Le Conseil fédéral veut forcer les Alémaniques à apprendre le français
Le Conseil fédéral est «préoccupé» par la décision de certains cantons alémaniques de reporter l'enseignement de la deuxième langue nationale, à savoir le français, au niveau secondaire. Une telle décision «met en péril l'harmonisation de l'enseignement et la cohésion nationale», indique-t-il vendredi dans un communiqué.
Le gouvernement a donc chargé le Département fédéral de l'intérieur (DFI) d'élaborer un projet de loi. Il veut préciser la place des langues nationales dans l'enseignement, tout en tenant compte des compétences cantonales en matière d'enseignement et des différences entre les régions linguistiques.
Deux variantes
Deux variantes doivent être élaborées avant d'être mises en consultation. La première vise à inscrire dans la loi sur les langues le système actuel (la «solution HarmoS»), qui prévoit l'apprentissage de deux langues étrangères à l'école primaire: une langue nationale et l'anglais.
La seconde doit permettre de fixer une exigence minimale, avec l'enseignement d'une deuxième langue nationale de l'école primaire à la fin du niveau secondaire I. Cette solution laisserait «une plus grande marge de manoeuvre aux cantons», selon le Conseil fédéral.
Avec ce projet, le Conseil fédéral se prépare «à un éventuel échec de l'harmonisation de l'enseignement des langues», décidée dans le cadre du concordat d'harmonisation scolaire HarmoS, qui nécessiterait une intervention de la Confédération.
Une modification de la loi ne sera pas nécessaire si les cantons maintiennent la stratégie nationale des langues, établie en 2004 par la Conférence des directeurs cantonaux de l'instruction publique (CDIP) et intégrée en 2009 dans le concordat HarmoS, ou s'ils parviennent à «l'adapter sans affaiblir la place des langues nationales», précise le gouvernement.
Les Alémaniques ne veulent plus du français
Les parlements de plusieurs cantons alémaniques ont demandé ces derniers mois le renvoi de l'enseignement du français à l'école secondaire. Appenzell Rhodes-Extérieures a pris cette décision en mars, suivi par Zurich le 1er septembre et Saint-Gall mercredi.
Le «Frühfranzösisch» est aussi remis en question dans d'autres cantons, comme Bâle-Campagne et la Thurgovie, où des motions en ce sens ont été déposées, ainsi qu'à Schwyz, où la question occupe actuellement les autorités scolaires. Même dans le canton bilingue de Berne, les Vert'libéraux ont déposé une motion s'inspirant du texte zurichois.
Ces décisions ont suscité une vive inquiétude. Quelques heures après le vote du Grand Conseil zurichois, la conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider avait dénoncé une décision qui «remet en question le compromis sur les langues et questionne notre vivre ensemble».
La Jurassienne avait annoncé qu'elle proposerait au Conseil fédéral de réfléchir à une loi contraignante sur les langues nationales. «Je souhaite montrer que le français, l'allemand, l'italien et le romanche sont des langues nationales qui sont étroitement corrélées au respect de chaque culture et de chaque langue dans notre pays», avait-elle dit.
Le conseiller d'Etat valaisan Christophe Darbellay, président de la CDIP, avait quant à lui parlé «d'un coup de canif très sérieux dans la cohésion nationale». A ses yeux, «ce n'est pas acceptable de traiter la langue de ses compatriotes de cette manière».
(ats/acu)