Le slogan «Drill, baby, drill» résume la politique énergétique et climatique de Donald Trump. En d'autres termes, forer, forer, forer – à la recherche de charbon, de pétrole et de gaz. Selon le New York Times, le futur président des Etats-Unis envisage par exemple de redéfinir les frontières de deux zones de protection de la nature dans l'Etat de l'Utah, ce qui permettrait de rendre accessibles des milliers d'hectares de terrain pour les forages pétroliers et l'exploitation minière.
De plus, les Etats-Unis – le pays dont les émissions sont les plus élevées après la Chine au niveau mondial – devraient probablement se retirer de l'Accord de Paris sur le climat dès l'année prochaine. Les observateurs s'attendent également à ce que Trump nomme des lobbyistes influents de l'industrie pétrolière et charbonnière dans son gouvernement, ainsi qu’au sein de son équipe de conseillers.
Ce sont les bruits qui courent à la conférence sur le climat qui se tient à Bakou, en Azerbaïdjan. Sonia Seneviratne, chercheuse en climatologie à l'ETH, a exprimé ses inquiétudes sur le comportement imprévisible du président élu.
Anthony Patt, professeur de politique climatique à l'ETH, ajoute que les Etats-Unis, sous Joe Biden, avaient commencé à assumer un rôle de leadership en matière de protection du climat – bien qu'il n'ait pas, par exemple, mis un terme au fracking. Avec Donald Trump comme président, le pays ne cherchera probablement plus à atteindre des objectifs climatiques ambitieux. Cependant, le chercheur ne pense pas que le 47e président nuira sérieusement à l'effort mondial face au changement climatique.
Certains experts envisagent que la concurrence avec la Chine jouera un rôle déterminant dans l'implication écologique des Etats-Unis. En effet, le pays asiatique domine actuellement la production mondiale de véhicules électriques, de batteries, d'éoliennes et de panneaux solaires - ce qui agace férocement les Etats-Unis. La pression interne sur Trump pour contrer la puissance de production de la Chine ne disparaîtra donc pas.
Cependant, le professeur Patt suppose que la transition énergétique verte dans les pays plus pauvres risque de ralentir, en raison de la diminution du soutien financier des Etats-Unis et le probable non-respect des engagements pris sous Biden.
Un ralentissement oui, mais un stop net vers les sources d'énergie verte est impossible. Moins chère que le pétrole, le gaz et le charbon, le passage à l'énergie verte est extrêmement rentable sur le plan économique, y compris aux Etats-Unis. Selon Mark Maslin, professeur de climatologie à l'University College de Londres, il y a au moins 10 millions d'emplois dans l'économie verte aux Etats-Unis, contre 300 000 dans l'industrie des combustibles fossiles.
Et cela ne plairait pas non plus au patron de Tesla, Elon Musk. Celui à qui Trump vient de confier un poste important dans son gouvernement, dans le tout nouveau Département de l'efficacité gouvernementale, aura à cœur que l'industrie américaine des voitures électriques et des batteries soit compétitive. «Ce n'est pas une question de climat, c'est une question de business», affirme Chris Hilson.
Pour Friederike Otto, physicienne et experte en événements météorologiques extrêmes à l'Imperial College de Londres, le constat est clair:
Les deux tempêtes Helene et Milton, en octobre, ont causé à elles seules des dégâts dépassant les 100 milliards de dollars et ont fait plus de 200 victimes. Les évènements climatiques extrêmes aux Etats-Unis vont devenir de plus en plus dévastateurs avec le réchauffement climatique – et donc de plus en plus coûteux.
Le chercheur en climatologie de l'ETH, Anthony Patt, estime, lui aussi, qu'il sera pratiquement impossible pour Trump de revenir sur la principale réalisation de Joe Biden en matière de protection du climat, l'Inflation Reduction Act, ou IRA. Grâce à cette loi, les entreprises américaines se voient récompensées par des subventions de plusieurs milliards de dollars lorsqu'elles investissent dans des technologies vertes.
Bien que Trump ait annoncé son intention d'annuler l'IRA, ses propres contributeurs, électeurs et les politiciens de son parti risquent de lui en empêcher la mise en œuvre. En effet, «ce sont principalement les Etats qui ont voté pour Trump qui bénéficient de l'IRA», explique Sonia Seneviratne. Plus d'une douzaine de membres républicains du Congrès se sont déjà opposés à des réductions des crédits d'impôt pour les énergies propres.
Sonia Seneviratne souligne en outre que Trump ne peut pas, d'un simple coup de baguette, torpiller les efforts de protection du climat des différents Etats américains:
Le Texas, un Etat dominé par les républicains, est également à la pointe de la transition vers l'énergie éolienne et solaire.
Selon le Pew research institute, un groupe de réflexion bipartisan basé à Washington, une majorité d'Américains soutient l'expansion des sources d'énergie renouvelables. Ainsi, deux tiers des personnes estiment que le pays devrait privilégier l'énergie éolienne et solaire plutôt que le pétrole, le charbon et le gaz.
Traduit et adapté de l'allemand par Léon Dietrich