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Poutine est nerveux

Poutine a perdu patience face à son homologue chinois concernant le Royaume-Uni.
Poutine n'a pas goûté aux paroles du Royaume-Uni.Image: watson
Analyse

Poutine est nerveux

Vladimir Poutine est soulagé: malgré son invasion de l'Ukraine, il reçoit le soutien de Xi Jinping. La Chine va-t-elle participer à la guerre?
25.03.2023, 08:0525.03.2023, 17:44
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t-online
Patrick Diekmann
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Il se tenait presque en position hésitante à la sortie du Palais du Kremlin. Mardi soir, Vladimir Poutine a tendu la main à Xi Jinping en guise d'adieu. «Bon voyage», a souhaité le président russe à son homologue chinois. Il lui a fait un signe de la main. «Prenez soin de vous, mon ami», a répondu Xi en se dirigeant vers sa voiture. Les images laissent deviner à quel point le soulagement doit être grand chez le chef du Kremlin après la visite de trois jours de Xi. La Russie mise désormais tout sur une seule corde: la Chine.

Peu avant, Poutine avait fait une déclaration: Londres souhaitait livrer des munitions contenant de l'uranium appauvri à l'Ukraine. Le chef du Kremlin semblait abasourdi, un peu nerveux. Pour lui, cette nouvelle était une occasion en or — qu'il a saisie. Certes, l'uranium appauvri n'a rien à voir avec les armes nucléaires, mais Poutine voulait présenter l'Occident comme une puissance irrationnelle risquant une guerre nucléaire devant un public chinois. C'est une séquence de plus dans la grande mascarade guerrière du président russe.

Pour ce dernier, le fait même que Xi se soit rendu en Russie est déjà un grand événement. Peu après que la Cour pénale internationale de La Haye a lancé un mandat d'arrêt contre Poutine, le président chinois s'est présenté à Moscou et a même invité le chef du Kremlin en Chine. Poutine peut désormais espérer un soutien de la Chine dans la guerre en Ukraine — même si celui-ci n'est pas officiel.

Une situation difficile

Pour la Russie, les affaires ne se passent pas au mieux en Ukraine. L'offensive du Nouvel An s'est largement essoufflée, les gains de terrain russes ont été minimes, malgré la mobilisation d'au moins 300 000 réservistes. Depuis l'automne 2022, la Russie attaque la ville de Bakhmout, dans l'est de l'Ukraine, et jusqu'à présent, l'armée de Poutine et les mercenaires de Wagner n'ont pas réussi à prendre la ville.

Entre-temps, les informations selon lesquelles les troupes ont des problèmes de munitions se sont de nouveau multipliées. En outre, des blogueurs militaires russes et notamment le chef de Wagner Evgueni Prigojine mettent en garde contre une contre-offensive ukrainienne imminente.

Une grande partie de ce qui se déroule sur le champ de bataille en Ukraine est cachée dans le brouillard de la guerre. L'ampleur des problèmes de ravitaillement russes et la qualité de l'armée ukrainienne encore en place ne sont absolument pas définies.

Une chose est certaine:

Poutine mise toujours sur sa stratégie, à savoir qu'il aura finalement plus de souffle que l'Occident dans cette guerre d'usure

Mais la Russie n'a plus remporté de bataille ni gagné de territoire depuis longtemps. Les combats ne se sont soldés que par d'innombrables morts des deux côtés.

L'uranium appauvri

Il s'agit de munitions perforantes à l'uranium appauvri. L'uranium est un métal radioactif qui, en raison de sa densité plus élevée que l'acier ou le plomb, a une force de pénétration plus importante. Ces projectiles ont déjà été utilisés lors des guerres en Irak et au Kosovo. Il s'agit bien sûr d'une arme de guerre mortelle, mais selon un avis du Comité scientifique des risques sanitaires et environnementaux (CSRSE) de la Commission européenne de 2010 au moins, il n'y a «aucune indication de risques pour l'environnement et la santé».

Les échecs russes en Ukraine posent également des difficultés à la Chine. Xi ne veut pas que Poutine perde, mais officiellement, il se montre neutre. Les deux présidents sont restés discrets sur la question des livraisons d'armes et ne se sont pas exprimés publiquement à ce sujet. Mais il est probable qu'ils en aient également parlé.

Il va de soi que la Russie n'accepterait que trop volontiers du matériel militaire et des armes en provenance de Chine. Entre-temps, l'armée russe utilise déjà en Ukraine le char T-62, qui a été produit à partir de 1962. Mais la Chine a d'autres intérêts et ne souhaite pas rompre ouvertement avec l'Occident et les Etats-Unis pour des raisons économiques. Du moins pas tout de suite.

C'est pourquoi il est probable que le soutien de la Chine à la guerre de Poutine se fasse de manière indirecte. Avec des biens à double usage qui peuvent être utilisés à des fins civiles ou militaires — par exemple, des semi-conducteurs ou des drones civils. Mais en cas d'urgence, des armes chinoises pourraient également être livrées à la Corée du Nord et être repeintes sur place afin de dissimuler leur origine chinoise.

Si Poutine devait être dépassé par les événements en Ukraine, la Chine pourrait intervenir. Xi veut à tout prix éviter un changement de pouvoir en Russie. Les deux pays partagent une longue frontière commune et la République populaire a besoin de la Fédération de Russie comme partenaire stratégique dans sa lutte avec les Etats-Unis.

Pour Xi, Poutine est le partenaire parfait: il est prévisible pour lui. Les deux se connaissent depuis longtemps et, avec sa guerre, le chef du Kremlin s'est mis dans une situation où il dépend considérablement de la Chine et où il devient de plus en plus dépendant à chaque jour de guerre.

En revanche, le président chinois a clairement montré, lors de sa visite à Moscou, de quel côté se trouve la Chine. Les crimes de guerre de Poutine et une nouvelle escalade de la guerre ne jouent guère de rôle dans les calculs stratégiques de Xi Jinping. Au contraire: la nouvelle formation de bloc s'est cimentée ces derniers jours, la Chine et la Russie forment désormais une communauté de destin.

Munitions fournies en urgence par l'UE

C'est également un coup de semonce pour l'Occident qui, à l'ombre du rapprochement entre Poutine et Xi, a encore intensifié son soutien à l'Ukraine. L'Union européenne (UE) envoie des munitions dont les défenseurs ukrainiens ont désormais un besoin urgent et rapide: grenades d'artillerie, munitions pour chars et obusiers et missiles pour systèmes de défense aérienne.

Les chars Marder et Leopard 2 sont déjà en route et les chars de combat Abrams devraient arriver des Etats-Unis à l'automne. Tout cela, sans compter la formation des forces ukrainiennes, est un signe de détermination face à Poutine.

Et désormais, que se passe-t-il en Ukraine? L'armée ukrainienne pourrait bientôt être capable de lancer une nouvelle offensive, mais cela prend du temps. «Cela ne pourra pas commencer le 2 avril à 8 heures du matin», a déclaré le général de brigade Christian Freuding. Après tout, les nouveaux systèmes d'armes doivent d'abord être adaptés à l'armée:

«C'est pourquoi nous n'attendons pas une initiative des Ukrainiens dans les prochains jours, mais dans les prochains mois»

L'immobilité actuelle du front est donc un succès pour l'Ukraine. Elle a ainsi la possibilité de répartir l'équipement militaire occidental en différents points afin d'élaborer, le cas échéant, un concept de contre-offensive. Une seule chose semble claire: l'Ukraine attaquera là où elle identifie des points faibles des défenses russes.

Le grand facteur d'incertitude pour l'Occident et pour l'Ukraine reste toutefois la Chine. Si la deuxième puissance militaire mondiale devait désormais prendre plus activement parti pour Poutine dans le conflit, la Russie aurait l'avantage dans une longue guerre d'usure.

Xi était chez Poutine et a jusqu'à présent renoncé à un entretien avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky. Il s'agit là aussi d'un signal de poids de la part de Pékin. Le soulagement qui se lit sur le visage de Poutine après le départ de Xi ne laisse en tout cas rien présager de bon - ni pour l'Ukraine, ni pour l'Occident.

L'attaque contre le pont de Crimée en images
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L'attaque contre le pont de Crimée en images
source: sda
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Le train blindé Volga de l'armée russe
Video: watson
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