Une nouvelle mesure contre le surtourisme énerve à Majorque
Jadis, à Majorque, aller à la plage sans prévenir, avec sa serviette, un bouquin et son envie de faire bronzette, c’était normal. Aujourd’hui, dans des lieux comme Calvià, Alcúdia ou Santa Ponça, c’est devenu mission impossible.
En cause? Un système de réservation numérique, comme l'écrit bluewin.ch, via des plateformes comme Beach Manager, qui permet de booker son duo de transats et leur emplacement exact, jusqu’à plusieurs semaines à l’avance, mais qui rend caduque les arrivées spontanées.
Ceux qui se pointent sans réservation se retrouvent souvent refoulés par le personnel. Cerise sur le château de sable: certains de ces portails ne sont accessibles qu’entre 16 heures et 6 heures.
Les locaux sont furieux à Majorque
Le mécontentement n’est pas réservé qu’aux touristes: de nombreux habitants se sentent exclus d’espaces qui devraient être publics. D’autant plus dans un contexte où certains hôtels achètent en masse les meilleurs emplacements pour leurs clients.
Surtout que ce changement, numérique, mais aussi économique, n’est pas gratuit. Un forfait «standard» (deux chaises longues et un parasol) tourne autour de 18 euros par jour. Certains plus luxueux, avec serviettes, coussins, casier pour les affaires, montent vite à plus de 50 euros.
L’accès à la plage devient ainsi un luxe réservé à quelques happy few et à celles et ceux qui ont un smartphone ou un ordinateur pour booker leurs transats, ce qui n’est pas le cas de certains locaux qui venaient sur ces plages depuis toujours.
Transats en ligne VS zéro transat
En parallèle, certaines plages comme Playa de Palma voient leurs transats disparaître dans une logique anti‑surtourisme. Comme l'écrit Travel and Tour World, en 2025, plus de 1700 transats et parasols ont déjà été retirés, avec des réductions initiales annoncées à environ 20%, notamment à Playa de Palma (de 6 000 à 4 436 chaises longues), Cala Major, Ciutat Jardi ou encore Can Pere Antoni.
Ce phénomène des réservations en ligne, pensé pour organiser le flux touristique et éviter le chaos sur les plages, intervient dans un contexte où l’île vit une drôle de transition. Après des années de surtourisme décrié, des manifestations hostiles et des slogans rageurs, du style «Touristes, rentrez chez vous», Majorque se retrouve confrontée à un effet boomerang.
Dans certaines zones, notamment autour de Sóller, Capdepera ou encore Valldemossa, la fréquentation a chuté de 20 à 40% selon les secteurs, rapporte The Independent. Les guides touristiques et restaurateurs parlent d’une baisse brutale qui met en péril des dizaines de petits commerces qui, jusqu’ici, vivaient essentiellement des visiteurs. Pour les habitants et les acteurs économiques, le paradoxe est criant.
Pour rappel, le tourisme représente près de 45% du PIB de Majorque et un tiers des emplois sur l’île. Entre les transats réservés par appli et les terrasses qui sonnent creux, Majorque se cherche désormais un équilibre.