Berne veut un sommet Trump-Poutine-Zelensky à Genève pour deux raisons
«Je plaide pour Genève»: cette phrase du président français, Emmanuel Macron, a suscité une grande joie à Berne, et déclenché une certaine effervescence. La cheffe du gouvernement italien, Giorgia Meloni, soutient elle aussi l'idée d'un sommet sur l'Ukraine au bout du Léman. On ignore à ce stade qui y participerait: un tête-à-tête entre Vladimir Poutine et Volodymyr Zelensky? Faudrait-il aussi inviter Donald Trump?
Celui-ci a déclaré à plusieurs reprises qu'il préparait une rencontre entre les dirigeants des deux pays en guerre. Une rencontre à laquelle il compte participer. Mais, selon lui, Poutine et Zelensky devraient d'abord discuter seuls pour voir ce qu'il en ressort. Il se joindrait à eux en cas de besoin pour jouer les médiateurs.
Profiter d'évoquer les 39% avec Trump
Le Conseil fédéral et la diplomatie suisse espèrent la variante maximale: une discussion tripartite à Genève. Car ils y voient un double intérêt pour la Suisse.
- C'est l'occasion de se présenter une fois encore comme une plateforme de bons offices. L'évènement permettrait de faire le lien avec la conférence du Bürgenstock de 2024, qui s'était déroulée sans Moscou.
- Trump participe, Berne voudra aborder, dans des échanges à part, un deuxième sujet: les droits de douane.
Au sein du département fédéral de l'Economie (DFE) de Guy Parmelin, on tente de progresser rapidement sur le plan technique pour supprimer les fameux 39%. Si cela aboutit à une proposition, il faudra la soumettre à celui qui décide tout tout seul: le président des Etats-Unis.
Donald Trump demeure cependant extrêmement difficile à atteindre. Mais s'il venait à Genève, son homologue Karin Keller-Sutter pourrait provoquer une entrevue, conformément au protocole. L'entourage de la Saint-Galloise est formel:
Le DEFR, le DFAE et le DFF de Karin Keller-Sutter travaillent en étroite collaboration afin d'éliminer tous les obstacles à la tenue d'un sommet à Genève.
Mettre toutes les chances du côté de la Suisse
Les sanctions contre des personnalités russes et le mandat d'arrêt international contre Poutine constituent des obstacles potentiels. «Solutionnables», selon la Berne fédérale. En juillet déjà, des politiciens sanctionnés ont obtenu une dérogation pour participer à un congrès de l'Union interparlementaire à Genève, une démarche qui incombe à la Suisse en tant que pays hôte.
Il en va de même pour le mandat d'arrêt contre Poutine: en principe, il devrait être appréhendé, mais il bénéficie en réalité de l'immunité pendant la durée d'un sommet. Le DFAE a garanti à Moscou et à Washington que Poutine pourrait entrer et sortir librement du pays.
Moscou perçoit la Suisse comme une «partie belligérante» et cela constitue un inconvénient. Car Berne a largement repris les sanctions décrétées par Bruxelles depuis l'invasion de l'Ukraine.
Mais, selon nos informations, le Conseil fédéral est à pied d'œuvre pour apaiser le Kremlin. L'administration prépare la reprise du 18e paquet de sanctions européennes. 14 personnes et 41 entreprises et organisations ont été rajoutées à la liste de sanctions, à l'initiative du département fédéral de l'Economie.
Pas encore de décision du Conseil fédéral
Mais ces nouvelles sanctions comprennent d'autres mesures dans les domaines du commerce des marchandises, des finances et de l'énergie. Leur mise en œuvre nécessite une décision gouvernementale qui se fait attendre. Rien ne laisse penser que le Conseil fédéral rejettera d'emblée les sanctions. Selon un proche du dossier:
Mais le Conseil fédéral pourrait jouer la montre. Il n'a pas abordé la question lors de sa séance de mercredi. La vice-chancelière Nicole Lamon l'a confirmé. Selon certaines de nos sources, il vaudrait mieux attendre avant une décision. De quoi envoyer un signal positif à Vladimir Poutine.
(Traduit et adapté par Valentine Zenker)