Il y a des programmations qui suscitent la surprise, d'autres l’enthousiasme, et puis il y a celle du Venoge Festival 2025, tombée ce matin comme un plat réchauffé au micro-ondes; mais un plat bien présenté, bien assaisonné, et étonnamment savoureux.
Et le plus fascinant dans l’histoire, c’est que ce menu recyclé semble tenir la dragée haute à celui du grand frère de Nyon, le Paléo Festival. Pire: il en dit beaucoup, trop peut-être, sur l’état d’esprit actuel du plus grand festival open air de Suisse.
Soyons clairs: pour un festival de la taille du Venoge, aligner des noms comme Mika, Eddy de Pretto, IAM, Nuit Incolore, Luidji, Vladimir Cauchemar, Gazo ou Sean Paul, c’est une jolie performance. Mieux encore, c’est une programmation qui a de la gueule. Mais tous étaient sur la Plaine de l’Asse l’an dernier.
Bon, on échappe tout de même à Gims et à ses lunettes blanches, ou à Véronique Sanson, programmée à Paléo l’été passé à 18 heures 30 sous une chaleur de plancha, ce qui nous évite au moins cette année à Penthaz de devoir avaler de travers nos churros trop secs, dans l’espoir de s’étouffer avec.
C’est bien simple: le Venoge Festival 2025, on dirait le Too Good To Go de Paléo 2024. «Vous avez raté Sean Paul à Nyon l’année dernière? Session de rattrapage à Penthaz cet été!» pourrait-on lire sur l’affiche, avec une petite étoile indiquant «Réchauffé à cœur, mais encore bien juteux». Une manifestation qui, certes, a un peu pillé la prog’ nyonaise, mais qui a au moins le mérite de faire de son mieux pour un «petit» festival.
Ce recyclage à ciel ouvert pourrait prêter à sourire si la prog du Paléo 2025 ne s’annonçait pas, elle aussi, un peu… fadasse. Certes, on a connu pire. Mais soyons honnêtes: David Guetta, Will Smith, Macklemore? Ce trio aurait pu faire vibrer les foules… en 2010.
Quant à Justice, Julien Doré ou encore Zaho de Sagazan, ils semblent désormais avoir une carte de fidélité Paléo: quatrième passage pour les uns, troisième année consécutive pour l’autre. La playlist Spotify de Paléo 2025 pourrait presque s’appeler «Paléo Greatest Hits – édition fatigue créative».
Mais si le recyclage est assumé, il est aussi révélateur: peut-on encore dire que Paléo mène la danse en matière de programmation? Quand le «petit» Venoge aligne à peu près le même casting un an plus tard, on peut se poser la question. Car le Venoge fait exactement ce que font les bons élèves malicieux: il regarde par-dessus l’épaule de son voisin pour recopier, mais il ajoute une ou deux touches qui changent tout.
Alors, oui, bien sûr, de nombreux artistes de l’affiche 2025 du Venoge ne représentent pas une surprise. Oui, beaucoup ont déjà fait Nyon. Mais justement: si un «petit» festival comme le Venoge peut proposer ce niveau de programmation, avec un nombre restreint de festivaliers et de scènes, un budget évidemment bien plus serré, que reste-t-il au Paléo pour continuer à faire rêver?
En 2024, Paléo avait vendu du rêve avec une prog’ un brin bancale, déjà passablement réchauffée et quelques bizarreries de placement. Le cas Sean Paul, programmé sur la scène Véga à la place de la Grande Scène, reste un chef-d’œuvre d’incompréhension festivalière. Une erreur de casting géographique qu’on espère bien voir corrigée à Penthaz, où le public ne devrait pas avoir besoin de marcher 20 minutes pour se déhancher sur Temperature.
Alors oui, la prog' du Venoge est un peu «seconde main». Mais elle est encore bien taillée, pas trop froissée, et finalement assez sexy pour un petit festival. Quant à Paléo, peut-être serait-il temps de ressortir la planche à dessin. Ou de s'inspirer du petit frère — parce qu’en capitalisant un peu trop sur son aura, ses «bamboulééééé», et sur le fait que les festivaliers, de toute façon, se ruent sur les billets en mode «j’y vais pour l’ambiance…», Paléo semble avoir oublié une chose essentielle: c’est la programmation qui fait battre le cœur d’un festival.
Car il y a franchement de quoi se demander si le festival nyonnais ne programme plus pour surprendre, mais juste pour rassurer. Du style…
Paléo a fini par nous proposer… ce que les autres peuvent faire aussi. «On vous remet une louche de Sean Paul?» A Penthaz, en tout cas, on cuisine les restes comme personne, avec un soupçon de culot. Bon app'.