C'est une ville frontière avec la Russie, au nord-ouest de l'Estonie. Narva et ses plus de 50 000 habitants sont désormais au centre de l'attention, notamment de la part du Kremlin. Située à 130 km de Saint-Pétersbourg, la ville possède une écrasante majorité de citoyens russophones. Un héritage est lié à la période soviétique.
Pourtant, au poste-frontière, un drapeau rappelle que l'Estonie appartient à l'Otan depuis 2004. Un avertissement à l'égard du grand voisin russe. En effet, Narva, connue pour son extraction minière et sa région industrielle, intéresse fortement Poutine. Le maître du Kremlin insinuait même, en 2022, que la ville estonienne faisait partie de la Russie.
Par ses mots, Poutine cherche à mobiliser une partie de la population encore attirée par le souvenir de l’URSS. Cette forte identité russe remonte à après 1945. La ville, reconstruite à cette époque, avait vu l’arrivée massive de travailleurs russes venus exploiter les gisements locaux de schistes bitumeux, explique le Centre national des études spatiales (Cnes).
Aujourd'hui, la population narvéenne compte beaucoup de Russes, qui ont opté pour le «passeport gris» d’apatride, ou encore le passeport russe, informe Le Devoir.
Cette importante population irrite de nombreux citoyens estoniens, fatigués de voir leurs compatriotes russophones ne pas piper mots dans la langue nationale estonienne. Un signal d'alarme pour les autorités locales, qui craignent que la propagande russe fragilise la sécurité nationale.
La menace paraît de plus en plus forte pour la troisième ville d'Estonie, comme le rapporte le média lituanien Delfi, citant la maire de la ville, Kati Raik:
Une propagande russe qui n'hésite pas à qualifier de «fasciste» le pouvoir de Tallinn et à critiquer les autres pays baltes, comme la Lettonie et la Lituanie.
Dans la foulée de l'invasion russe sur le territoire ukrainien, l'Estonie a été profondément choquée. Un rappel que la menace russe n'est séparée que d'un fleuve et la crainte que Narva ne soit la future cible du Kremlin.
Tallinn redoute qu’en cas de gel du conflit en Ukraine la Russie décide de se tourner vers d'autres objectifs (dans la foulée d'une pause sur le front ukrainien) et lance une offensive contre un pays vulnérable de l’Otan.
Surtout que les tentatives d'intimidation n'ont jamais cessé. La maire rappelle, toujours dans le média Delfi, que l'été 2024, la Russie a retiré les bouées délimitant la frontière dans le fleuve Narva.
Et ajoute:
D'autres tentatives de déstabilisation ont aussi été observées, comme la venue de migrants somaliens et syriens pour engorger la frontière estonienne. Une méthode déjà employée par le Kremlin contre la Finlande.
Des provocations qui inquiètent et poussent le pays à investir pour se défendre. L'acquisition de matériel militaire a considérablement augmenté ces dernières années, alors que Tallinn hésite à fermer totalement la frontière avec la Russie, car, selon la maire de Narva, «la menace russe est partout». (svp)