Trump is back. Ce n'est pas 2016, mais presque. L'élection de 2024, qui a un étrange goût de mauvais remake, est pourtant sa version sous stéroïdes: 57% de grands électeurs, le décrochage du vote populaire, 10 millions de votants en plus, une conquête républicaine confirmée du Sénat et probable de la Chambre des Représentants.
La revanche après sa défaite de 2020 face à Joe Biden est totale. Et ce, alors que les dons pour son budget de campagne étaient inférieurs à ceux de Kamala Harris et que les stars se sont positionnées contre lui. Le vote Trump a progressé dans tous les électorats, notamment les 18-35 ans, dont certains ont vécu leur passage à la majorité en assistant aux déboires judiciaires de «Donnie».
Depuis 2016, il faut dire qu'on «comptait les points». Tel un match en trois sets, le round retour de 2020 qui voyait Joe Biden vainqueur, faisait espérer un «2 à 1» aux démocrates. L'espoir? Non seulement vaincre Trump, mais reléguer le trumpisme et ses affres antisystème et immorales — ou amorales? — dans les poubelles de l'histoire, comme une anomalie qu'on aurait corrigée.
Mais c'est le contraire qui s'est produit. Les thématiques portées par le trumpisme n'ont en vérité jamais disparu: les craintes quant à l'immigration, la guerre culturelle ou encore le «wokisme» sont plus vivantes que jamais. Les questions économiques, elles, restent l'apanage des républicains «classiques». Mais ce n'est pas n'importe quel républicain qu'on a élu: c'est Donald Trump.
En 2016, les Américains ont voté pour celui qui était affublé des anathèmes de raciste, de sexiste, de misogyne. De fasciste aussi, déjà. On avait alors préféré chercher la faute là où cela nous arrangeait: les hackers russes, les réseaux sociaux ou encore le scandale Cambridge Analytica.
En 2024, la population US a voté pour le criminel, le repris de justice, le sécessionniste qui a poussé à l'assaut du Capitole, le 6 janvier 2021. Et cette fois-ci, à qui la faute? L'inflation, la misogynie? On notera que 45% des femmes ont voté pour Trump et que l'économie américaine a pleinement dépassé son niveau d'avant-Covid — merci à Joe Biden, par ailleurs, qui a fait retomber l'inflation et les prix à la pompe en un temps record.
Arrêtons de trouver des excuses à la population américaine: elle sait très bien pour qui elle a voté. L'argument économique, maintes fois mis en avant, ne suffit pas au vu du passif du Donald. En âme et conscience, le peuple américain a signé à nouveau pour son «menteur honnête», qui exploite des failles déjà bien présentes plus qu'il ne les crée de zéro.
Pour les démocrates aussi, il s'agit de sortir du déni. Déjà, en constatant les enjeux que portent la deuxième victoire de Trump. Lors de son discours d'acceptation du résultat, Kamala Harris n'a pas émis la moindre remise en question la concernant, ni sur la tenue de la campagne, ni sur la méthode à appliquer. Elle a appelé à continuer le combat par d'autres moyens que la politique, soit les tribunaux ou la rue. Avec plus de classe et de sourires que chez Trump, elle a pourtant, elle aussi, donné rendez-vous au prochain round.
Voici plus de huit ans que la population américaine laisse les jugements — juridiques comme moraux — s'abattre sur Donald Trump comme sur un paratonnerre, pour mieux l'élire ensuite. Le peuple l'a blanchi. Il est temps de regarder la lune plutôt que le doigt: quels sont les problèmes pointés par le trumpisme? Et comment les régler dans le respect de l'Etat de droit? Le défi, c’est d’empoigner ces questions avant que celui-ci ne soit englouti par ce bouffon orange. The clock is ticking.