Les attaques de drones russes contre l'Ukraine ont atteint leur plus grande fréquence depuis le début de l'invasion russe en février 2022. Les drones utilisés sont les modèles iraniens Shahed, réputés pour leur bourdonnement bruyant. Alors qu'au cours de la première année de la guerre, environ 2000 attaques de ce type de drone ont été enregistrées par des organismes indépendants, ce chiffre a presque triplé en 2025.
Le commandement russe maintient la population ukrainienne dans un état de terreur permanent. Des régions jusqu’alors considérées comme relativement sûres sont désormais la cible des attaques russes. Il est quasiment impossible de prédire quand, où, à quelle échelle et selon quelle logique les drones frapperont. Les cibles sont à la fois civiles et militaires.
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Des dizaines de civils ont péri ces dernières semaines sous la fureur de guerre de Moscou. Alors que les drones sont devenus l’un des instruments principaux de la terreur russe, les ressources de la défense antiaérienne ukrainienne peinent à suivre l’intensité des attaques.
Le programme de drones de la Russie a atteint un niveau tel que le président ukrainien Volodymyr Zelensky craint que l’armée du Kremlin soit bientôt capable de lancer jusqu’à 1000 drones par jour.
Au début de la guerre, la Russie utilisait principalement des drones Shahed produits en Iran et livrés depuis Téhéran. Désormais, la production a été transférée sur le territoire russe, permettant une adaptation continue aux stratégies militaires du Kremlin. Ces drones volent plus haut, plus vite et plus loin, ce qui complique considérablement leur interception par l’Ukraine.
Jusqu’ici, l’un des piliers de la défense anti-drones ukrainienne était constitué de petites unités mobiles, souvent un pick-up équipé d’une mitrailleuse avec des soldats armés. Une tactique efficace contre les anciens modèles de Shahed.
Mais avec une altitude de vol variant désormais de 2 à 2,5 kilomètres (contre environ 1000 mètres au début de la guerre), ces interventions sont de moins en moins possibles, comme l’explique l’analyste militaire ukrainien Oleksandr Kovalenko dans un entretien avec Die Zeit. Certaines attaques contre Kiev auraient même été menées depuis une altitude de cinq kilomètres.
Une telle altitude est possible, notamment parce que les versions russes des drones Shahed ne se limitent plus à une propulsion à hélice et à piston classique, mais utilisent de plus en plus de moteurs à réaction. De plus, les versions connues sous les noms de Geran-2 et Geran-3 sont équipées de modules de téléphonie mobile permettant une transmission en temps réel des données de vol, compliquant encore davantage les efforts de défense ukrainiens.
Selon le groupe de réflexion américain Atlantic Council, la Russie en produirait désormais jusqu’à 5000 par mois. Beaucoup de ces drones sont aujourd’hui dotés d’intelligence artificielle, ce qui améliore la précision du ciblage.
La charge explosive a également été augmentée, passant d’environ 50 à 90 kilos. La vitesse a aussi grimpé jusqu’à 550-660 km/h, atteignant même 700 km/h en piqué. Les drones russes sont ainsi nettement plus rapides que les modèles iraniens originaux.
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— The world is patriots.🇺🇸🇷🇺 (@bertalanzoli) July 13, 2025
Autre constat préoccupant: l’armée ukrainienne observe que la Russie utilise de moins en moins de composants occidentaux dans la fabrication de ses drones. Ceux-ci proviennent désormais en grande partie de Chine. A un tel point qu’Oleksandr Kovalenko affirme:
Pour épuiser les ressources déjà limitées de l’Ukraine, la Russie adopte un nouveau type d’attaque: elle lance des essaims de drones volants très proches les uns des autres, de manière à échapper aux radars ukrainiens qui ne les détectent pas toujours comme des objets individuels. Ce n'est que peu avant leur objectif que ces essaims se dispersent et révèlent l'ampleur réelle du danger.
De plus, les forces armées russes misent de plus en plus sur une autre tactique: des attaques simultanées avec de faux drones bon marché. Ceux-ci sont équipés de lentilles réfléchissantes spéciales et posent de nouveaux défis aux défenses ukrainiennes. Il est souvent difficile de faire la différence entre un faux et un vrai drone Shahed. Le plan russe fonctionne dès lors que l’Ukraine utilise ses rares et coûteuses batteries antimissiles pour neutraliser les faux drones.
Pendant une grande partie de la guerre, les drones Shahed ciblaient principalement le centre et le sud de l’Ukraine, notamment des villes comme Odessa, Mykolaïv, Dnipro ou Kiev. Mais ces dernières semaines, les frappes s’étendent aussi de plus en plus vers l’ouest du pays.
Face à l'escalade de la guerre des drones, l’Ukraine doit développer de nouveaux moyens de défense. Lors de la conférence pour la reconstruction à Rome, le président Zelensky a mentionné l’existence de technologies efficaces développées par des entreprises américano-ukrainiennes pour contrer les Shahed.
Ces dispositifs ukrainiens ne coûtent qu’environ 500 dollars pièce, bien moins que les drones russes, estimés entre 20 000 et 50 000 dollars pièce par les experts militaires.
Pour faire face à la vague d'attaques qui continue de s'intensifier, Zelensky a renouvelé à Rome son appel à l’aide financière des alliés occidentaux. Mais le porte-parole de la division sud de l’armée ukrainienne, Serhii Bratchuk, affirme que seule «l’élimination de la cause du problème» pourrait vraiment aider.
Dans ce contexte, l'Ukraine pourrait bientôt recevoir le soutien tant espéré des Etats-Unis. Donald Trump a annoncé qu'il mettrait à disposition de l'Ukraine, via l'Otan, de nouvelles armes défensives, dont le fameux système Patriot, également fourni à Israël.
Parallèlement, Donald Trump a annoncé ce lundi vouloir taxer les importations des alliés de la Russie à hauteur de 100% d'ici 50 jours, ceci afin de contraindre le maître du Kremlin à se rendre à la table des négociations. Cette nouvelle mesure pourrait marquer un tournant dans la guerre en Ukraine.
Traduit de l'allemand par Anne Castella