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Guerre contre l'Ukraine

Comment l'Autriche pourrait renforcer l'armée de Poutine

Ramzan Kadyrov, qui dirige la République tchétchène, est un fidèle de Vladimir Poutine.
Ramzan Kadyrov, qui dirige la République tchétchène, est un fidèle de Vladimir Poutine.Image: Keystone

Comment l'Autriche pourrait renforcer l'armée de Poutine

L'Autriche expulse des Tchétchènes malgré le risque qu'ils soient enrôlés de force dans la guerre en Ukraine. L'ONG Amnesty dénonce une «violation du droit international».
28.05.2025, 16:5028.05.2025, 16:50
Blaise GAUQUELIN, Vienne, Autriche / afp
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L'Autriche extrade des Tchétchènes menacés d'un recrutement forcé sur le front ukrainien au motif du danger qu'ils représentent pour la sûreté de l'Etat, selon des documents de justice, en «violation du droit international» selon Amnesty. Deux citoyens russes originaires de Tchétchénie, qui avaient reçu l'ordre de se présenter aux services russes de mobilisation et avaient déposé une demande d'asile, ont été expulsés cette année, les autorités considérant qu'ils n'étaient pas menacés de manière «vraisemblable».

Selon le gouvernement autrichien, ces demandeurs sont trop âgés pour être affectés par la conscription, qui concerne les hommes âgés de 18 à 30 ans, et peuvent de toute façon y «échapper en s'établissant à Moscou». Il estime que le maintien sur son territoire de ces Tchétchènes «menacerait sans aucun doute la sûreté nationale», en se basant sur «des résultats d'enquête policière portant sur le terrorisme» et l'extrémisme religieux, sans en préciser la nature.

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En raison de l'arrêt des liaisons aériennes entre les pays de l'Union européenne et la Russie, les expulsions se font «en avion par la Serbie, l'Azerbaïdjan et la Géorgie». Vienne ne publie pas les statistiques détaillées des expulsions concernant spécifiquement les Tchétchènes, qui sont citoyens russes ou apatrides. Le ministère de l'Intérieur n'a pas répondu.

S'il n'y a plus de coopération depuis le début de la guerre en Ukraine, l'Autriche dit «prendre comme une approbation silencieuse l'absence de réaction de Moscou à ses avis d'expulsion», d'après les documents consultés.

L'impact de l'assassinat de Samuel Paty

L'activiste Rosa Dounaïeva, qui vit à Vienne, s'insurge «qu'automatiquement, Tchétchène veuille dire terroriste» aux yeux de l'opinion publique comme des élus. Selon elle, les Tchétchènes seraient ciblés car ils ont «rarement les moyens de payer un avocat» pour se défendre. Or «les autorités savent bien, dans toute l'Europe, que les personnes expulsées peuvent être recrutées pour combattre en Ukraine» si leurs familles ne payent pas une grosse somme d'argent, affirme-t-elle, «qu'elles aient 18 ou 60 ans».

En 2006, l'UE a conclu un accord de réadmission avec le gouvernement russe facilitant le retour des personnes condamnées en justice, qui n'a jamais été remis en cause par l'Autriche, malgré l'opposition de Bruxelles à l'invasion de l'Ukraine.

Après l'assassinat en France de l'enseignant Samuel Paty par un Tchétchène en 2020, l'Autriche a mis en place une cellule policière chargée de surveiller cette communauté. Les extraditions se sont accélérées et la notion de prévention des risques s'est installée. Frappée pour la première fois la même année par un attentat jihadiste et accusée de négligence, elle redouble depuis de prudence.

La plus grande communauté en diaspora par habitant

En janvier 2024, l'ONG de défense des droits humains Amnesty International a demandé à l'Europe de «cesser de renvoyer des personnes du Nord-Caucase», en raison de «la nouvelle menace de mobilisation dans les forces armées». «La répression est telle en Tchétchénie que les familles ont peur de rendre ces affaires publiques», explique Natalia Prilutskaya, spécialiste de la Russie au sein de cette ONG.

«Il n'y a pas d'espace sûr où que ce soit»

Et la mobilisation concerne «tous les hommes considérés comme en réserve», «âgés de 70 ans ou moins». Pour elle, «les autorités autrichiennes violent leurs obligations internationales» en matière de droits humains.

En 2022, la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) avait condamné la France pour l'expulsion de Tchétchènes vers la Russie, en vertu de l'article 3 de la Convention européenne qui interdit la torture. «La protection ne souffre nulle dérogation, même en cas de danger public» et de «liens avec une organisation terroriste», avait-elle précisé.

Quelque 250 000 personnes d'origine tchétchène vivent en Europe et l'Autriche, un pays de 9,2 millions d'habitants, en accueille selon les statistiques officielles entre 30 000 et 40 000, la plus grande communauté en diaspora par habitant. Elles sont arrivées après avoir fui la république russe à majorité musulmane ravagée par deux guerres meurtrières et contrôlée depuis par Ramzan Kadyrov, fidèle du Kremlin réprimant toute dissidence.

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