Le choix polémique des CFF finit devant la justice
Stadler a déposé jeudi un recours auprès du Tribunal administratif fédéral (TAF) contre la décision des CFF de confier à son concurrent allemand Siemens Mobility un contrat de 2,1 milliards de francs pour 116 trains à deux niveaux. «Même après une analyse approfondie des documents disponibles, Stadler ne peut pas comprendre les points d'évaluation et la décision d'attribution qui en résulte», a estimé le constructeur de matériel roulant vendredi.
Le 7 novembre dernier, le groupe thurgovien avait exprimé sa déception peu après l'annonce de l'attribution à l'allemand Siemens Mobility de ce marché de 2,1 milliards de francs. Défendant le choix des Chemins de fer fédéraux (CFF), leur patron Vincent Ducrot assurait «prendre des précautions très importantes» dans ce type d'appel d'offres et se montrait confiant face à d'éventuels recours.
Il déclarait avoir «fait un travail énorme pour être sûr que les offres soient comparables. Après, chaque personne qui fait une offre dans un marché public a le droit de faire recours, cela arrive, ça fait partie du jeu». Trois concurrents ont participé à l'appel d'offres lancé en juin 2024.
«Garantir la transparence»
De son côté, Stadler Rail «est arrivé à la conclusion que la décision d'attribution devait être examinée par le Tribunal administratif fédéral en tant qu'instance indépendante, afin de garantir la transparence exigée par le public.» L'entreprise alémanique a rappelé que «la différence de prix par rapport à l'offre retenue n'est que de 0,6%.» Selon elle, son offre, «basée sur le train à deux niveaux KISS qui a fait ses preuves en exploitation commerciale quotidienne, a été sous-évaluée par rapport à un train qui n'existe que sur papier».
De plus, «il n'est pas compréhensible pour Stadler que l'offre gagnante ait pu se démarquer dans des critères d'évaluation tels que les coûts d'exploitation, la qualité, la maintenance, la durabilité ou les contrats de service.» L'entreprise ajoute que les documents mis à sa disposition «n'ont pas permis de clarifier de nombreuses questions en suspens dans l'évaluation» et que d'autres interrogations «n'ont pas pu être clarifiées de manière satisfaisante lors d'un entretien de débriefing avec les CFF».
Stadler se dit «fortement attachée à son marché domestique et aux CFF», et précise qu'elle «ne veut pas de protection nationale et ne l'a d'ailleurs jamais demandé.» Selon elle, la commande aurait été entièrement réalisée dans les usines de Stadler en Suisse. Dans le pays, le fabricant emploie 6000 personnes et fait aussi travailler plus de 200 fournisseurs locaux, principalement des PME.
Flopée de critiques
Sur le plan politique, la décision des CFF a entraîné une flopée de critiques, provenant de l'ancien conseiller national UDC Roger Köppel mais aussi de Pierre-Yves Maillard, conseiller aux États socialiste, indiquait alors le journal 24 Heures. Le syndicat Unia aurait également préféré que Stadler Rail soit retenu.
Dans un communiqué publié le 9 novembre, les CFF se défendaient en expliquant devoir «impérativement attribuer le marché à l'entreprise ayant présenté l'offre la meilleure ou la plus avantageuse. Le mot 'swissness' n'est ni prévu ni autorisé».
Ces 25 dernières années, ils indiquaient avoir investi 14 milliards de francs dans du nouveau matériel roulant, dont 72% provenaient de Stadler Rail, 21% de Bombardier/Alstom et 7% de Siemens. Ils ajoutaient que «ce projet contribue lui aussi à la création de valeur en Suisse» et que Siemens emploie environ 6000 personnes dans le pays. (jzs/ats)
