Lors de sa séance ordinaire du 15 avril 2024, la commission de gestion des taxes fixes de l’Université de Genève (Unige) a examiné une demande de subvention de la CUAE pour «la conception et la réalisation du traditionnel agenda-guide de l’étudiant.e.x.s», a constaté watson. Il s’agit de l’agenda interdit de distribution sur décision du rectorat jeudi 12 septembre.
La CUAE, la Conférence universitaire des associations d'étudiant.e.x.s, est le syndicat étudiant de l’Unige. L’agenda en question, dont la distribution était prévue pour la rentrée universitaire qui aura lieu lundi 16 septembre, est parsemé de divers messages à certaines dates de l’année. Plusieurs sont en rapport avec le conflit israélo-palestinien, comme l’a relaté watson dès le mercredi 11 septembre. Leur contenu, «fermement» condamné par le rectorat, a entraîné l’interdiction de la distribution, à l’Unige, de l’agenda.
De son côté, la CICAD, la Coordination intercommunautaire contre l'antisémitisme et la diffamation, basée à Genève, a dénoncé, au sujet du même agenda, une «opération de propagande sinistre et dangereuse de la CUAE à l’Université de Genève», y voyant dans un cas au moins – le rappel du triple détournement d'avion le 6 septembre 1970 par le Front populaire de libération de la Palestine – «une apologie du terrorisme».
Que dit le procès-verbal de la séance du 15 avril de la commission des taxes fixes de l’Université de Genève?
Pour quels coûts?
Un an plus tôt, en avril 2023, la commission des taxes fixes de l’Unige avait accordé une subvention d'un montant analogue (29 144 francs) à la CUAE pour son agenda de la rentrée de septembre. Question qui vaut particulièrement pour l'édition 2024 interdite de distribution dans l'enceinte de l'Unige: l'autorité universitaire a-t-elle un droit de regard sur l'agenda annuel de la CUAE avant impression?
La CUAE est un organe dont le fonctionnement est en partie subventionné par un prélèvement sur les taxes semestrielles des étudiants. Sur 65 francs de taxes fixes par semestre et par étudiant, 3,50 francs sont réservés aux salaires des secrétaires permanents de la CUAE, selon des chiffres fournis début 2023 à watson par le service de communication de l'Unige. Le travail de la CUAE consiste principalement en l'accompagnement des étudiants et la défense de leurs intérêts.
Début 2023, à la suite d’un incident survenu le 21 décembre 2022, au cours duquel une dizaine d’activistes antifas avaient tenté d’entarter la conseillère nationale UDC genevoise Céline Amaudruz, qui participait ce jour-là à une joute oratoire à l’Unige, l’actuel député UDC au Grand Conseil genevois Yves Nidegger avait envisagé de proposer une coupe dans le budget de l’Etat alloué à l’Université de Genève. Soit une suppression égale à la subvention accordée par le rectorat à la CUAE: les 3,50 francs multipliés par le nombre d’étudiants inscrits à l’Unige.
Retour au présent. Dans une lettre adressée jeudi 12 septembre à la rectrice de l’Unige Audrey Leuba, lettre dont watson a obtenu copie, un professeur honoraire de l’Université de Genève affirme que la «condamnation», par le rectorat, des messages reprochés à la CUAE dans son agenda, «aussi ferme soit-elle, ne suffit plus dans les circonstances présentes».
Le professeur honoraire ajoute:
Le professeur honoraire écrit encore:
Le rectorat jugera-t-il que sa décision d’interdire la distribution de l’agenda controversé est suffisante? Prendra-t-il d’autres mesures visant à encadrer l’action militante de la CUAE, avec laquelle ses relations sont tendues depuis au moins deux ans? Des élus du Grand Conseil, l’instance qui vote le budget du canton à l’Unige, voudront-ils revoir le cahier des charges de la CUAE?
Sans même parler des passions suscitées par la guerre à Gaza, face auxquelles le rectorat tente d'adopter une position équilibrée, la question d'une possible intervention du parlement ou du gouvernement cantonal est délicate. En effet, l’Unige bénéficie de la liberté académique, essentielle en démocratie, ainsi que d'une autonomie de fonctionnement. Et c'est le rectorat qui a autorité sur les associations étudiantes, pas le Grand Conseil, ni le Conseil d'Etat. Quant aux associations, elle jouissent de l'autonomie que leur confère le droit associatif. Mais il y a un payeur. Et le payeur peut peut-être poser des limites.