Disons-le franchement, les Etats-Unis sont un vaste et beau pays. Oh, bien sûr, tout n'y est pas parfait, loin de là. Mais cette immensité économique, politique, culturelle, technologique et sociale est plus que jamais une boussole pour le reste du monde. Qu'on le veuille ou non, y compris pour les pays qui rêvent de l'anéantir. Le hic, c'est que l'Amérique est face à un choix qui, dans un monde parfait, ne devrait pas exister.
Dans moins de deux mois, 333,3 millions de citoyens auront peut-être, pour la deuxième fois de leur histoire, un président qui serait peut-être déjà en prison s'il n'avait pas décidé de s'en tirer en annonçant sa candidature. Un type de 78 ans qui, mardi soir face à Kamala Harris, semblait croire dur comme fer qu'il peut être élu grâce «aux migrants qui mangent des chats» dans l'Ohio. Vous avez bien lu. Un milliardaire insensible aux difficultés des Américains, déconnecté des vrais défis de ce monde, obnubilé par sa propre personne, s'est emparé d'une théorie fumeuse bricolée par ses apôtres d'extrême droite pour évoquer la question sensible de l'immigration.
Certains diront que c'est une tactique populiste comme une autre. Que c'est de bonne guerre. Que c'est une énième astuce rhétorique, digne du bonhomme et typique de l'un de ces débats présidentiels qui n'ont plus l'élégance et l'utilité d'antan. Ils se trompent.
Le pire? On le connaît déjà: plusieurs millions de citoyens voteront précisément pour lui à cause de ces 20 000 Haïtiens accusés récemment d'avoir bouffé des animaux domestiques dans le patelin de Springfield. Entre autres mensonges d'extrême droite assénés sans broncher mardi soir.
Qu'on ne leur en tienne pas tant rigueur, à ces trumpistes. Des fous et des âmes en peine, il y en aura toujours. Pour les autres, notamment inquiets pour leur pouvoir d’achat, hélas, c’est plié. Face à la vice-présidente démocrate et jusqu'au scrutin du 5 novembre, il n'y aura qu'un provocateur inconsistant pour défendre des idées conservatrices, autrefois aussi nobles que les autres. Car, oui, on a le droit de vouloir des frontières intransigeantes et un contrôle plus ou moins strict de l'avortement.
Trump, lui, invente des migrants zombies et affirme que les démocrates autorisent les meurtres de bébés après leur naissance. Ce n'est plus de la politique, mais une roulette russe sur la tempe de l'Oncle Sam.
🚨TRUMP: "IN SPRINGFIELD THEY'RE EATING THE DOGS. THE PEOPLE ARE EATING THE CATS. THEY'RE EATING THE PETS OF THE PEOPLE THAT LIVE THERE. THIS IS WHAT IS HAPPENING IN OUR COUNTRY."
— Autism Capital 🧩 (@AutismCapital) September 11, 2024
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On l'a déjà dit, mais il faut le répéter, tant ses victoires temporaires contre la justice peut nous faire oublier le plus important: Donald Trump est un repris de justice, autrefois acteur de télé-réalité, autrefois magnat de l'immobilier new-yorkais, autrefois fils à papa, qui vise la Maison-Blanche dans l'unique but de se venger. Comme un petit caïd qui ne supporte pas qu'on lui reprenne honnêtement le pouvoir des mains.
C'est étrange à écrire ainsi, mais Donald Trump n'aura jamais les compétences, la stature et les ambitions démesurées d'un Vladimir Poutine ou d'un Viktor Orbán, pour ne citer que ses héros modernes. La dangerosité du milliardaire planqué à Palm Beach réside moins dans le regard qu'il porte sur le monde que celui qu'il réserve à son miroir. Tenez, mardi soir, durant nonante minutes, le candidat républicain n'a pas jeté un œil à son adversaire, ignorant l'adversité et le courage, se contentant de paraître. Cet homme peut mener la plus grande puissance mondiale à sa perte, dans un simple caca nerveux.
Kamala Harris n'a peut-être pas totalement terrassé son adversaire durant ce débat qui ne va pas la faire gagner vingt points en une nuit. Mais elle a eu la bonne idée de marteler une évidence qui s'était, ma foi, un peu perdue entre cette balle de fusil dans un lobe d'oreille et l'abandon de Joe Biden: