International
Suisse

Noël choque des gens? Supprimons aussi foie gras, gui et confinement

Absurdie Noël
Noël ne m'inspire jamais, c'est-à-dire toujours.Image: Shutterstock / Montage watson
Absurdie

Noël choque des gens? Supprimons aussi foie gras, gui et confinement

Noël ne devrait pas être mentionné dans la communication de la Commission européenne, car ce mot heurte les non-chrétiens: c'est du moins l'avis de la commissaire européenne à l’Egalité Helena Dalli. Mais y a-t-il un seul terme, concept ou chose qui ne heurte personne?
05.12.2021, 08:0905.12.2021, 09:09
Jonas Follonier
Suivez-moi
Plus de «International»

Elle est revenue en arrière depuis. Helena Dalli, la commissaire européenne à l’Egalité (oui, il y a un tel poste, mais il n'y a pas de commissaire européen à la Liberté), a suscité de grandes réactions auprès des Etats membres avec son code du langage inclusif pour la Commission européenne. Au cœur de ce guide, l'invitation à abandonner les références à Noël (car cela exclurait les personnes qui ne sont pas chrétiennes), et même les formules telles que «Madame et Monsieur» (car il y a des personnes qui... vous connaissez la suite).

Que cette technocrate soit actuellement en train de retravailler l'ouvrage après avoir accueilli des critiques virulentes, notamment de la part du milieu politique, n'y changera rien. On a pu voir ses intentions et ses convictions. Sans rire, vouloir supprimer la mention de Noël... en Europe? Qu'est-ce que l'Europe, si ce n'est l'ensemble des terres ayant été hellénisées, romanisées et christianisées selon la fameuse conception de Paul Valéry? Même les plus farouches athées et anticléricaux se définissent par rapport à la chrétienté.

Noël ne s'adresse pas seulement aux chrétiens

On le voit dans la construction même de ces deux mots, justement: «a-thée» pour «sans Dieu»; «anti-clérical» pour «contre le Clergé». Celui qui s'énerve contre Noël ne pourra plus avoir le plaisir de le faire si on supprime cette fête des discours officiels. Or, il s'agit précisément pour Helena Dalli et ses amis de changer la langue et donc le monde dans lequel nous nous inscrivons. Songeons à cette description si actuelle issue du roman 1984 de George Orwell, qui explique bien la démarche en question:

«Tous le propos du néoparler est de rétrécir le champ de la pensée. [...] A terme, nous rendrons littéralement impossible le mentocrime pour la bonne raison qu'il n'y aura plus de mots pour le commettre. Tout concept sera exprimé par un seul vocable, dont le sens sera strictement défini et les significations annexes effacées puis oubliées.»

Plus important encore, je suis persuadé que l'écrasante majorité des musulmans, bouddhistes et autres agnostiques se contre-fiche de la présence de Noël dans les discussions, les rues et les activités de décembre, quand elle ne se livre pas à une même joie que le reste de la population, qui a davantage trait à l'humanisme qu'à une quelconque foi ou pratique religieuse. Ou alors, l'omniprésence de cette échéance les irrite et les lasse au même titre que certains chrétiens de culture.

De l'égalité au favoritisme

Faisons un pas de plus. Vouloir traiter tout le monde à égalité est le b.a.-ba de la démocratie. Mais cela ne revient pas à vouloir parler en ne blessant personne. Traiter tous les individus à égalité, c'est normalement la définition de l'Etat de droit (pas de traitement de faveur ou de défaveur); c'est hélas devenu la définition du politiquement correct. Du moins auprès de certaines instances. Heureusement qu'en l'occurence, il y a eu un tollé, ce qui confirme qu'un certain bon sens est majoritaire dans la société.

Le plus absurde de cette histoire, c'est que ce sont justement toujours les mêmes publics qu'ont en tête les gardiens de la chasse aux mots potentiellement choquants. Les fameux «dominés», ou «défavorisés», ou «racisés», ou «autres». On l'avait vu avec la réécriture des Enfers de Dante ou avec les trigger warning (avertissements au début des livres). Quel privilège leur offre-t-on!

Pense-t-on à ces personnes qui n'aiment pas les feuilles de gui? A celles qui digèrent mal le vin chaud? Aux adversaires du foie gras? A ceux qui sont allergiques à la bûche de Noël? Et a-t-on seulement songé à tous ces gens qui ne supportent plus le mot «confinement» – et le confinement lui-même? Autant supprimer tout ça. Surtout, plus de mot qui choque. Merci.

On se retrouvera ainsi enfin dans un cadre non-discriminant, à faire la fête en buvant du jus de pomme tiède avec un portrait du général de Gaulle dans un cadre en faux bois, et quelques graines pour se sustenter. Ah mais, problème: les anti-fêtes seront discriminés. Et il y a fort à parier qu'il y en a beaucoup.

Les pires tenues aux American Music Awards
1 / 17
Les pires tenues aux American Music Awards
source: keystone
partager sur Facebookpartager sur X
Copin comme cochon: Les déménagements
Video: watson
3 Commentaires
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
3
Un promoteur fribourgeois fait plier une société de la Migros en justice
1,8 millions de francs. C'est la somme astronomique en jeu dans ce fiasco judiciaire entre le géant orange et un ancien président régional du groupe. Le verdict est final.

L'avocat et promoteur immobilier fribourgeois Damien Piller signe une victoire définitive dans le volet pénal du conflit l'opposant à Migros Neuchâtel-Fribourg (MNF), dont il a été président de 1996 à 2020. Le Tribunal fédéral (TF) a rejeté un recours de la coopérative régionale.

L’article