International
Commentaire

Marine Le Pen condamnée: la France a peur de la démocratie

French far-right leader Marine Le Pen leaves the courtroom after a French court found Marine Le Pen guilty in an embezzlement case but didn't immediately say what her sentence might be and how it ...
Marine Le Pen, palais de justice de Paris, 31 mars 2025. Image: AP
Commentaire

La France a peur de la démocratie

En condamnant Marine Le Pen à la «mort politique», les juges ont honoré le droit mais ils ont indiqué dans le même temps qu'ils se méfiaient de la démocratie.
31.03.2025, 18:4101.04.2025, 23:53
Plus de «International»

Interdire le Front national a longtemps été le rêve du camp démocrate opposé à l’extrême droite. Un rêve qui s’est évaporé avec les années. Le Front de Jean-Marie Le Pen est devenu le Rassemblement de sa fille Marine. Le parti a entamé sa «dédiabolisation», laissant aujourd’hui l’antisémitisme à Jean-Luc Mélenchon, le leader de la gauche radicale insoumise, pour concentrer ses flèches sur l’«immigration», sans épargner l’islam mais sans non plus le déclarer incompatible avec la République.

Interdire le RN: un vieux rêve

A droite et chez certains macronistes, c’est du reste moins pour son racisme que pour son programme économique jugé désastreux que le RN a été combattu lors des élections législatives anticipées de juin et juillet derniers.

Bref, c’est au moment où le RN n’est plus tout à fait l’extrême droite (l’UDC des élections fédérales de 2023 n’avait rien à lui envier sur ce plan-là), que le parti de Marine Le Pen se voit en quelque sorte interdit. Certes, en termes de danger, du moins pour ses concurrents, il n’a jamais été aussi dangereux, car jamais si proche du pouvoir.

Principe de précaution?

Il n’est pas impossible que les juges qui ont condamné Marine Le Pen à cinq ans d’inéligibilité, à sa «mort politique» disent ses soutiens, aient eu quelque part à l’esprit la possibilité de sa victoire à la présidentielle de 2027 et qu’ils aient ainsi cherché à éviter ce que d’aucuns tiennent pour un saut dans le vide si cette éventualité devenait réalité. Ce faisant, les juges du tribunal correctionnel de Paris auraient appliqué, en plus du droit, un principe de précaution démocratique.

On peut bien sûr considérer à ce stade que justice a été rendue, que l’Etat de droit, au moment où il est mis à mal par la plus grande démocratie du monde, sort renforcé du jugement prononcé contre la cheffe nationaliste et que reculer sur la loi aurait été un signal donné aux populistes de tout poil.

La défi démocratique reste entier

Sauf que la décision de justice frappant Marine Le Pen, si elle honore le droit, ne règle rien de la question démocratique en France. Peu, d’ailleurs, dans la classe politique, ont crié victoire à l'annonce du jugement. A droite plus qu'à gauche, La France insoumise faisant exception, les commentaires estiment qu'il s'agit là d'un mauvais service rendu à la démocratie.

Chacun comprend que le Rassemblement national va se victimiser et qu'il risque de se renforcer dans les mois prochains, sans qu'on puisse conclure à ses chances supplémentaires de gagner la présidentielle en 2027, privé qu'il serait de Marine Le Pen, sa «maman», à présent remplacée, pense-t-on, par la figure du «gendre», Jordan Bardella.

Les conditions du pétrin français demeurent

Mais chacun comprend surtout que les conditions qui font les intentions de vote élevées pour le RN n’ont pas disparu: le nombre de foyers vivant modestement depuis des décennies est toujours aussi haut; les craintes face aux changements de populations, encouragés par Jean-Luc Mélenchon qui pense y trouver un profit électoral, ne diminuent pas; le sentiment de «sombrer» est gros d’un besoin de sursaut, incarné ou qu’incarnait jusqu’ici Marine Le Pen.

Si le droit trouve son compte dans la décision des juges, c’est moins le cas de la démocratie, sauf si l'on considère que la démocratie doit parfois être bridée. Par où qu’on prenne le «problème français», on se rend compte qu’il n’y a pas de solution miracle. L'éléphant dans la pièce, si ce n'était pas clair jusqu'ici, c'est la paix civile.

Le retour des astronautes Butch Wilmore et Suni Williams
Video: watson
Ceci pourrait également vous intéresser:
6 Commentaires
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
6
Trump taclé par ses propres services de renseignements
Le renseignement américain a réfuté que le gang Tren de Aragua soit lié au régime du président du Venezuela, contredisant ainsi un motif d’expulsion utilisé par Trump.

La communauté américaine du renseignement a invalidé une thèse utilisée par Donald Trump pour expulser plus de 200 Vénézuéliens vers une prison au Salvador. Elle a estimé que le gang Tren de Aragua n'est pas lié au régime du président Nicolas Maduro, selon une note rendue publique lundi. Ce mémo rapporte:

L’article