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L'attentat pourrait rendre Trump «encore plus imprévisible»

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Image: Anadolu

Pourquoi l'attentat pourrait rendre Trump «encore plus imprévisible»

S'il a réchappé au pire, le candidat républicain risque un stress post-traumatique. En Suisse aussi, des hommes et des femmes politiques ont survécu à une fusillade: l'attentat de Zoug de 2001. Plusieurs d'entre eux nous racontent comment ils y ont fait face.
18.07.2024, 05:5218.07.2024, 08:23
Bruno Knellwolf et Linda Leuenberger / ch media
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Donald Trump est passé à deux ou trois centimètres de la mort. Une expérience traumatisante pour l'ancien président américain. «La probabilité qu'il souffre ensuite d'un trouble de stress post-traumatique est d'environ 20%», explique Andreas Maercker, directeur du département «Psychothérapie générale et points forts Trauma» à l'université de Zurich.

Ce qu'un tel acte de violence fait à une personne est très différent dans les premiers jours qui suivent l'attaque.

«Les extrêmes sont de rester figé dans la terreur - ou de penser que cela ne nous a rien fait du tout»
Andreas Maercker

Mais, entre les deux, il existe des dizaines d'autres possibilités. Par exemple, se sentir comme dans un film, être extrêmement anxieux ou encore ce que les spécialistes des traumatismes appellent «l'illusion d'invulnérabilité». Les gens pensent alors que plus rien ne peut leur faire de mal, qu'ils sont protégés par des forces surnaturelles.

Le narcissisme pourrait conduire Trump à l'illusion de l'invulnérabilité

C'est justement ce dernier cas qui est possible dans le cas de Trump. «Il se pourrait que son fort narcissisme le conduise à cette illusion d'invulnérabilité. C'est ce que l'on verra dans un avenir proche», explique Andreas Maercker. Ainsi, la question se pose de savoir si un homme comme Trump portera des séquelles à long terme de cette expérience traumatisante.

Le déroulement classique d'un trouble de stress post-traumatique (PTSD), dont souffre un cinquième des victimes de violence, se déroule en trois étapes: premièrement, des flashbacks se produisent. On parle de quelques secondes de frayeur récurrentes, au cours desquelles on a l'impression de se retrouver à nouveau dans la situation de danger. Deuxièmement, l'évitement de toute situation qui rappelle le trauma. Troisièmement, l'impression que cela peut se reproduire chaque seconde.

Tout le monde n'a pas la même capacité de résistance après un tel acte. Pour la renforcer, un environnement de soutien et la reconnaissance sociale par les autres seraient les facteurs les plus importants. Que l'entourage reconnaisse que la victime s'est trouvée en danger de mort.

«Concernant Trump, en tant qu'homme public, il est entouré de nombreuses personnes qui le soutiennent et l'aident à traverser cette épisode traumatisant»
Andreas Maercker, directeur du département «Psychothérapie générale et points forts Trauma» à l'université de Zurich

Les personnes dont on doute qu'elles aient été en danger de mort vont plus mal que les autres.

Lafontaine et Schäuble ont réagi différemment

Il est toutefois difficile de savoir si Trump s'en remettra sans dommage et s'il repartira même renforcé dans la campagne électorale. Andreas Maercker cite différents exemples:

«L'homme politique allemand Oskar Lafontaine, du SPD, est devenu un tout autre homme, beaucoup plus imprévisible, après un attentat. A l'inverse, Wolfgang Schäuble l'a sans doute encaissé et a continué à être un homme politique sérieux.»

On peut craindre que Trump, s'il est élu président l'année prochaine, ne souffre d'un trouble de stress post-traumatique. On peut alors se demander si cela pourrait avoir des conséquences catastrophiques pour le monde. «Certaines personnes qui survivent à un traumatisme sont très préoccupées par la vengeance à l'égard de leur agresseur», explique Andreas Maercker. L'assaillant de Trump ayant été abattu, cette dynamique s'est réduite. Le PTSD proprement dit n'est toutefois pas dangereux pour les autres. Mais:

«Les actions de Trump étaient déjà difficilement prévisibles jusqu'à présent, cela pourrait éventuellement s'amplifier»
Andreas Maercker, directeur du département «Psychothérapie générale et points forts Trauma» à l'université de Zurich

«Parfois, l'assassin m'apparaît en rêve»

En Suisse aussi, il existe des personnes qui ont survécu à un attentat à motivation politique. Le 27 septembre 2001, Fritz Leibacher, connu auparavant comme un trublion, a tué quatorze hommes et femmes politiques au parlement cantonal de Zoug, avant de se suicider.

Moritz Schmid, alors conseiller cantonal, a toujours une cicatrice à la main gauche. Au moment de l'attaque, il s'était caché sous la table, sa serviette devant le visage pour se protéger, lorsque l'auteur de l'attentat a tiré dans sa rangée. Une balle lui a transpercé la main et s'est logée dans la serviette.

Cinq opérations ont été nécessaires pour sauver, au moins partiellement, sa main. Et parfois, 23 ans plus tard, elle lui fait encore mal. Un souvenir incrusté dans la chair et les os.

Après l'attentat, Moritz Schmid est resté silencieux. Alors que les autres survivants tentaient d'exprimer l'horreur avec des mots, il les écoutait, mais ne parvenait pas à émettre le moindre son. «Ce n'était tout simplement pas possible», dit-il aujourd'hui. Jusqu'à ce qu'un collègue de groupe, qui avait également survécu à l'attentat, le fasse enfin parler après une semaine sans paroles.

C'est finalement le fait de parler qui a aidé Moritz Schmid à trouver un moyen de gérer ce qu'il avait vécu. Il n'a jamais suivi de thérapie, préférant parler à sa famille, à ses amis et à ses collègues politiques.

«Les gens autour de moi m'ont bien soutenu. Ils le font encore aujourd'hui»
Moritz Schmid, survivant de la tuerie de Zoug

L'attentat continue de le préoccuper, dit-il. «Parfois, l'auteur de l'attentat m'apparaît en rêve.» Dans une armoire chez lui, il y a encore la mallette avec le trou de la balle. Elle est remplie de coupures de presse de l'époque. Schmid n'a pas encore réussi à s'en débarrasser. Mais peut-être n'est-il pas obligé de le faire.

«Rangée par rangée, nous avons passé en revue les morts et les blessés»

L'actuelle conseillère nationale des Verts Manuela Weichelt était également présente en 2001, lorsque Fritz Leibacher a ouvert le feu. Elle était alors présidente du groupe parlementaire des Verts. L'assassin a tiré trois coups de feu dans sa direction. Mais elle en est sortie indemne.

Ensuite, elle n'a fait que fonctionner mécaniquement pendant plusieurs heures. Infirmière de formation, elle a prodigué les premiers soins. Puis elle s'est rendue à l'hôpital avec un collègue du Conseil grièvement blessé et les pompiers, et a apporté de la morphine et un médecin au bâtiment du Parlement.

«Ensemble, nous avons passé en revue, rangée par rangée, les morts et les blessés»

Rétrospectivement, elle ne sait pas ce qui lui a donné la capacité d'agir à ce moment-là. Elle aurait tout aussi bien pu être en état de choc.

Vers minuit, les symptômes du syndrome de stress post-traumatique ont commencé à se manifester. Contrairement aux clichés, Manuela Weichelt n'a pas ressenti de grandes émotions, pas de larmes, pas de cris de désespoir. En revanche, elle a eu de gros problèmes de concentration pendant neuf mois.

«Je n'arrivais pas à écrire une phrase sans faute et je perdais constamment le fil de mes propos»
Une rescapée de la tuerie de Zoug.

Elle a bénéficié du fait qu'après l'attentat, elle a trouvé directement une thérapeute en traumatologie avec laquelle elle s'est bien entendue. La thérapeute a proposé la thérapie EMDR au lieu d'une thérapie classique par la parole. EMDR signifie «Eye Movement Desensitization and Reprocessing», en français: «désensibilisation et traitement par le mouvement des yeux».

Il s'agit d'une forme particulière de psychothérapie. Son action est complexe, mais elle consiste essentiellement à suivre des yeux les doigts du thérapeute. Cette activation cérébrale aide à modifier les sentiments, les pensées et les comportements qu'une personne porte en elle à la suite d'une expérience traumatisante. Elle met de l'ordre dans un système nerveux submergé de stimuli.

Aujourd'hui encore, Manuela Weichelt sursaute lorsqu'elle ne parvient pas à identifier une forte détonation. Sinon, il n'y a presque plus de déclencheurs qui la catapultent dans ses souvenirs. Avant, il s'agissait de vestes en cuir rouge, car une conseillère d'Etat tuée en portait une. Ou des sirènes de gyrophares.

(Traduit et adapté par Chiara Lecca)

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