Les sanctions occidentales contre la Russie ont considérablement réduit la marge de manœuvre de Vladimir Poutine. Néanmoins, il arrive encore exporter quelques biens afin de faire entrer de l'argent dans les caisses de l'Etat pour financer sa guerre contre l'Ukraine. Le pétrole russe joue ainsi un rôle important – c'est l'une des principales sources de revenus du pays. Mais cela pourrait bientôt prendre fin.
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Le mécontentement contre le pétrole russe bon marché s'accroît dans les pays arabes, indique le Business Insider. L'Arabie saoudite, principal membre de l'Organisation des pays producteurs de pétrole (Opep), tente depuis longtemps de maintenir le prix du pétrole au-dessus de 100 dollars le baril. Le prince héritier Mohammed bin Salman – surnommé MBS – a besoin de ces revenus pour financer ses mégaprojets du «Projet 2030». Il a donc demandé ces derniers mois aux membres de l'Opep de réduire la production – sans grand succès jusqu'à présent.
Le prix du pétrole stagne autour de 80 dollars. En cause? La surproduction de pétrole russe. Moscou a par exemple produit, en juillet, bien plus de pétrole que ne le prévoient les quotas, a déclaré la société S&P Global Rankings, qui a examiné les données disponibles publiquement.
La Russie est dépendante de l'argent du pétrole, qui représente environ 40% des recettes de l'Etat. Mais l'Arabie saoudite pourrait bientôt perdre patience. «L'Arabie saoudite en a marre», a déclaré Simon Henderson, directeur du programme Bernstein sur la politique du Golfe et de l'énergie au Washington Institute, au Business Insider. Selon le Financial Times, le souverain saoudien MBS envisagerait de s'engager dans une guerre des prix pour mettre la Russie à genoux. Si le cheikh ouvre les robinets pétroliers, le prix pourrait chuter à 50 dollars, ce qui creuserait un trou considérable dans le budget russe.
Le ministère russe de l'économie a revu à la hausse ses prévisions de ventes à l'exportation de pétrole et de gaz, de 17,4 milliards de dollars pour 2024, à 239,7 milliards, en raison de perspectives de prix plus positives, selon un document consulté par Reuters.
Simon Henderson, spécialiste américain de l'évolution des prix du pétrole au Washington Institute, estime que la guerre des prix de 2020 risque de se répéter. A l'époque, l'Arabie saoudite et la Russie étaient à couteaux tirés, Riyad inondait le marché de pétrole issu de ses réserves. A l'époque, le prix avait brièvement chuté à 20 dollars le baril.
De tels prix poseraient un gros problème à la Russie. «Comme la Russie vend déjà son pétrole à des prix réduits et avec des coûts de production plus élevés, un environnement de prix bas sur les marchés pétroliers pourrait affecter sa capacité à financer la guerre en Ukraine», a écrit Luke Cooper, chercheur boursier à la London School of Economics, pour l'IPS Journal.
La Russie a déjà annoncé qu'elle réduirait sa production l'année prochaine. La production devrait encore baisser à 518,6 millions de tonnes, soit une baisse de 11,4 millions de tonnes par rapport aux prévisions précédentes. On ne sait pas si cela est dû à la pression des Saoudiens ou si la Russie rencontre des difficultés dans sa production de pétrole. Car contrairement aux pays arabes qui extraient assez facilement l'or noir du sol désertique, la production dans la Sibérie russe est nettement plus complexe et accompagnée de coûts plus élevés. Si le prix baisse, Poutine ne pourra bientôt plus faire de bénéfices.
Traduit et adapté de l'allemand par Léa Krejci