant» est entrée en vigueur. La Confédération et les cantons débloqueront jusqu’à un milliard de francs pour rendre la profession plus attrayante. Cela passe aussi par une meilleure rémunération.
Dorénavant, les étudiants en soins infirmiers des hautes écoles spécialisées (HES) et des écoles supérieures (ES) reçoivent une subvention cantonale pour leur salaire de stage. Il s’agit d’un complément financier à un salaire de formation relativement bas, compris entre environ 400 et 1500 francs. L’objectif est de rendre la formation plus attractive sur le plan financier et de motiver davantage de jeunes à choisir cette voie.
Cependant, ces aides financières ne parviennent pas toujours aux étudiants. Selon le portail spécialisé Medinside, certains établissements du canton de Zurich utiliseraient ces subventions cantonales pour réduire leurs propres coûts salariaux au lieu de les consacrer à la formation.
Dans le canton de Zurich, les étudiants en soins infirmiers gagnent entre 2200 et 4500 francs par mois durant leur première année de stage. Dans le cadre de l’offensive de formation, un étudiant de 21 ans reçoit 500 francs supplémentaires par mois du canton. Un étudiant de 30 ans ou plus obtient 700 francs en plus de son salaire de stage. Mais, dans certains cas, ces aides ne sont pas versées directement aux étudiants.
Dans une lettre, la Direction de l’instruction publique et de la santé du canton de Zurich a rappelé à tous les établissements de formation dans le domaine des soins que ces subventions doivent impérativement s’ajouter au salaire de stage et ne peuvent en aucun cas en être déduites. Le canton insiste que ces fonds visent à couvrir les besoins vitaux des étudiants. De plus, grâce à cette aide, la politique souhaite aussi attirer des personnes en reconversion professionnelle. Le salaire de stage ne doit pas les dissuader de s’engager dans la profession.
L'association suisse des infirmières et infirmiers (ASI) confirme également ces dérives. Elle parle d’une pratique illégale et soutient les revendications des étudiants. Selon elle, il est essentiel que ces fonds bénéficient réellement aux personnes en formation et ne soient pas détournés par les établissements.
On ignore si les cas constatés dans le canton de Zurich sont isolés. La Conférence des directrices et directeurs cantonaux de la santé (CDS) affirme n’avoir pas connaissance d’incidents similaires ailleurs.
Il est important de noter que la mise en œuvre de l’offensive de formation varie fortement d’un canton à l’autre. Le montant du soutien financier pour les futurs infirmiers ES/HES diffère. D’après une vue d’ensemble du réseau des étudiants en soins infirmiers Swiss Nursing Students, c'est le canton de Vaud qui offre l’aide la plus faible: un maximum de 800 francs par mois, en plus d’un salaire de stage de 400 francs.
C’est dans le canton d’Argovie que les étudiants en soins reçoivent le plus de soutien financier. Le canton fixe un plafond annuel de 30 000 francs, soit 2500 francs par mois.
Traduit de l'allemand par Anne Castella