Le slalom de Semmering a tourné au fiasco
«Ce n'était certainement pas une bonne publicité pour le ski.» Ces propos, rapportés par le quotidien alémanique Blick, proviennent de l'entraîneur en chef allemand «Andy» Puelacher et résument à eux seuls le fiasco du dernier slalom de Coupe du monde, dimanche à Semmering en Basse-Autriche.
Des abandons à la pelle
La piste en première manche s’est rapidement dégradée, au point que la chaîne Eurosport France l’a qualifiée de parcours de ski de bosses. Cette détérioration a entraîné de multiples chutes et abandons. Les chiffres sont éloquents.
Sur les 79 coureuses engagées, 39 dont Aline Danioth, Janine Maechler, Anuk Braendli et Nicole Good n’ont pas terminé cette première manche, soit près de 50% d’abandons. «On m’a dit que c’était le taux le plus élevé depuis 1999», a précisé Mikaela Shiffrin sur ses réseaux sociaux.
La qualification s’est également jouée à 5"94, soit un retard immense sur la leader Camille Rast. Lorsque Mélanie Meillard a coupé la ligne à 3"65 de sa compatriote, elle n’imaginait pas, avec son dossard 11, intégrer aussi aisément le Top 30. La Valaisanne d'adoption a pris la 18e place, avant d'en gagner deux autres en deuxième manche.
D'autres résultats illustrent le triste spectacle du premier acte. Alors que seules 17 concurrentes après le passage des 30 meilleures ont vu l'arrivée, les quatre premières du classement, Camille Rast, Lara Colturi, Katharina Liensberger et Mikaela Shiffrin, portaient toutes des petits dossards, compris entre le 1 et le 4.
Une piste en sale état
La piste du Zauberberg avait déjà marqué à certains endroits lors du géant remporté samedi par Julia Scheib, mais les conditions restaient encore acceptables.
Cependant, la Basse-Autriche a été frappée par le foehn «mangeur de neige» durant la nuit. Les températures sont restées relativement douces et le vent sec a déshumidifié la piste. Les organisateurs ont alors choisi de l’arroser et de la saler dimanche en amont de la première manche afin de la durcir, une décision critiquée par Felix Neureuther sur la chaîne ARD.
Ce travail préparatoire a été réalisé sur les sections déjà problématiques la veille, soit dans la partie supérieure du slalom, là où les skieuses ont ensuite rencontré d’énormes difficultés. «Ce sont des conditions que nous ne devrions pas avoir en Coupe du monde. C’était difficile de trouver la ligne entre attaquer et survivre, sachant qu’il y avait ces gros trous», a ainsi déclaré la Canadienne Arianne Forget auprès de Sportcom.
Les athlètes ont aussi dû composer avec des conditions changeantes tout au long du parcours: une patinoire dans la partie travaillée et une neige plus douce en bas. C’est ce qu’a souligné la slalomeuse allemande Lena Duerr: «Chaque porte était différente, c’était à la fois glissant et adhérent, très irrégulier». Dans ce contexte, le choix du matériel est vite devenu un véritable casse-tête.
Mikaela Shiffrin critiquée
Le chaos à Semmering s’est poursuivi lors du repérage de la deuxième manche. Estimant qu’un passage était impraticable et trop dangereux, Mikaela Shiffrin a demandé à ce qu’il soit modifié, une requête qui a été acceptée. Une fois le changement effectué, la reconnaissance a été prolongée de quinze minutes, notamment pour permettre à Shiffrin d'achever sa visite de la piste dans les temps. Finalement, seules Shiffrin et Dzenifera Germane, présentes sur place au moment de la modification, ont pu constater les évolutions. Les autres ont dû se contenter de la vidéo.
Cette façon de procéder a suscité de nombreuses réactions après la course. Pour Natalie Falch, 11e au classement cumulé des deux manches, «tout s’est bien passé». «J’ai reçu la vidéo à temps, j’ai tout visionné et nous avons tout analysé avec les entraîneurs. C’était parfait. Honnêtement, c’était mieux ainsi», a-t-elle déclaré, dans des propos rapportés par le quotidien autrichien Heute.
Le discours était en revanche tout autre du côté de Camille Rast, finalement battue par Mikaela Shiffrin pour neuf centièmes. «Je ne suis pas contente. Nous avions déjà toutes reconnu le parcours. Il devrait être le même pour tout le monde», a-t-elle indiqué à Eurosport.
Swiss-Ski, qui avait envisagé de déposer une réclamation, s’est finalement ravisé, la démarche n’ayant aucune chance d’aboutir. Après tout, l’Américaine n’a enfreint aucun règlement. Cela ne l’a toutefois pas empêchée d’essuyer des critiques, qui l’ont poussée à s’exprimer publiquement.
Sur ses réseaux sociaux, Shiffrin a nié toute volonté d’obtenir le moindre avantage, quand bien même elle devait combler 54 centièmes de retard sur Rast, et s’est posée en défenseuse des skieuses «effrayées» par les conditions de la première manche. Elle a également fustigé la réaction trop tardive de la Fédération internationale de ski (FIS).
Une étape difficile à organiser
Le pire dans cette histoire, c’est que ce slalom tourmenté n’aurait jamais dû avoir lieu. Semmering alterne habituellement avec Lienz pour l’accueil de la Coupe du monde. Et cette année, les courses prévues durant les fêtes de fin d'année devaient se tenir au Tyrol. Mais en raison de la fermeture des remontées mécaniques locales, elles ont été déplacées en urgence à Semmering, autre station de moyenne montagne où la neige fait également régulièrement défaut.
Les épreuves en Basse-Autriche ont ensuite été menacées, faute d’accord entre les organisateurs et les exploitants des remontées mécaniques. Le doute planait encore il y a quelques semaines.
