Si la pensée de la fin imminente de The Crown vous laisse déjà orphelin, ravalez vos larmes, chers amateurs de drama royal! 400 pages de «secrets» s'apprêtent à se retrouver étalés sur les rayons des librairies francophones, ce 1er décembre. Le titre est lourd de promesses: Fin de règne. Où va la monarchie britannique, les derniers scandales révélés. Rien que ça.
Son auteur? Omid Scobie, journaliste et chroniqueur royal de profession, «pom-pom girl en chef des Sussex» de réputation. A tel point qu'on soupçonne le Britannique établi à Londres, à défaut d'aller faire du shopping deux fois par semaine avec Meghan Markle à Beverly Hills, de s'entretenir régulièrement avec la duchesse. L'intéressé dément farouchement, arguant qu'ils auraient seulement des «amis communs». Hmhm.
Une chose est sûre: le rédacteur du magazine Harper's Bazaar a choisi son camp. Après un premier livre consacré au «Megxit» et à la liberté retrouvée en 2020, le voilà de retour avec un second bouquin très attendu sur l'avenir de la monarchie britannique. Enfin, plutôt... sa fin imminente.
Fin de règne entend brosser un état des lieux de l'institution après la disparition de sa figure de proue bien-aimée, Elizabeth II. Ne vous attendez pas à un portrait très flatteur des Windsor. A en croire les critiques du livre paru mardi dans les médias anglophones, qui l'ont déjà décortiqué en long, en large et en travers (la version en anglais est disponible depuis le 28 novembre), nous avons affaire ici à une véritable déclaration de guerre.
Ce vendredi, nous devrions découvrir une famille royale gangrénée par ses luttes intestines, où chacun est obsédé par sa propre gloriole. Un roi jaloux de son fils, un futur roi jaloux de son frère, une femme jalouse de la belle-soeur. Le tout sur fond de préjugés, de coups bas et de concurrence permanente. Bref, «un système desséché», «une firme cratérisée», «une entreprise familiale instable» et «une institution en déclin». Aïe!
Pas étonnant que Taylor Swift n'ait même pas voulu chanter pour ces affreux bonhommes lors du concert donné en l'honneur du couronnement, en mai dernier.
Au fil des pages, on devrait également en savoir plus sur les deux racistes de la famille royale, dont les noms sont connus de Kate et William. Lesquels ne sont pas en reste. Le futur roi est décrit dans l'ouvrage comme de «mauvaise humeur, émotionnellement instable et jaloux». Quant à sa femme Kate, la voilà jetée dans le rôle de mégère froide et calculatrice, dépourvue de réelle personnalité, qui ne peut pas entendre le nom de Meghan sans un «frisson».
Charles III en prend aussi pour son grade. Le roi, «un ancien prince choyé devenu un roi vieillissant» (certes, on peut tous être d'accord là-dessus), est aussi décrit comme, «incompétent, indécis, capricieux et souvent placé au milieu de situations délicates». Tout aussi jaloux du succès de son fils aîné, il ne supporterait pas d'être éclipsé. Oh! Et il exige aussi que des larbins repassent ses lacets de chaussures. Chacun son truc.
Pour ce qui la reine Camilla, on n'en parle même pas. Une sorte de chaudasse «du genre à jeter sa culotte sur la table», rigoureusement allergique à toute forme de progressisme. Identité de genre, préjugés raciaux et véganisme sont considérés comme par Sa Majesté comme autant d'«absurdités de gauche», selon un ancien assistant interrogé par Omid Scobie. «Même les options sans gluten ou sans produits laitiers sur le menu d'un restaurant l'irritent.» Bonne ambiance.
Pas étonnant donc que cette critique relativement peu objective de la Firme ait fait bondir journalistes, critiques et royalistes fervents. De part et d'autre de l'Atlantique, depuis quelques heures, l'ouvrage d'Omid Scobie fait l'objet de critiques incendiaires. Côté britannique, évidemment, rien d'étonnant à ce que le journaliste se fasse allumer. Il s'agit là d'une stratégie commerciale assumée.
Au-delà des nombreuses approximations et des attaques peu étayées («une coquille d'œuf plus qu'une bombe», regrette la BBC), c'est donc un ouvrage de «propagande pro-Sussex» que reproche le Daily Telegraph. Un exposé plein de «beaucoup de détails insignifiants», «qui se lit comme un article de Mumsnet sur les pires beaux-parents du monde». Sans oublier un postulat «essoufflé, belliqueux et ennuyeux», conclut le Times.
Côté américain, pourtant plus volontiers pro-Harry et Meghan, même son de cloche. Invité à donner sa critique (au vitriol) pour le New York Post, l'animateur Piers Morgan, en conflit déclaré avec les Sussex depuis des années, va jusqu'à comparer Omid Scobie à une «petite fouine», qui «gagne sa vie en vendant des ordures sur le dos de la famille royale, au nom des victimes les plus fourbes du monde, Meghan et Harry». Avant de l'associer carrément à un ministre de Saddam Hussein.
Quant au plus mesuré New York Times, la critique note seulement que: «Que Scobie ait ou non collaboré activement avec Meghan et Harry pour ce livre, il ne leur rend aucun service.»
Ouïe. Il est vrai que, au moment où l'on prête au prince Harry et son épouse l'ambition d'entamer une «tournée de réconciliation» au Royaume-Uni avec leur famille, ce n'est pas ce bouquin glissé sous le sapin de Noël qui va améliorer les choses.
Et vous, convaincu? Curieux d'en savoir plus sur ce brûlot anti-monarchie? Rendez-vous est donné ce vendredi pour la version francophone. Pas sûr que ces attaques, même formulées dans la langue de Molière, s'en retrouvent adoucies.