Le présentateur partisan de la chaîne d'information qatarie Al Jazeera a gesticulé avec colère lorsque l'ancien vice-ministre israélien des Affaires étrangères, Danny Ayalon, a tenté d'expliquer pourquoi la population civile palestinienne devait désormais fuir «vers le sud». «Nous n'avons pas non plus dit aux gens d'aller se noyer sur les plages de la Méditerranée», a souligné le diplomate de 68 ans.
«L'idée» serait plutôt que les habitants de Gaza fuient vers le désert proche de la péninsule égyptienne du Sinaï, «où il y a suffisamment de place pour eux». La communauté internationale y construirait alors des villages de tentes dans lesquels les Palestiniens pourraient être approvisionnés en eau et en nourriture.
👉Suivez en direct la situation en Israël👈
Les déclarations de Danny Ayalon sont interprétées dans le monde arabe comme «une preuve supplémentaire des véritables intentions des Israéliens». Selon des opinions exprimées dans les talk-shows des grandes chaînes de télévision arabes, il ne s'agit en aucun cas pour le gouvernement de Benjamin Netanyahou de protéger les Palestiniens, mais de les «expulser pour toujours».
L'appel à l'évacuation lancé par le commandement de l'armée israélienne aux Palestiniens, réitéré à plusieurs reprises au cours du week-end, ne signifie «rien d'autre qu'un nettoyage ethnique» de la bande de Gaza.
Israël n'a pas précisé que les habitants de Gaza pourraient rentrer chez eux après une fuite anticipée vers l'Egypte. C'est aussi pour cette raison que le gouvernement du Caire a, jusqu'à présent, catégoriquement refusé d'ouvrir la frontière palestino-égyptienne au niveau de la ville de Rafah.
Il est important que le peuple palestinien «reste fermement présent sur sa terre», a rappelé le chef de l'Etat égyptien Abdel Fattah al-Sissi pour clarifier la position de son pays sur la «question que tous se posaient». Son pays fera en tout cas tout ce qui est en son pouvoir pour défendre les Palestiniens – ce qui reste à être démontré.
En réalité, l'Egypte ne souhaite pas plus que d'autres pays arabes laisser entrer les terroristes ennemis du Hamas ou leurs sympathisants sur son territoire. Pour la plupart des Palestiniens, une éventuelle fuite vers l'Egypte, dans le désert aride du Sinaï, évoque le souvenir de ce que l'on appelle la «Nakba» - le mot arabe pour catastrophe.
Décrite comme l’exil forcé des Palestiniens lors de la guerre d'indépendance qui a suivi la création de l'Etat d'Israël, celle-ci s'est produite en 1948. Près de 750 000 Palestiniens y avaient alors perdu leur foyer: la partie arabe affirme qu'ils avaient été expulsés de manière ciblée par l'armée israélienne.
Des massacres de Palestiniens, comme celui tristement célèbre de Deir Yassin, auraient également été perpétrés à cette époque. Les historiens israéliens attribuent en revanche la responsabilité principale de cet exode aux armées des pays arabes voisins qui ont immédiatement envahi Israël après la proclamation de l'Etat en 1948.
Les 750 000 réfugiés palestiniens enregistrés par l'Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés (UNWRA) après 1950 n'ont pas pu retourner dans leur patrie. La majorité d'entre eux vit actuellement dans des camps de réfugiés en Jordanie, en Syrie et au Liban. Leur nombre a entre-temps été multiplié par six pour atteindre plus de cinq millions.
En tant qu'«apatrides», ils n'ont pas les mêmes droits que les citoyens de leur pays d'accueil. Les réfugiés palestiniens sont ouvertement discriminés, ce qui a participé à l'affluence d'organisations terroristes comme le Hamas ou le Jihad islamique.
Le conflit entre Arabes et Israéliens, né il y a 75 ans, n'a toujours pas été résolu. Il n'a même cessé de s'aggraver au cours des dernières décennies et a connu une escalade ultime avec le pogrome du Hamas il y a une semaine. Cela expliquerait le potentiel désir du gouvernement Netanyahou, de «résoudre» le «problème de Gaza» par un exode massif vers l'Egypte.
Si cela devait effectivement se produire, l'accusation de «nettoyage ethnique» formulée du côté arabe serait probablement renforcée et déterminerait le discours pour les années à venir.
Israël, de son côté, tient le Hamas pour responsable de la tragédie des réfugiés dans la bande de Gaza. Les membres de l'organisation terroriste se retrancheraient derrière les civils et seraient ainsi responsables de la souffrance et de la misère des civils.
Par le biais de leurs canaux de propagande, des fonctionnaires du Hamas ont appelé la population à défendre leurs maisons et à mourir «en martyrs» malgré les bombardements israéliens.