Cette influenceuse a mis la ville de Trump à ses pieds: «Ils adorent ça»
«I love your outfit!» Si vous êtes un jour interpellé par cette voix posée et enthousiaste en traversant Worth Avenue, l'artère principale de Palm Beach, vous aurez tout gagné. Il vous faudra toutefois, au préalable, vous munir de votre plus belle robe d'été Max Mara, d'un survêt' Gucci ou d'un costard Ralph Lauren, sans oublier de trimballer un sac Hermès ou Chanel à 15 000 dollars.
C'est le minimum pour attirer l'œil de Devorah Ezagui, 29 ans, qui traque depuis deux ans les looks des résidents de cette enclave exclusive pour ultra-riches, avant de les poster sur Instagram et TikTok, pour le plus grand plaisir de ses près de 2 millions d'abonnés. Des micros-trottoirs comme il en existe dans d'innombrables quartiers tout aussi huppés, de New York à Paris, en passant par Londres et les Hamptons.
@classofpalmbeach #diamondring #luxuryrings #pinkstardiamond #1billion #diamondtester #diamonds #gucci #guccigang🇳🇵 #birkin #birkinmom #chanel #perfumetiktok #fragrancetiktok #trishmcevoy #billionaire #oldmoney #oldmoneyaesthetic #oldmoneylifestyle #luxury #luxuryhomes #luxuryoutfit #styling #digitalstylist #palmbeachcounty #palmbeachflorida #voguechallenge #fyp #foryou ♬ original sound - Class of Palm Beach
Devorah Ezagui connait bien Palm Beach, puisqu'elle y a grandi - avant de s'expatrier quelques années à New York, où elle cumulait des emplois de coach sportive, de styliste et de chargée de marketing. A l'époque, la jeune femme avait l'habitude de demander aux passants leur avis sur leurs tenues. C'est le déclic.
«Je ne m’adresse qu’à certaines personnes pour des pièces bien précises. Je ne demande jamais aux gens combien coûte leur sac à main. Ce serait un peu trop intrusif. D'ailleurs, je sais précisément combien il coûte» confie la styliste en riant.
Lorsqu'elle revient à Palm Beach, son île de 22,5 kilomètres de long située à une heure de voiture de Miami, elle lance ses comptes «Class Of Palm Beach» pour offrir aux quidams un aperçu quasi quotidien du style vestimentaire des ultra-riches. C'est un succès monumental.
De Palm Beach à Genève
Si la mode est de plus en plus au «quite luxury», au beige et à l'absence de logo étalé en toutes lettres sur un t-shirt, ce n'est pas le cas à Palm Beach. Ici, la tendance est plutôt au more is more et au grand déballage. Les sacs Chanel XXL côtoient les pommettes liftées, les lèvres botoxées et l'accumulation de bijoux Cartier et Van Cleef clinquants - si clinquants que ça pique parfois (souvent?) les yeux.
Qu'est-ce qui différencie cette petite ville américaine de Paris, Londres ou Milan? «Palm Beach est un endroit vraiment particulier: vous pouvez venir comme vous voulez. Vous pouvez porter des bijoux de la tête aux pieds, même si c’est juste pour un brunch», nous explique Devorah Ezagui.
L'influenceuse n'a toutefois pas limité sa traque des meilleurs looks à Palm Beach. Elle a également filmé des passants à Paris, Milan... ou Genève. Dans un pays comme la Suisse, où l'argent est nettement plus tabou, comme a-t-elle été accueillie?
«Quand je suis allée à Genève et que j’ai posé quelques questions, les gens que j’ai interrogés étaient très ouverts», affirme-t-elle. «Peut-être que c’est ma personnalité, je ne sais pas? Mais je vois ce que vous voulez dire: je voyais dans leurs yeux une petite hésitation, au début.»
Une rencontre l'a d'ailleurs particulièrement marquée dans la Cité de Calvin. «Une femme fascinante. Wow. Sa voiture, sa tenue… Son post est devenu viral. Un goût impeccable», souffle Devorah à l'évocation de ce souvenir. «Beaucoup de vidéos que je fais montrent de la richesse, mais pas forcément du goût – juste beaucoup de bijoux. Mais cette Genevoise – elle s’appelle Samantha – avait un goût impeccable.»
Le symbole de statut ultime
Preuve du phénomène suscité par Devorah aux Etats-Unis, des chauffeurs Uber à Scarlett Johansson, tous reconnaissent sa voix si particulière. A l'ère où les médias sociaux supplantent les médias traditionnels, «Class of Palm Beach» fait désormais office de chronique mondaine majeure, au point d'éclipser le célèbre Palm Beach Daily News, aussi surnommé la «page dorée», qui est gorgé de photographies de galas et de déjeuners mondains.
Inutile de préciser qu'apparaître sur les comptes de «Class of Palm Beach» figure désormais en top priorité des résidentes. Comme un ultime symbole de statut social pour celles qui semblent déjà tout posséder.
Au point que certains habitants sont prêts à se «jeter sur elle» pour figurer sur la liste non officielle des personnes les mieux habillées de la ville. Certains sont tellement déterminés à apparaître sur le compte de Devorah qu’ils attendent des heures sur l’avenue la plus fréquentée, dans l’espoir qu'elle les remarque.
Entre ceux qui la «bombardent» de courriels et de messages, ceux qui l'importunent lors d'événements et ceux qui la contactent par le biais de leur attachée de presse, Devorah a du pain sur la planche. D'autres, encore, proposent à la créatrice «des sommes considérables pour y apparaître», confessait-elle au printemps dernier au London Times.
Lui arrive-t-il de dire «non»?
«Je n’aime pas ce qui fait 'cheap'. Quand on a du goût, ça se voit tout de suite. Et quand on n’en a pas, ça se voit aussi», résume Devorah, quand on lui demande ce qu'elle n'aime pas.
Le bad buzz Trump
Preuve de l'influence acquise par la reine officieuse de Palm Beach? Elle peut s'introduire jusque dans les couloirs du pouvoir américain: Mar-a-Lago, le manoir de Donald Trump, situé à la pointe de Palm Beach. Au moment de notre conversation par téléphone, elle vient d'ailleurs de vivre un sérieux bad buzz sur les réseaux sociaux.
Invitée à la soirée d'Halloween organisée dans la résidence privée du président américain, le 31 octobre 2025, Devorah n'a pas manqué de partager quelques stories de l'évènement sur Instagram. Mal lui en a pris. «J’ai reçu énormément de critiques pour ça. Ça m’a vraiment mis un coup. Les gens étaient très, très énervés, à cause de tout ce qui se passe dans le monde politique», nous confie-t-elle.
«J’ai posté des vidéos de Mar-a-Lago parce que, pour Class of Palm Beach, c’était la seule soirée d’Halloween à couvrir. Alors j’ai filmé. Et j’ai perdu beaucoup d’abonnés – environ 5000 en une nuit.»
«Je comprends toutefois la colère que ça a suscité à gauche, concède Devorah. Les libéraux ont trouvé cela indécent parce que la fête était extrêmement luxueuse. C’était grandiose, en effet, et vu le contexte politique, ça ne passait pas bien du tout».
«Et... c’est le président des Etats-Unis! Si Joe Biden avait été président, j’aurais fait exactement la même chose», conclut la créatrice de contenu.
Son voisin Donald Trump, d'ailleurs, le connait-elle personnellement? Lui a-t-elle déjà parlé? «Oui, bien sûr! Il m’a prise dans ses bras, rigole-t-elle. Il est très charismatique. Il sait comment l'être».
Verra-t-on un jour le président américain apparaître sur les comptes de Class Of Palm Beach?
Toutefois, plus que Donald Trump, c'est sa femme, Melania, que Devorah Ezagui rêverait de voir apparaître sur son compte: «J’adorerais avoir Melania. C’est un sujet délicat, parce que les gens le politisent tout de suite. Mais c’est une femme fascinante, avec beaucoup de style. Il y a quelque chose chez elle. Et on ne lui rend pas assez hommage pour ça».
