Passer à un mouvement de tête de voir sa cervelle étalée sur l’estrade doit forcément constituer une expérience traumatisante. Pourtant, depuis qu'il a réchappé à une tentative d'assassinat lors d'un meeting en Pennsylvanie, le 13 juillet dernier, y laissant quelques infimes morceaux d'oreille, Donald Trump aime à affirmer qu'il ne garde pas la moindre séquelle psychologique des évènements.
Aucun trauma, aucune nuit blanche, aucun cauchemar, aucun flashback. Cela ferait définitivement de lui un cas à part, étant donné que 90% de victimes de violence armée souffrent de syndromes post-traumatiques, rappelle le Daily Beast.
Qu'il repense régulièrement à ce mouvement de tête qui lui a sauvé la vie ou non, le candidat n'a rien laissé filtrer de son trouble, ce samedi, pour son grand retour à Butler. Tout juste une expression de profonde fierté et d'émotion, au moment de monter sur la scène, alors qu'une foule en délire de plusieurs milliers de personnes braillait son nom avec passion.
Trump n'aurait pas pu exploiter plus à fond son statut de miraculé. Drapeau américain livré par parachute, dramaturgie dégoulinante, pause et pose affectées, yeux clos et verbes lourds; le show était à mi-chemin entre la cérémonie de clôture des JO et un enterrement 5 étoiles.
Pour l'occasion, le milliardaire avait emmené du beau monde. A commencer par son colistier, JD Vance, avec qui il n'avait plus partagé la vedette et un meeting depuis le mois d'août. Mais aussi son fils, Eric Trump, et sa femme Laura, qui ont fait monter la sauce. Aucun n'a manqué de répéter l'importance de ce rassemblement.
Sans oublier, pour clore le spectacle, un invité d'honneur. La crème de la crème. Elon Musk, devenu l'un des plus fidèles partisans du républicain. En guise de cerise sur cette tourte nappée de symboles, l'homme le plus riche du monde avait officialisé son soutien pour la toute première fois... le jour de la tentative d'assassinat.
Et comme tout s'est joué à un geste près, c'est en reprenant sa phrase là où il l'avait laissée, le 13 juillet, que Donald Trump a entamé son allocution ce samedi. «Comme je le disais…», a-t-il débuté, en désignant le fameux graphique sur l'immigration qu'il présentait juste avant la fusillade.
Il poussera le détail si loin qu'à 18h11, heure précise à laquelle les coups de feu avaient retenti le 13 juillet, l'ancien président interrompt son discours pour une minute de silence.
Une cloche a retenti trois fois, avant qu'un Ave Maria ne s'élève dans les airs. A en donner la chair de poule. Officiellement, un hommage destiné à la famille de Corey Comperatore, le pompier tué dans la fusillade en protégeant sa femme et ses enfants, par ailleurs installés en tribunes ce samedi. Officieusement, une ode au candidat-survivant et à son propre courage.
Un hommage qui se mue d'ailleurs rapidement en rassemblement standard. Il n'aura fallu qu'environ vingt minutes à Trump pour retomber dans sa rhétorique et ses travers habituels: grandes déclarations sur le déclin du pays, l'immigration et la criminalité, attaques en série contre Kamala Harris ou les athlètes transgenres, théories mille fois répétées sur l'élection volée en 2020. Rien de neuf sous le soleil couchant de Pennsylvanie.
Si, en apparence, le survivant n'a pas semblé très perturbé par son retour sur les lieux du crime, en coulisses, il se murmure qu'il perd un peu de cette belle assurance. Selon un initié au Wall Street Journal, l'ancien président a voulu savoir si les agents du Secret Service auraient pu rater leur tir, le 13 juillet, à l'instar du tireur de 20 ans sur le toit de l’entrepôt. «Non», lui a-t-on répondu.
Donald Trump aurait alors lâché un rire, avant de glapir: «C’est fou, non?»