Israël s'en prend à Macron
Le président français avait déjà annoncé en juin son intention de reconnaître la Palestine au nom de la France. Cependant, le raid militaire israélien contre des installations nucléaires iraniennes a contrecarré ses plans. Emmanuel Macron souhaite concrétiser son projet lundi prochain lors de l'Assemblée générale de l'ONU à New York, par une annonce qualifiée de «solennelle».
En collaboration avec l'Arabie saoudite, la France a présenté une résolution qui prévoit non seulement la reconnaissance de la Palestine, mais qualifie également le Hamas de groupe terroriste, l'excluant ainsi de toute solution à deux Etats. Le texte a été adopté vendredi dernier par 142 pays, y compris certains jusque-là réticents comme l'Allemagne ou l'Italie, tandis que dix pays, dont les Etats-Unis, la Hongrie et l'Argentine, ont voté contre.
Macron ne cache pas qu'il considère actuellement la mise en œuvre d'une solution à deux Etats comme illusoire. Il souhaite, en ce moment critique, rappeler qu'aucune solution purement militaire n'est possible au Moyen-Orient. De manière plus générale, il entend préserver l'équilibre de la «politique arabe» française, telle qu'elle avait été suivie par le général de Gaulle après la Seconde Guerre mondiale.
Macron, sauveur du monde?
A Jérusalem, des représentants du gouvernement estiment en revanche que le président français cherche avant tout à détourner l'attention de sa crise intérieure et à se poser en sauveur du monde. A Paris, on souligne plutôt que Macron souhaite apaiser les quartiers de banlieue, où règne actuellement une tranquillité trompeuse.
Israël réagit avec une grande virulence à l'initiative parisienne, bien que la France ne devienne que le 148ᵉ Etat à reconnaître la Palestine. Le premier ministre Benjamin Netanyahou reproche avec des mots durs à Macron — et non au co-initiateur, le prince saoudien Mohammed ben Salmane — de mener une «croisade contre Israël» et d'alimenter «le feu antisémite».
Un son similaire se fait écho à Washington. Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a déclaré que l'initiative française récompensait les attentats terroristes du Hamas. L'ambassadeur des Etats-Unis à Jérusalem a, quant à lui, ironisé en affirmant que la France pourrait tout aussi bien céder la Côte d'Azur aux Palestiniens.
Et cela ne se limite pas aux mots. Le gouvernement israélien a déclaré Macron persona non grata. Israël envisage de fermer le consulat général de France à Jérusalem, ouvert depuis 1843 et compétent également pour Gaza, la Cisjordanie et les églises du Mont des Oliviers. Dans la presse française, des annonces pleine page pro-israéliennes s'interrogent:
Les diplomates de Macron rétorquent que des pays comme l'Arabie saoudite seraient prêts à reconnaître le droit à l'existence d'Israël si la même reconnaissance était accordée à la Palestine. Ils se disent soulagés de voir que la semaine prochaine, des pays tels que le Royaume-Uni, le Canada ou l'Australie suivront également. Après les reconnaissances déjà effectuées par l'Espagne, la Suède et l'Irlande, l'initiative française provoque une rupture dans le camp européen, ce qui explique probablement la réaction virulente d'Israël.
L'UE veut sanctionner Israël
La Commission européenne a donné un premier signe mercredi en proposant des sanctions commerciales contre Israël. Les importations israéliennes, d'une valeur de 5,8 milliards d'euros — soit 37% des exportations d'Israël vers l'UE — perdraient ainsi leur régime préférentiel au sein de l'Union européenne.
Seraient également concernés deux ministres israéliens ainsi que des dirigeants du Hamas, qui se verraient frappés par le gel de leurs avoirs et une interdiction d'entrée dans l'UE. Par cette mesure, Bruxelles entend montrer qu'elle cible en priorité les extrémistes.
Cependant, certains pays comme l'Allemagne, l'Italie et la Hongrie s'opposent à ces sanctions. Le vote se fera à la majorité qualifiée — nécessitant notamment 65% de la population de l'UE — de sorte que la position de l'Allemagne pourrait être déterminante. Berlin ne s'est toutefois pas encore officiellement prononcé de manière définitive.
Traduit et adapté par Noëline Flippe