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Guerre contre l'Ukraine

Les détenus envoyés en Ukraine sèment la terreur en Russie

Des ex-soldats de Wagner violent et tuent en toute impunité en Russie
De retour en Russie, certains détenus envoyés en Ukraine terrorisent la population.Image: AP/watson

Des ex-soldats de Wagner violent et tuent en toute impunité en Russie

Des dizaines de milliers de détenus se sont battus en Ukraine, dans les rangs du groupe Wagner d'abord, de l'armée russe ensuite. A leur retour, ils terrorisent la population et ont trouvé un moyen très simple pour échapper à la justice.
19.07.2024, 05:51
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Les crimes décrits dans la presse russe sont particulièrement sordides. Un homme originaire de Lipetsk a tué sa belle-fille de 4 ans; un autre a poignardé une femme et l'a laissée mourir dans le froid. Un troisième a assassiné un ami et attaqué une jeune fille. Les cas se comptent par dizaines et les coupables ont tous le même profil. Des anciens détenus qui se sont battus en Ukraine.

Depuis quelque temps, le retour au pays de ces combattants au profil particulier plonge la population russe dans la terreur, rapporte Libération.

Moscou a commencé très tôt à se servir de prisonniers pour ses besoins militaires en Ukraine. D'abord par le biais du groupe Wagner, qui a lancé une véritable campagne de recrutement dans les centres pénitentiaires du pays au cours de l'été 2022. La milice offrait aux détenus leur liberté, un casier judiciaire vierge et un salaire élevé après six mois passés au front.

Quelques 50 000 prisonniers ont sauté sur l'occasion, selon les déclarations d'Evguéni Prigojine, ancien chef de Wagner. Des chiffres confirmés par les estimations de plusieurs ONG et médias indépendants. Mais pas tout le monde a pu profiter de ces contreparties. Mal entraînés, peu armés et utilisés comme chair à canon, les détenus ont été décimés sur les champs de bataille ukrainiens. Prigojine a affirmé qu'environ 10 000 d'entre eux ont été tués, mais d'autres sources avancent des bilans encore plus lourds.

«Une terrifiante boîte de Pandore»

Malgré ce taux de mortalité ahurissant, beaucoup d'anciens détenus sont finalement parvenus à arriver au bout de leur service et à rentrer en Russie. Parmi eux se trouvent des dizaines d'assassins, voleurs et violeurs. Qui, jouissant de leur liberté fraîchement retrouvée, ont recommencé à faire ce qu'ils faisaient avant d'être emprisonnés.

Un cas avait fait beaucoup de bruit. Celui d'un homme qui purgeait une peine pour meurtre, recruté par Wagner et envoyé en Ukraine. Rentré dans son village natal, il a commencé à terroriser la population, menaçait les habitants armé d'une hache et détruisait leurs voitures. Une semaine plus tard, il a violé et poignardé une retraitée.

«Une terrifiante boîte de Pandore» s'est ouverte sur la Russie, résume Libération. D'autant plus que le recrutement de prisonniers ne s'est pas arrêté avec le retrait de Wagner d'Ukraine et la mort de son chef, décédé de manière suspecte en août dernier. Bien au contraire. En février 2023 déjà, le ministère de la Défense russe avait lancé son propre programme, offrant initialement les mêmes conditions que Prigojine.

Déployés dans des unités appelées Storm-Z et, successivement, Storm-V, les prisonniers sont soumis aux mêmes conditions extrêmes qui régnaient sous Wagner. En avril de cette année, pas moins de 60 000 anciens détenus ont été envoyés en Ukraine par les autorités russes, selon BBC Russie.

Par rapport à Wagner, le ministère de la Défense a limité les privilèges. Les contrats ont été rallongés à un an et se renouvellent automatiquement jusqu'à la fin de la guerre. Les poursuites pénales ne peuvent être annulées que si le combattant reçoit une décoration d’Etat, ou s’il est démobilisé. Des cas ont déjà eu lieu, et le problème reste le même: à terme, des milliers de criminels se retrouveront dans la nature avec des casiers judiciaires vierges.

«Cadavre encore chaud»

Mais ce mécanisme soulève un autre problème, encore plus profond. Le service militaire en Ukraine offre aux criminels la possibilité d'échapper totalement à la justice. Il suffit de signer un nouveau contrat avec l'armée. Olga Romanova, fondatrice d'une ONG russe, explique à Libération:

«Le tueur peut être attrapé sur le cadavre encore chaud de sa victime et envoyé sur le front, sans même passer par la case arrestation, il n’a qu’à manifester son souhait de combattre.»
Olga Romanova, «La Russie derrière les barreaux»

Ce système s'applique également aux récidivistes, y compris les ex-détenus condamnés pour des crimes commis après leur retour d'Ukraine. Par conséquent, le mécanisme peut théoriquement se répéter à l'infini. Selon les ONG russes, certains hommes ont fait le circuit trois fois. Les cas se compteraient par dizaines.

En d'autres termes, résume Olga Romanova, «cette entreprise a détruit le lien entre crime et châtiment». Ce qui, à ses yeux, est sa «conséquence la plus grave».

À Bakhmout, le groupe Wagner menace l’armée russe
Video: watson
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