Le 31 octobre dernier, Loanne Duvoisin a écrasé toutes ses adversaires (elle a fini deux minutes devant sa dauphine) pour devenir championne du monde élites de cross triathlon. Une consécration pour une jeune athlète de 23 ans qui s'entraîne comme une acharnée depuis plusieurs saisons, dépensant tout son temps, son énergie et ses économies pour percer dans sa discipline.
Son exploit a été relayé dans de nombreux médias. Loanne Duvoisin a même fait la Une du quotidien ArcInfo dans les jours qui ont suivi.
En quelques jours, le canton de Neuchâtel a découvert qu'il tenait une nouvelle star. Or les meilleurs sportifs du canton sont nominés à la fin de chaque année aux Mérites sportifs, une distinction honorifique récompensant les plus grandes prouesses de la saison. La cérémonie aura lieu le 8 décembre prochain. Mais sans Loanne Duvoisin.
Contactée, la Vaudruzienne se dit moins fâchée que surprise. On la devine touchée, mais soucieuse de ne pas polémiquer. «On s'investit, on pense qu'on a fait une bonne saison. C'est un peu particulier», avance-t-elle prudemment.
Pour tenter de comprendre cet oubli, nous avons joint par téléphone un des membres de la commission des Mérites. Président de l’Association neuchâteloise de la presse sportive, Philippe Silacci explique que l'exploit réalisé par Loanne Duvoisin est arrivé trois semaines trop tard.
Le règlement, que nous avons consulté, précise tout de même que le Prix est décerné pour la période susmentionnée «sauf exception». Sous-entendu: le département cantonal des Sports aurait pu s'arranger avec ses propres règles pour intégrer sa championne du monde sur le tard, surtout que les votes du public n'ont été ouverts que le 9 novembre. Selon nos informations, une requête a d'ailleurs été faite en ce sens par un membre du jury des Mérites neuchâtelois. Mais sa demande est restée sans effet.
Contactée par watson, la conseillère d'Etat en charge des Sports assure ne pas avoir été avertie. «Intégrer une sportive trois semaines après la fin des sélections n’aurait pas été possible, car les opérations étaient déjà en marche dans un timing serré, souligne Crystel Graf. Une campagne de communication a été lancée, des publications ont été faites sur différents canaux afin que la population puisse voter pour son athlète préféré/e».
«On m'a dit que mon titre mondial serait pris en compte pour les nominations de l'an prochain, mais ça ne fera pas trop de sens. Imaginez que je vive une saison blanche en 2022», songe la triathlète, par ailleurs championne d'Europe M23, multiple lauréate sur le circuit européen et 3e lors d'une compétition élite. Tout ceci avant la date fatidique du 10 octobre 2021. «J'ai des résultats que certains nominés n'ont pas, même s'il y a du beau monde parmi les athlètes retenus».
On pourrait suspecter une querelle d'egos, mais ce n'est pas le sens des propos. Les regrets de Loanne Duvoisin viennent aussi du fait que les Mérites sportifs représentent un formidable tremplin vers un avenir meilleur. L'athlète honoré offre de la visibilité à ses sponsors (donc peut potentiellement en séduire d'autres) et repart avec une jolie récompense. Lors de la dernière édition, Marianne Fatton avait reçu un chèque de 3000 francs.
Une somme importante pour n'importe quel athlète en devenir, qui correspond à 10% du budget annuel de Loanne Duvoisin pour pratiquer son sport.