La décision a dû avoir un goût amer pour Nestlé. Le Tribunal fédéral a refusé de lui accorder le monopole pour la forme iconique de ses dosettes. Celle-ci n'est plus protégée par le droit des marques.
Pourtant, Nestlé a joui pendant longtemps d'un droit sur ses capsules, protégées par un brevet jusqu'en 1996. En 2000, la multinationale demande que la forme soit enregistrée auprès de l'Institut fédéral de la propriété intellectuelle (IPI).
La requête essuie d'abord un refus: l'IPI considère que la forme des capsules est trop banale et n'est pas gravée dans la mémoire des consommateurs. De ce fait, la capsule appartient au domaine public et les concurrents l'ont à leur disposition.
Mais Nestlé insiste. Et à force d'arguments, l'IPI finit par céder et enregistre la forme: Nespresso obtient la protection pour une durée de dix ans, renouvelable indéfiniment. Cette mesure a été prolongée en 2010, puis en mai 2020, pour la dernière fois.
Cela n'a pas empêché la société fribourgeoise Ethical Coffee de faire un pied-de-nez à la puissante société agro-alimentaire en mettant au point une capsule de forme similaire. Comble de l'insolence: Ces capsules sont compatibles avec les machines Nespresso. Vendues en Suisse et en France pendant une dizaine d'années, les fameuses concurrentes n'étaient pas en aluminium, mais en fibres végétales et amidon biodégradables.
En septembre 2011, Nestlé et Nespresso réagissent: Ils saisissent la justice vaudoise pour interdire la vente de leur concurrent.
Une longue bataille judiciaire s'ensuit, qui coûtera la vie à Ethical Coffee: Exsangue après presque dix ans de procédure, elle dépose le bilan durant l'été 2018.
Toutefois, c'est une victoire à la Pyrrhus pour Nestlé: La Cour civile vaudoise rejette sa demande d'interdiction de vente pour les concurrents. Malgré la protection accordée par l'IPI, la Cour considère que la forme des capsules n'est pas un signe distinctif de Nespresso.
Comment en est-elle venue à cette conclusion? Après une étude de notoriété, qui conclut que seuls 33% des sondés avaient identifié la marque d'après la photo de la capsule qui leur était soumise. Prends ça, George!
Nestlé et Nespresso ont fait recours devant le Tribunal fédéral. Manque de chance, l'instance a abouti à la même conclusion: La capsule appartient au domaine public.
Pourquoi donc? Après plusieurs expertises, on estime que la célèbre forme des capsules est une «nécessité technique». Les concurrents sont obligés de l'utiliser et ne disposent pas d'une grande marge de manœuvre pour que leurs capsules fonctionnent.
Ces capsules alternatives présentent donc une forme très similaire à celles de Nespresso mais se distinguent avec des détails (des créneaux ou des rayures, par exemple). Jusqu'à présent, Nestlé s'est accommodé de ces formes différentes. Elle n'a traîné en justice que les capsules d'Ethical Coffee. (mbr)