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Canicule et travail: patron et syndicats fixent un seuil à 33°C

Travaux de terrassement par fortes chaleurs.
Travaux de terrassement par fortes chaleurs.image: Imago

Ce «nouveau risque» a réussi l'exploit d'unir patrons et syndicats

C'est une première: la Société Suisse des Entrepreneurs et les syndicats Unia et Syna, d'habitude ennemis, demandent ensemble à pouvoir lever le pied à partir de 33 degrés. Mais qui va payer les pauses canicule? La Confédération serait mise à contribution.
05.06.2024, 18:49
Niklaus Vontobel / ch media

Certains experts s'attendent à ce que le monde connaisse un nouvel été caniculaire: 2023 a été l'année la plus chaude jamais mesurée, 2024 pourrait bien la dépasser. Les conséquences se font sentir à de nombreux niveaux, y compris sur les lieux de travail, principalement dans le secteur de la construction ou de l'agriculture. Aux Etats-Unis, le New York Times a récemment titré:

«Nouveau territoire pour les Américains, chaleur mortelle sur le lieu de travail»

En Suisse, elle n'est peut-être pas encore mortelle, mais elle est déjà nocive pour la santé depuis longtemps.

C'est pourquoi deux acteurs qui, d'habitude, sont à couteaux tirés s'unissent: la Société suisse des entrepreneurs et les syndicats Unia et Syna demandent ensemble l'arrêt des travaux en cas de trop forte chaleur. Dans un communiqué de presse, ils exigent:

«Les travaux doivent être arrêtés lorsque les températures atteignent 33 degrés ou plus»

Tous deux soulignent que la santé des travailleurs et la qualité de l'ouvrage sont affectées lorsque l'on travaille à l'extérieur, sous un soleil de plomb, à partir de 33 degrés. C'est pourquoi les travaux doivent désormais être interrompus dans les régions pour lesquelles Météo Suisse prévoit de telles conditions. Ils ont donc fixé un seuil à 33 degrés.

Pierre-Yves Maillard, président de l'Union syndicale suisse (USS):

«La chaleur est un nouveau risque qui s'est intensifié au cours des dix dernières années»
Pierre-Yves Maillard

Selon le président de l'USS, il existe déjà aujourd'hui de grandes inégalités, car les travailleurs du bâtiment ont depuis longtemps une durée de vie inférieure à la moyenne de la population. «Cela ne doit pas s'aggraver», dit-il.

«Nous voulons prendre soin de nos collaborateurs, même en cas de chaleur», explique le président de la Société suisse des entrepreneurs, Gian-Luca Lardi, pour justifier cette nouvelle exigence.

«Notre personnel doit effectuer des travaux physiques lorsqu'ils peuvent être réalisés sans risque pour la santé»
Gian-Luca Lardi

L'industrie du bâtiment et les syndicats ne peuvent toutefois pas en décider à la légère. En effet, tout un système serait mis à l'arrêt, ce qui signifie des retards de construction, avec des coûts qui augmentent.

Qui serait prêt à payer?

Qui serait prêt à payer? Les entreprises de construction, en acceptant de payer une amende pour le retard dû aux travaux mis temporairement à l'arrêt? Les maîtres d'ouvrage? Le contribuable, en contribuant à une indemnité canicule versée par l'État?

La lutte pour la répartition des charges commence maintenant: la Société suisse des entrepreneurs et les syndicats ont invité les maîtres d'ouvrage, les autorités et la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (Suva) à une table ronde. Parallèlement, ils cherchent des alliés au Parlement afin d'obliger le Conseil fédéral à agir.

Dilemme

Jusqu'à présent, le Conseil fédéral a défendu la position selon laquelle le secteur privé devait et pouvait régler tout cela lui-même. Mais dans la pratique, cela revenait à placer la branche devant un véritable dilemme. Elle devrait soit respecter strictement tous les délais et mettre ainsi en danger la santé de ses employés, soit suspendre le travail, risquer d'être en retard et devoir payer des amendes.

Les partenaires sociaux insistent maintenant pour que la Confédération amène d'une manière ou d'une autre une solution nationale. «Sinon, tout risque de prendre trop de temps», craint Pierre-Yves Maillard.

«Si les cantons ou les communes doivent supporter seuls les coûts, nous n'aurons toujours pas de solution dans 20 ans»
Pierre-Yves Maillard

70% des travailleurs sont concernés

Ces questions ne valent pas seulement pour les ouvriers du bâtiment. Ils sont peut-être les plus touchés, mais ils sont loin d'être les seuls. L'Organisation internationale du travail (OIT) estime qu'au moins 2,41 milliards de personnes dans le monde souffrent chaque année d'une chaleur excessive, ce qui correspond à 70% de tous les travailleurs.

Il s'agit de travailleurs dans l'agriculture, l'industrie du bois, le ramassage des ordures, les transports, le tourisme ou le sport. Il s'agit principalement d'activités en plein air, physiquement éprouvantes. Mais le problème se pose aussi à l'intérieur des bâtiments, écrit l'OIT dans son rapport. Lorsque les lieux de travail sont mal aérés et que la température n'est pas régulée.

Les conséquences varient. Pour l'individu, cela peut signifier stress thermique ou coup de chaleur, ou encore épuisement, crampes et maladies cardio-vasculaires. A l'échelle d'un pays, le taux de mortalité augmente, les travailleurs sont moins productifs, les infrastructures peuvent être endommagées. En Suisse, on connaît le phénomène des rails de train déformés et des revêtements routiers qui fondent.

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