Si je vous dis Kristi Noem, ce nom ne vous évoquera peut-être pas grand-chose. Mais si je vous dis: «Mais ouuuui... la ministre de Donald Trump qui a pris la pose avec son imposante Rolex dorée, devant des prisonniers au Salvador, le mois dernier», vous visualiserez peut-être mieux.
Toujours pas? Et si je vous parle de l'ancienne gouverneure du Dakota du Sud, celle qui a tué son chiot parce qu'il était «agressif» et qui manie le lance-flammes avec une aisance déconcertante?
Oui, voilà. Celle-ci.
Eh bien, il est arrivé une drôle d'histoire à cette haute responsable de Donald Trump de 53 ans, aussi surnommée la «Barbie de glace de Trump», le dimanche de Pâques. Trop absorbée à savourer un dîner en compagnie de sa famille et de son adjointe au Capitole Burger, un pub chic du centre-ville de Washington DC, la secrétaire à la Sécurité intérieure ne remarque pas immédiatement ce qui se passe à ses pieds. Sous la table.
Tout juste aura-t-elle senti quelque chose «frôler» sa jambe. Mais elle est alors tellement préoccupée par ses quatre petits-enfants qui gesticulent autour de la table qu'elle ne s'inquiète pas. C'est sans doute l'un des petits qui lui a donné un coup de pied, par accident.
«J'étais une grand-maman occupée avec ses quatre petits-enfants de moins de 4 ans, et je prenais soin d'eux, je leur donnais à manger et je profitais de ma famille, oui, mais j'avais certainement mon sac à main qui touchait même mes pieds», racontera Kristi Noem quelques jours plus tard sur le podcast The Vince Show.
Mais voilà qu'au moment de payer l'addition, catastrophe. Son sang ne fait qu'un tour. Son sac Gucci, un modèle porté épaule à 4400 dollars, a disparu. Et avec lui son porte-monnaie Louis Vuitton, son badge d'entrée au département de la Sécurité intérieure, son permis de conduire, son passeport, ses médicaments, sa trousse de maquillage (!!!), des chèques vierges, ses clés d'appartement... ainsi que 3000 dollars en liquide.
Alors que l'affaire s'ébruite à Washington et qu'une enquête est ouverte, la secrétaire à la Sécurité intérieure est interrogée par les médias dès le lendemain, en pleine chasse aux œufs de Pâques à la Maison-Blanche. Embarrassée, la haute fonctionnaire reconnaît l'incident avant de balayer d'autres questions. «Je ne pense pas pouvoir encore commenter», indique Kristi Noem. «Ce n'est pas encore résolu».
Pendant ce temps, les caméras de surveillances révèlent tout ou presque des méthodes du voleur. L'individu, le visage dissimulé sous une casquette et un masque Covid de type FFP2, vêtu de vêtements sombres, s'approche ni vu ni connu de la secrétaire à la Sécurité. Le dos tourné, installé à la table vide d'à côté, il utilise son pied gauche pour rapprocher le précieux sac à mains. Après avoir inspecté les environs, il s'empare de son butin, le recouvre avec sa veste et s'en va sans demander son reste.
«C'était assez choquant, en fait, parce qu'il était assis juste à côté de mes pieds... Il l'a accroché avec son pied et l'a traîné à quelques pas, a laissé tomber un manteau dessus et l'a pris», se souvient Kristi Noem sur le podcast The Vince Show.
A ce stade, toutes les questions sont encore ouvertes. Kristi Noem a-t-e-lle été visée en raison de son rôle de premier plan au gouvernement? De son département, chargé de la sécurité de la nation, notamment du contrôle des frontières et de la protection contre l'immigration et le terrorisme? Ou encore de ses positions politiques pas toujours orthodoxes? C'est peu probable, selon le procureur fédéral Ed Martin, en charge de l'enquête.
La suite des évènements donnera raison au procureur. Après presque une semaine de traque effrénée, le voleur est interpellé le samedi suivant. Et, en effet, on est loin du pickpoter novice et isolé. Son nom est Mario Bustamante-Leiva. Originaire de Santiago, au Chili, c'est un criminel de carrière, déjà connu des services de police. Il avait été arrêté quelques années plus tôt pour un stratagème similaire à Londres, ce qui lui avait valu trois ans de prison, selon des sources policières au New York Post et au Daily Mail.
Après avoir fui le Capitole Burger, précisent les autorités, Mario Bustamante Leiva a dépensé un peu plus de 205 dollars en nourriture et alcools au restaurant Angolo Ristorante Italiano, avec les cartes de crédit de sa victime, avant de s'endormir sur une table à l'extérieur.
Soupçonné d'appartenir à un important réseau de voleurs sur la côte Est, l'homme se trouvait illégalement aux Etats-Unis. D'ailleurs, il n'a pas agi seul. La police ne tardera pas à arrêter un deuxième suspect, également migrant illégal.
Si le ressortissant chilien a confessé avoir volé le sac à main de Barbie, il a précisé aux autorités qu'il était alcoolique et souffrait de problèmes de mémoire.
Inculpés pour divers chefs d'accusation, dont vol fédéral, fraude électronique et vol d'identité aggravé, les deux suspects sont détenus en attendant de voir finaliser les accusations - et leur expulsion. Il est peu probable que les compères puissent remettre les pieds aux Etats-Unis en toute liberté avant un long, très long moment, a ajouté le procureur Martin.
Le cas résolu, de nombreuses voix critiques s'élèvent toutefois pour comprendre comment le Secret Service, qui fait l'objet d'une surveillance étroite depuis les deux tentatives d'assassinat du président Trump l'été dernier, a-t-il pu pêcher à nouveau? Comment une faille de sécurité aussi grave, impliquant une personnalité chargée de gérer la sécurité du pays, a-t-elle pu se produire?
On ignore comment le voleur a pu s'approcher si près de la secrétaire à la Sécurité qui, de par sa fonction, bénéficie d'une sécurité 24 heures sur 24, et s'enfuir sans plus de problèms. Selon une source auprès de NBC News, pas moins de deux agents en civil étaient assis à proximité, au bar du restaurant, au moment du vol, entre la table de Kristi Noem et la porte.
«Il s'agit d'une faille de sécurité qui a en réalité de lourdes conséquences, et elle nécessite un examen immédiat et approfondi par le Secret Service, le département de Sécurité intérieur et d'autres partenaires chargés de l'application de la loi», a noté Jonathan Wackrow, analyste chargé de l'application de la loi et ancien agent, interrogé sur CNN.
Alors que l'agence se dépatouille avec une énième polémique, d'autres internautes ont soulevé une autre question tout aussi impérieuse. Pourquoi diable, à l'ère des paiements électroniques et d'Apple Pay, la secrétaire à la Sécurité intérieure trimballait-elle autant d’argent liquide avec elle?
Les 3000 dollars cachés dans son Gucci n'a pas manqué d'alimenter les spéculations préexistentes selon lesquelles Kristi Noem entretiendrait une liaison avec son conseiller et ancien directeur de campagne de Trump, Corey Lewandowski. L'un et l'autre sont tous deux mariés - avec d'autres personnes.
Le cash aurait permis d'éviter d'employer des cartes de crédit, allèguent quelques internautes complotistes. Une rumeur bien vite démentie par un porte-parole de l'intéressée. «Toute sa famille était en ville, y compris ses enfants et ses petits-enfants. Elle profitait de son manque pour offrir à sa famille un dîner, des activités et des cadeaux de Pâques.»
Affaire à suivre?