C'est la première série de la légende Robert De Niro, envoyé dans la peau d'un ancien président un poil déboussolé et du sauveur d'une Amérique sur le point de glisser dans l'apocalypse.
On voit des photos défiler, le minois de Nicolas Sarkozy ou encore de Nelson Mandela en premier plan. Mais ce temps est révolu, puisque George Mullen (De Niro) est désormais à la retraite dans sa grande bâtisse située à Hudson, dans l'Etat de New York.
Or, ses paisibles courses à pied avec son chien et ses petits-déjeuners avec pour lecture le New York Times vont être bousculés, fortement, le temps d'une cyberattaque. D'un coup de clavier magique, les Etats-Unis se retrouvent paralysés. Et c'est la panique.
Dans la foulée, un message apparaît sur les appareils de tous les Américains:
Une flopée d'accidents ferroviaires et routiers, des catastrophes aériennes évitées de peu: les systèmes informatiques ont pris l'eau de toutes parts, en l'espace de deux minutes. Les interrogations fusent: qui est derrière cette attaque informatique? Le Kremlin fomente-t-il un plan machiavélique?
Evelyn Mitchell (Angela Bassett), l'actuelle locataire de la Maison-Blanche, doit des réponses à ses concitoyens et cible la Russie - sans preuves apparentes, à la hâte. L'enquête est lancée et pilotée par George Mullen, à la tête d’une commission qui doit remonter à la source du problème.
Zero Day va ensuite s'enfoncer dans une longue réflexion qui touche aux différentes strates de la société, empoisonnée par les théories du complot et la menace fantôme.
Cet effet (vertigineux) de thriller psychologique active les leviers nécessaires pour alpaguer le spectateur. On découvre alors la face cachée de l'iceberg, entre programme top secret qui dort dans les souterrains du pays et d'innombrables non-dits dans les hautes sphères.
Le menu est copieux pour une série qui flirte avec une atmosphère teintée de 11-Septembre. Elle fait dialoguer un gouvernement en mode survie et un peuple biberonné aux commentateurs politiques ultra virulents. L'un d'eux se nomme Evan Green (l'excellent Dan Stevens), à la carrure de Joe Rogan .
Cet ensemble d'opinions façonne une société au bord de l'implosion. Au milieu, George Mullen patauge et tente de garder la tête hors de l'eau en cherchant le coupable.
Zero Day révèle alors les limites démocratiques, la paranoïa en parangon. C'est un cheval de Troie, c'est une bombe à retardement qui vient frapper les Etats-Unis. Activée par des criminels, mais nourrie par une horde d'individus en mal d'attention, aussi malins qu'un pilier de bar capable d'éructations incontrôlées.
George Mullen, le regard noir, intransigeant, doit contenir ce vacarme extérieur. Pour l'épauler, il y a Roger Carlsen (le toujours excellent Jesse Plemons), adepte de relations douteuses, et Alexandra Mullen (Lizzy Caplan), qui n'est autre que la fille de l'ancien président, faisant face à son paternel en siégeant à l'organe de surveillance de la fameuse commission.
Une affaire familiale qui sent bon la poudre. Or, sans trop épiloguer sur la relation tendue entre un père et sa fille, il est souvent question de principes. Encore faut-il qu'ils soient présents dans la pièce. De tout en haut à tout en bas, lorsque le monde est fébrile, les grands discours deviennent une chimère et chacun botte en touche ce qu’il reste de pragmatisme.
Dans cet exercice un brin casse-gueule, le résultat est majoritairement réussi, en déroulant son fil narratif sans trop de déchets et maintenant une curieuse sensation de trou noir sociétal. On sent la terreur poindre, les pensées brouillées quand le danger demeure inconnu. La moralité au placard, nous indique le trio de créateurs (Eric Newman, Noah Oppenheim et Michael Schmidt).
Le casting est une plus-value certaine dans cette réussite (partielle) - sans toucher au sublime. De Niro impose sa carcasse et son expérience pour porter le show et les six épisodes, tenus, qui nous enchaînent à cette menace fantôme.
Sous nos yeux, Zero Day dépeint les Etats-Unis comme un terrain de jeu où les valeurs deviennent un écho de la pensée, qui s'éteignent déraisonnablement dans le brouhaha d'une démocratie dégommée.
«Zero Day» sera disponible en intégralité dès le 20 février sur Netflix.