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Voici à quoi penser si vous marchez dans une «beuse» cet été

Idyllic mountain landscape in the Appenzell Alps with farmhouses, green meadows and grazing cows, the Alpstein mountains with Saentis in the background, Appenzellerland, Canton Appenzell Innerrhoden,  ...
Alpes appenzelloises.Image: iStockphoto
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Voici à quoi penser si vous marchez dans une «beuse» cet été

Dans quelques semaines, les paysans suisses débuteront leurs récoltes et les bêtes sont déjà de sortie. Une période essentielle qui peut apporter son lot de petits désagréments pour les habitants. Voici comment les éviter et favoriser le vivre-ensemble.
25.05.2025, 06:5325.05.2025, 06:53
Anne Challandes
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Le printemps est enfin là. Il est même déjà bien installé. La végétation est luxuriante, elle se développe à profusion, profitant des températures plus douces, du soleil et de l’humidité encore à disposition dans les sols. Du moins dans nos régions. Dans l’Est de la Suisse en revanche, une sécheresse aussi marquée que ces dernières semaines n’a, de mémoire d’homme, jamais été constatée à cette période: lac de Constance au plus bas et coteaux herbagers de la même couleur qu’à la fin d’un été chaud et sec.

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Chaque dimanche matin, watson invite des personnalités romandes à commenter l'actu ou, au contraire, à mettre en lumière un thème qui n'y est pas assez représenté. Au casting: Nicolas Feuz (écrivain), Anne Challandes (Union Suisse des Paysans), Roger Nordmann (conseiller stratégique, ex-PS), Damien Cottier (PLR), Céline Weber (Vert'Libéraux), Karin Perraudin (Groupe Mutuel, ex-PDC), Samuel Bendahan (PS) et la loutre de Qoqa.

La saison agricole est lancée, de la plaine à la montagne. Croisons les doigts pour que la météo reste de notre côté et nous offre une année plus favorable que 2024 avec ses piteuses conditions météorologiques. En effet, le froid, la pluie, le manque de soleil et de lumière avaient largement affecté cultures et récoltes, influençant directement la quantité des denrées alimentaires indigènes disponibles, c’est-à-dire la composition de nos assiettes et la provenance de leur contenu.

«Pour le moment, ça se présente pas mal»

Voilà ce que je pourrais dire en adoptant la prudence habituelle de celui ou celle qui ne veut pas provoquer le sort. Semis et plantations sont en place, les premières coupes d’herbe sont en grange ou en balles pour l’hiver prochain. La fleur des colzas est passée et laisse maintenant la place aux précieuses siliques promettant les petits grains noirs typiques de cette oléagineuse.

Passée aussi l’odeur doucereuse de ces étendues jaunes, qui rappelle le miel de la même origine. Les épis d’orge sont désormais bien visibles. Ils se balancent au gré du vent, imitant les vagues sur le lac. Ils sont prêts à recevoir le moindre rayon de soleil, comme les autres céréales, pour virer aux tons dorés annonçant la récolte, dans quelques semaines déjà.

Les bêtes sont de sortie. C’est une caractéristique distinctive de notre élevage suisse. Un signe de haute qualité et de promotion du bien-être animal. Vaches, cochons, couvées peuvent s’ébattre à l’extérieur, c’est-à-dire respectivement plus de 80% des vaches, la moitié des porcs et une majorité de poules.

Les vaches, notamment, se concentrent sur ce qu’elles font de mieux, elles broutent l’herbe verte, la ruminent plusieurs fois grâce à leurs quatre estomacs, la digèrent et la mettent en valeur à double titre, en viande et en lait. Elles fournissent également, en toute circularité, un engrais naturel et renouvelable, rendu directement au pré ou, au moment adéquat, dans les champs, sous forme de lisier ou de fumier.

Elles contribuent ainsi à la fumure des cultures et à la santé des sols. Les pâtures d’été en montagne se remplissent progressivement au rythme des montées à l’alpage traditionnelles ou avec des moyens de transport désormais plus communs, tracteurs et chars à bétail ou parfois par camion.

Savoir-vivre ensemble

Pleine saison agricole est synonyme d’activités multiples, de machines et de véhicules plus ou moins gros, plus ou moins lents, plus ou moins bruyants. La Suisse est connue et appréciée pour ses paysages et ses campagnes. Cela comporte un corollaire. Qui dit campagne dit agriculture, animaux et activités agricoles, donc bruits, odeurs, présence sur les chemins et les routes.

Pour continuer de bénéficier de la diversité et de la beauté du paysage qui nous entoure et qui agrémente balades, moments contemplatifs ou sorties sportives, pour garnir nos assiettes de denrées alimentaires de haute qualité et de proximité – et surtout pour cela d’ailleurs – nous devons faire preuve de savoir-vivre ensemble.

Nous, les paysannes et les paysans, comptons sur la compréhension et la tolérance de la population, dans un esprit de respect mutuel. Pensez-y si vous devez rouler au ralenti derrière un troupeau qui revient du pré ou derrière un tracteur qui transporte du grain. Pensez-y lorsque commencera le bal des moissonneuses-batteuses, peut-être la nuit ou le dimanche.

Prenez une respiration et faites preuve de patience. Nous produisons votre nourriture. Notre travail dépend des saisons et de la météo, nos horaires sont particuliers. Ce n’est pas à dessein que nous faisons du bruit le samedi soir ou le dimanche matin. C’est parce que c’est le bon moment pour ça, avant qu’il pleuve ou parce que les soins aux animaux ou aux cultures le requièrent.

De même, alors que beaucoup se réjouissent de voir nos animaux profiter du plein air, il n’est pas exclu qu’un ou une cycliste ait la malchance de rouler dans une «beuse» (il se dit pourtant que cela porte-bonheur!). Il est également de plus en plus fréquent que les randonneuses et randonneurs soient confrontés à des troupeaux. Dans ce cas, la prudence est de mise.

Il convient de se conformer aux règles de comportement. Vache mère Suisse et l’association Suisse Rando, par exemple, ont réalisé une vidéo explicative sur le comportement à adopter en présence des animaux. Il faut contourner les animaux en faisant un grand cercle (en passant par le haut), ne pas traverser le troupeau et rester sur ses gardes. Se déplacer lentement, tenir son chien en laisse courte et sous contrôle et ne jamais toucher ni les vaches ni les veaux.

Les chiens de protection des troupeaux sont aussi de plus en plus répandus. Quelques règles de bases permettent que les rencontres éventuelles restent amicales. Il existe même une carte interactive disponible en ligne qui indique la localisation des pâturages où les troupeaux sont protégés par des chiens.

Il est d’ailleurs déconseillé d’emmener le sien avec soi. Rester calme et à distance, voire s’éloigner, est la meilleure méthode pour éviter les problèmes. Les chiens de protection font leur travail, un travail important pour l’intégrité et la sécurité des animaux de rente.

En conclusion, information et appréhension adéquate sont des clés et apportent la bonne recette pour gérer au mieux la situation ou y déceler au moins un aspect positif, et ce, même si elle peut paraître déplaisante au premier abord. C’est l’occasion de profiter malgré tout – ou justement pour cela – de votre balade, de votre trajet ou de votre dimanche, que je vous souhaite heureux!

Anne Challandes
Anne Challandes, présidente de l’Union suisse des paysannes et des femmes rurales (USPF).Image: USPF
Anne Challandes est...
... paysanne et avocate de formation. Présidente de l’Union suisse des paysannes et des femmes rurales, et vice-présidente de l’Union suisse des paysans, elle gère également une exploitation familiale en agriculture bio dans le jura neuchâtelois avec des vaches allaitantes et différentes cultures.
Des vaches shampouinées, peignées et brushinguées
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Des vaches shampouinées, peignées et brushinguées
source: sad and useless
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Avez-vous déjà vu… une vache qui nage?
Video: watson
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Elle a largué son copain pour économiser de l'énergie
J'assimile souvent les petits efforts d'économie du quotidien à un jeu vidéo comme FarmVille. Avec le fumier qui rapporte des points et permet d'économiser de l'argent. C'est à Bâle-Campagne, Schaffhouse et au Tessin que les Suisses gagnent le plus à ce jeu.

Bien entendu, je ne parlerai pas ici de moutons ou de poules. Mon pseudonyme n'est pas non plus «Madame Farmy».

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