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Neymar pense arrêter avec le Brésil après le Mondial 2022

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image: keystone/shutterstock

Neymar est au bout du rouleau, mais peut-on vraiment le plaindre?

Neymar (29 ans) pense que la Coupe du monde 2022 au Qatar sera sa dernière. Il n'est pas sûr d'avoir la force mentale pour continuer sa carrière après. Des propos qui ont beaucoup surpris, car Neymar n'a que 29 ans. Mais ils témoignent des vraies difficultés psychologiques rencontrées par les superstars du sport.
11.10.2021, 19:0313.10.2021, 17:39

Le Brésil entier tremble depuis dimanche soir. La raison? La déclaration de Neymar avant le match des qualifs pour le Mondial 2022 entre la Seleção et la Colombie (0-0):

«Je pense que c'est ma dernière Coupe du monde. Je le vois comme ça parce que je ne sais pas si je serai assez fort mentalement pour continuer à gérer ma vie de footballeur par la suite»
Neymar

Après la tenniswoman Naomi Osaka et la gymnaste Simone Biles, entre autres, c'est donc une autre vedette du sport qui brise le tabou en soulevant la difficulté psychologique de mener une carrière de très haut niveau.

Coup de mou interdit

Derrière les aveux de Neymar (29 ans), une double piqûre de rappel: premièrement, et très basiquement, ces superstars restent des êtres humains avec leurs failles, même si leur talent hors norme nous incite à croire le contraire.

Deuxièmement: les exigences sur le plan mental liées à un tel statut sont gargantuesques. «La pression est énorme», confirme Mélanie Hindi, psychologue du sport à Meyrin (GE). «Avec le salaire et le talent qu'a un joueur comme Neymar, le public attend de lui qu'il soit toujours au top. Ces sportifs n'ont jamais le droit d'être malades ou d'avoir un "coup de mou". Et quand ils jouent bien, les gens pensent que c'est simplement normal, alors que les reproches arrivent tout de suite à la moindre défaillance.»

Trimer pour être tout le temps à la hauteur, donner à chaque fois la meilleure image de soi sur et en dehors du terrain, encaisser les nombreuses critiques: le risque de burn-out est bien réel, comme dans d'autres professions plus communes. «Le mental est comme le corps: il prend des coups et, à un moment donné, il ne peut plus supporter», constate Mélanie Hindi, qui accompagne plusieurs athlètes de haut niveau. C'est d'autant plus vrai quand la barre est fixée si haute si longtemps, en l'occurrence depuis 2010 pour Neymar – date de ses débuts en sélection (à 18 ans).

Opération de comm'?

Dans son cas, le risque est accentué par une hyper exposition. «Tout le monde vous juge sur ce que vous faites et même sur ce que vous arrêtez de faire», expliquait l'attaquant du Paris Saint-Germain (PSG) en début d'année au média en ligne Gaffer. «Au Brésil, la presse ne le lâche pas», appuie Junior Santos, ancien footballeur pro et entraîneur brésilien établi dans le Nord vaudois. «Elle dit qu'il est en surpoids, qu'il ne court pas ou qu'il joue trop individuel. Ces critiques lui font mal et il le montre.»

La presse brésilienne a critiqué la condition physique défaillante de Neymar cet été, déclenchant la colère du footballeur.
La presse brésilienne a critiqué la condition physique défaillante de Neymar cet été, déclenchant la colère du footballeur. image: keystone

Dans cette même interview à Gaffer, Neymar confessait avoir déjà eu envie d'arrêter de jouer au football à cause des pressions du public et de la presse:

«Une fois, j'ai atteint un point où je me suis demandé pourquoi je devrais continuer à jouer si cela ne leur plaît pas. J'avais l'habitude de rentrer chez moi la tête brûlée (...)»
Neymar

Le mal-être du numéro 10 de la Seleçao aurait-il pris le dessus sur son plaisir de jouer et son amour du football? Junior Santos n'y croit pas. Et c'est justement pour ça que l'ancien coach d'Yverdon (VD) doute de la sincérité de Neymar:

«Je pense que sa déclaration de dimanche fait partie d'une stratégie de communication pour s’enlever de la pression, en supprimant des attentes sur lui. Parce qu'un joueur de 30 ans, en bonne santé, peut encore jouer quatre ans à ce niveau. Surtout un Brésilien, pour qui il est culturellement plus difficile d'arrêter une carrière tellement le football est gravé dans notre ADN»
Junior Santos, ancien entraîneur brésilien d'Yverdon-Sport

L'hypothèse est plausible, quand on sait que les sportifs de ce statut sont entourés d'experts en communication.

Junior Santos est sûr d'une chose: comme il l'a promis, Neymar donnera tout pour aller gagner la Coupe du monde – son rêve ultime – et du même coup devenir, pendant une période, «le meilleur footballeur du monde parce que Lionel Messi et Cristiano Ronaldo ne l'ont encore jamais remportée».

Le résident du Nord vaudois concède quand même que si le Brésil ne décroche pas le Graal au Qatar, «il sera difficile pour Neymar de se replonger dans une routine exigeante pendant quatre années supplémentaires, d'autant plus que jouer dans le championnat français, moins attractif que d'autres, n'est pas le plus motivant».

Des mots sur de vrais maux

De la stratégie, Mélanie Hindi en décèle aussi dans les propos de Neymar dimanche. Mais pour la psychologue, il s'agit avant tout de protection. D'abord en se donnant le droit de changer d'air – quitter le football pro – quand il devient trop pesant. Ensuite, en sensibilisant le public à ses difficultés. «Même s'il s'agit d'une stratégie de communication pour s’enlever de la pression, ça sous-entend qu'il ressent cette pression. Et c’est le message qu'il veut faire passer.»

Robert Enke avec le maillot d'Hanovre, en mai 2009, six mois avant de mettre fin à ses jours.
Robert Enke avec le maillot d'Hanovre, en mai 2009, six mois avant de mettre fin à ses jours. image: keystone

Alors certes, les soucis de Neymar et des athlètes aux salaires généreux, sinon stratosphériques, ne sont pas les mêmes que ceux du commun des mortels, mais ils existent.

Preuves en sont les nombreuses dépressions qui touchent les sportifs de haut niveau et qui, dans certains cas, peuvent avoir une fin tragique. On se souvient notamment du suicide du gardien de foot Robert Enke en 2009, alors international allemand. De quoi nous faire comprendre que sous les paillettes, les maux sont bien réels.

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