Suisse
Santé

«L’initiative la plus chère de l’histoire suisse» va faire mal

En 2021, le peuple avait largement accepté l'initiative pour des soins infirmiers forts.
En 2021, le peuple avait largement accepté l'initiative pour des soins infirmiers forts.Image: Keystone

Cette initiative pourrait provoquer le prochain «choc des primes»

En 2021, le peuple suisse a décidé d'améliorer les conditions de travail du personnel soignant. La facture se précise, et elle pourrait être salée.
22.10.2025, 18:4522.10.2025, 18:45
Sermîn Faki / ch media

«Mes problèmes sont aussi les tiens» scandaient les soignants à l’automne 2021 lorsqu’ils faisaient campagne pour l’initiative sur les soins. Quatre ans plus tard, on réalise à quel point ce slogan était vrai.

Après le lancement d’une offensive en faveur de la formation, la deuxième étape de la mise en œuvre concerne désormais l’amélioration des conditions de travail dans les hôpitaux, les EMS et les organisations de soins à domicile. La Constitution l’exige depuis l’acceptation de l’initiative.

Mandatée par la Commission nationale de la santé, la Confédération a organisé une table ronde réunissant syndicats et employeurs afin d’évaluer les mesures proposées par le Conseil fédéral et d’en chiffrer le coût.

Jusqu’à 1000 francs de plus par famille

Le résultat est tombé: la facture est lourde. L’amélioration des conditions de travail coûterait un peu plus de deux milliards de francs supplémentaires par an. Le rapport fédéral l'indique: environ un milliard pour les hôpitaux, le reste pour les EMS et les soins à domicile. Les participants à la table ronde auraient «confirmé ces ordres de grandeur, ou du moins ne les ont pas contestés».

Si ces surcoûts sont financés de manière ordinaire, c’est-à-dire selon la loi sur l’assurance maladie (LAMal), partagés entre caisses maladie et cantons, les assurés pourraient recevoir un vrai coup de massue dès 2028, année prévue de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi fédérale sur les conditions de travail dans les soins. Au renchérissement naturel du système de santé, estimé à environ 4% par an sur le long terme, viendraient s’ajouter 4% supplémentaires, selon le rapport.

En termes plus concrets, cela représenterait plus de 1000 francs de prime en plus par an pour une famille avec deux enfants, et près de 450 francs pour un adulte seul.

Pour certaines mesures, comme la compensation des heures supplémentaires ou la rémunération du service de garde, les coûts n’ont même pas pu être estimés. La note finale pourrait donc être bien plus élevée. En coulisses, certains acteurs du système de santé n’hésitent pas à qualifier le projet de «l’initiative la plus chère de l’histoire suisse».

Des coûts pas encore fixes

Il faut toutefois préciser que ces chiffres restent très incertains. Ce sont des estimations établies par l’administration uniquement parce que le Parlement a exigé des données. Le coût réel dépendra de plusieurs éléments.

Premièrement, il n’est pas exclu que les surcoûts soient financés autrement que par les primes. La Confédération pourrait participer, même si cela paraît peu réaliste au vu des programmes d’économies annoncés par la ministre des Finances Karin Keller-Sutter. Les cantons pourraient aussi assumer une partie de la facture via leurs budgets, donc via l’impôt. Mais beaucoup sont déjà dans le rouge, tout comme la majorité des hôpitaux.

Le projet de loi prévoit également des dérogations possibles si partenaires sociaux et employeurs s’entendent dans le cadre de conventions collectives de travail. De plus, certains espèrent que ces investissements génèreront aussi des économies: moins de rotation du personnel, donc moins de recours à des soignants temporaires.

Et finalement, nul ne sait quelle sera la réaction du Parlement face à ces montants. La peur d’une flambée des primes pourrait conduire à affaiblir certaines mesures. Mais les associations professionnelles dénoncent déjà les propositions du Conseil fédéral comme «insuffisantes» et «contre-productives». Le bras de fer s’annonce intense, et l’issue très incertaine.

Un investissement nécessaire

La Commission de la santé du Conseil national a donc demandé à l’administration fédérale un nouveau rapport. Sa présidente, Barbara Gysi (PS/SG), regrette:

«Nous espérions que la table ronde proposerait une solution commune pour le financement, mais ce n’a pas été le cas»

Puisque le Conseil fédéral a lui aussi éludé la question financière, la balle est désormais dans le camp du Parlement. La commission demande à la Confédération de présenter différentes variantes, y compris un financement public, ou au moins une aide de lancement. Pour Barbara Gysi, c'est très clair:

«La population a inscrit les conditions de travail du personnel soignant dans la Constitution. Il faut maintenant appliquer cette volonté. C’est un investissement dans une profession sans laquelle notre système de santé ne fonctionne tout simplement pas.»

Adapté de l'allemand par Tanja Maeder

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