Alfonso Cuaron entre en piste dans le monde sériel. Le réalisateur de Gravity est de retour derrière la caméra après son film Roma, sorti en 2018 sur Netflix.
En 2024, c'est sur une autre plateforme que le Mexicain revient, sur Apple, pour livrer la marchandise: une mini-série morcelée en sept chapitres.
Concernant la matière, Cuaron narre l'histoire de Catherine Ravenscroft (Cate Blanchett), une célèbre journaliste qui découvre qu’elle est l’héroïne d’un roman écrit par un inconnu. Cet inconnu est Stephen Brigstocke (Kevin Kline), veuf de longue date, débarrassant les placards de sa défunte épouse, Nancy (Lesley Manville). Il tombe alors sur un sac à main et en son sein, une clé. Cette clé va mener à un tiroir et ensuite à un manuscrit, pondu par Nancy. L'histoire narre la mort de leur fils Jonathan (Louis Partridge), disparu en Italie et dont la noyade serait l'oeuvre de Catherine.
Une fois les enjeux posés, l'histoire vous invite à l'égarement entre le passé et le présent. Un passé que Catherine souhaite oublier, qui s'impose à elle par le biais d'un maudit livre. Elle le découvre dans un courrier, avec cette inscription:
Catherine suffoque, sa respiration s'emballe; elle cherche même à brûler le roman, cette incarnation de ses malheurs enfouis. Face à son mari Robert (Sacha Baron Cohen), elle assure que quelqu'un tente de la punir avec cette encre couchée sur papier. Lui, il lui assure qu'elle est «Sainte Catherine».
Mais sa sainteté a quelques péchés à expier. Pour ce faire, le veuf Stephen pose des pièges sur le chemin de Catherine en forme de purgatoire moral. Il s'amuse de son entreprise vicieuse, s'attribue le rôle du démon de l'ombre pour combattre à distance sa proie.
Il va s'en délecter et laisser place à des accents funestes de vengeance. Le roman remporte alors un succès et la journaliste voit les flammes de l'enfer lui chatouiller les neurones. Catherine a les entrailles rongées par les mots.
Un personnage en décomposition que Cate Blanchett endosse sans mal, apparaissant en très grande forme, bien aidé par un Alfonso Cuaron tout aussi inspiré. Le réalisateur du film Les Fils de l'homme se joue de la fiction et de la réalité, architecture un récit qui cache son jeu pour mieux vous balader dans cette histoire tortueuse qui démarque ce désir irrépressible d'épingler un coupable. Cuaron jouera cartes sur table lorsque les mécanismes du non-dit viennent imprégner chaque personnage, entre jeu de regards et gestes silencieux. Un délice.
Disclaimer est aussi ce thriller efficace qui plonge dans les recoins sombres de la psyché de chaque personnage. Cuaron tricote son histoire pour créer une bulle de pessimisme dont le spectateur découvre, emmêlé dans une toile de flashbacks et de flash-forwards, une valse de mensonges et de vérités - la réalisation propose une lumière léchée pour agrémenter le tout.
Il en fallait bien pour cadrer les mouvements incessants du chagrin tatoués sur le coeur, d'une vengeance froide portée par Stephen et excellemment interprétée par Kevin Kline. En chef d'orchestre, Cuaron, sans trop en rajouter, propose une mini-série cérébrale, qui agite la vérité transformée en piège et ouvre l'éventail de l'existence de Catherine, aussi venimeux qu'un mensonge qui refait surface des années plus tard.
«Disclaimer» est à découvrir le 11 octobre sur Apple TV+.