«Le ballon passe de justesse à droite du poteau – aucune joueuse galloise dans la surface. Une chance pour la gardienne néerlandaise, gênée par le soleil.»
C’est avec ce type de descriptions imagées qu’Alex Schüpbach fait vivre le match aux supporters malvoyants. Âgé de 44 ans et originaire de Kriens, il est membre de l’association Blind Power, qui rend le football accessible aux personnes aveugles, malvoyantes et voyantes grâce à l’audiodescription.
Schüpbach arrive tôt au stade de Lucerne samedi, afin de vérifier le matériel fourni par l’UEFA avec son collègue commentateur René Inderbitzin – une différence par rapport aux matchs de Super League, où ils apportent leur propre équipement.
Après quelques légers problèmes techniques au démarrage, la transmission fonctionne. Quinze minutes avant le coup d’envoi, ils passent en direct et livrent aux auditrices et auditeurs les premières informations: couleurs des maillots, joueuses clés, statistiques. Ensuite, le match s’anime vraiment sur le terrain. «La Néerlandaise a été prise en sandwich par deux Galloises – sur le flanc gauche, à environ cinq mètres de la ligne de touche», commente Schüpbach.
La passion de Schüpbach pour le football est née très tôt. Son père l’emmenait aux matchs du FC Lucerne. Pendant son temps libre, il regarde souvent du football et s’intéresse au sport en général.
C’est au cours de ses études de linguistique qu’il a découvert le commentaire sportif, lorsqu’un enseignant a parlé de l’association Blind Power. Une organisation qui fait toute la différence pour les plus de 370 000 personnes malvoyantes en Suisse. Aujourd’hui, l’association compte une trentaine de commentatrices et commentateurs qui décrivent en direct près de 200 matchs par an: Super League, Ligue des champions et équipe nationale suisse. Toute personne intéressée peut en principe postuler. La formation est assurée par des modules internes proposés par Blind Power.
À la 15e minute du match de samedi, Schüpbach reçoit un message d’une collègue: il n'y a plus de son sur le flux audio. Un bref silence, puis il réagit calmement. Alors qu’une pause hydratation est observée sur le terrain, il redémarre le système. Quelques secondes plus tard, le son est rétabli. L'homme de 44 ans s’excuse pour cette brève interruption et reprend son commentaire comme si de rien n’était.
La préparation d’un match est intense. Schüpbach suit les conférences de presse, étudie les feuilles de match et lit les journaux. Pour les équipes étrangères en particulier, la connaissance des noms, des postes ou des joueuses clés est essentielle. Grâce à des outils numériques, il garde en permanence les informations principales à portée de main. Pendant le commentaire, les deux intervenants se relaient toutes les cinq minutes.
Contrairement aux commentateurs télé classiques, qui peuvent s’appuyer sur les images, Schüpbach et son collègue doivent, eux, décrire en permanence l’action avec des mots.
L’offre est également utilisée par des personnes sans déficience visuelle. Ainsi, Schüpbach et ses collègues ont par exemple été entendus lors du match d’ouverture de l’Euro entre la Suisse et la Norvège, diffusé en public à Berne.
L’association Blind Power a vu le jour en 1997 dans une école pour aveugles à Berne, et elle est indépendante depuis 2006. Elle est financée par des dons, des cotisations de membres et des subventions liées à des projets. Pour l’avenir, Alex Schüpbach se montre confiant.
L’intérêt ne cesse de croître. «L’inclusion dans le sport progresse lentement, mais de manière tangible», estime Schüpbach. Il se dit très satisfait de la soirée à Lucerne – même si le son a brièvement été interrompu.
Durant l’Euro, il commentera encore d’autres matchs en direct. Avec passion, précision – et une voix qui peint des images et rapproche les gens.