Suisse
Jura

Le nouvel horaire des CFF sacrifie Porrentruy

Porrentruy a des problèmes à cause des CFF.
La gare de Porrentruy. Le maire de la ville, Philippe Eggertswyler.Image: watson

Le nouvel horaire des CFF sacrifie une ville romande

Le maire de Porrentruy, dans le canton du Jura, regrette amèrement la suppression du direct entre sa ville et Bienne. «Pour nous, ces liaisons directes sont pourtant vitales», dit-il.
10.12.2025, 05:3510.12.2025, 06:28

Dans le canton du Jura, elle est la grande sacrifiée du nouvel horaire CFF qui entrera en vigueur dimanche 14 décembre. Il n’y aura plus de liaison directe entre Porrentruy et Bienne. Les pendulaires et les touristes du week-end se rendant en Ajoie et dans les Franches-Montagnes, parmi eux des Alémaniques venant du Plateau avec vélos, sacs à dos et poussettes pour enfants, devront changer à Delémont. Le dimanche au retour des randonnées, le train de 16h12 ou 17h12 à Delémont en provenance de Porrentruy pour Bienne, est souvent plein à craquer.

Joint par watson, Philippe Eggertswyler, le maire de Porrentruy, 6700 habitants, ne cache pas sa déception:

«La perte du direct Porrentruy-Bienne est préjudiciable pour une ville excentrée comme la nôtre, qui a besoin de liaisons directes pour son développement»
Philippe Eggertswyler, maire de Porrentruy

Le premier magistrat bruntrutain n’apprend pas la nouvelle. La suppression du direct entre les chefs-lieux ajoulot et seelandais était annoncée. Dans quelques jours, elle sera effective. Il enfonce le clou en regrettant qu’il n’y ait pas un direct Porrentruy-Berne ou Porrentruy-Bâle, par exemple.

«Désormais, pour se rendre à Berne, il faudra changer deux fois, à Delémont et à Bienne. Or, il est vital pour nous d’être raccordé directement aux grands centres économiques»
Philippe Eggertswyler, maire de Porrentruy

Même des trains rapides entre Porrentruy et la capitale du Jura Delémont, ne serait-ce qu’aux heures du pointe, Porrentruy ne les a pas obtenus des CFF. Du moins pas cette fois. Avec une pointe de nostalgie, Philippe Eggertswyler évoque l’époque, depuis bien longtemps révolue, du Paris-Belfort-Berne qui faisait halte Porrentruy.

Le conseiller aux Etats Charles Juillard mécontent

L'Ajoulot Charles Juillard, conseiller aux Etats jurassien et vice-président du Centre, lui non plus, ne se félicite pas de la suppression du direct Porrentruy-Bienne, qu'il emprunte lorsqu'il se rend au Parlement fédéral à Berne, confie-t-il à watson.

«Est-on bien certain que les voyageurs jurassiens y gagnent dans leur ensemble? Voilà Porrentruy un peu plus coupé des grands centres urbains et ce n'est pas une bonne nouvelle»
Charles Juillard, conseiller aux Etats (Le Centre/JU)

Une ligne pourtant fréquentée

Adieu le direct Porrentruy-Bienne, donc. La ligne est pourtant fréquentée, elle est même en croissance. Selon David Asseo, délégué aux transports du canton du Jura, «deux tiers des voyageurs venant de Porrentruy qui ne s’arrêtent pas à Delémont continuent en direction de Bienne, le dernier tiers prenant la direction de Bâle». Quotidiennement, 7000 à 8000 usagers empruntent la ligne Porrentruy-Delémont dans les deux sens.

David Asseo reconnaît que le changement de train à Delémont sur la ligne Porrentruy-Bienne est en soi une contrainte, même s'il s'opérera sur le même quai avec un battement d’environ cinq minutes, précise-t-il. Ses explications:

«Il a fallu choisir. Pour des raisons de compétitivité du canton du Jura dans le maillage ferroviaire national, la liaison directe à la demi-heure entre Bienne et Bâle passant par Delémont a été privilégiée. Ce faisant, il n’était physiquement plus possible de conserver un sillon pour un direct Porrentruy-Bienne. Il n'y aurait plus eu la place pour le faire circuler. D’où le changement à Delémont.»
David Asseo, délégué aux transports du canton du Jura

Porrentruy pâtit de ne pas être une plus grande ville qui pourrait justifier un arbitrage en sa faveur.

Heureux de retrouver un Bâle-Lausanne

Dans l’affaire, le canton du Jura est heureux de récupérer une liaison directe Bâle-Lausanne sans changement à Bienne. Les étudiants jurassiens ne s'en plaindront pas. David Asseo souligne aussi le fait que l’Ajoie n’est pas en reste puisque Bonfol bénéficiera d’une liaison avec Delémont sans changement, Porrentruy gardant ses deux trajets par heure jusqu'au chef-lieu jurassien et vice-versa (le temps de parcours des omnibus entre Porrentruy et Delémont est de 29 minutes).

«Tout n’est pas perdu»

Le nouvel horaire verra aussi l’introduction de 16 liaisons quotidiennes entre Delémont et Delle, à la frontière, côté français, avec correspondance pour Belfort TGV. Evoquer Belfort TGV, c’est un peu comme pleurer sur le lait renversé. «Mais tout n’est pas perdu, on ne sait jamais», réconforte David Asseo.

Inaugurée en 2019, la réouverture du tronçon français Delle-Belfort via Belfort-TGV, dont la réaffectation fut largement payée par la Confédération, n’a pas donné tous les fruits escomptés. En 2023, le président de la région Bourgogne-Franche-Comté, le Dijonnais Michel Neugnot, éloigné des préoccupations franc-comtoises, décidait de façon abrupte que les CFF n’opéreraient plus la ligne directe et rapide reliant à l’époque Bienne à Belfort-TGV. Un coup de massue pour les Jurassiens. Se rendre à Belfort-TGV en train pour aller ensuite à Paris devenait tout à coup moins attractif.

On ne sait combien de Jurassiens ou Biennois prennent aujourd’hui le TGV à Belfort pour Paris, mais David Asseo rapporte que depuis 2019, les années Covid 2020 et 2021 ayant porté préjudice au développement de la ligne, «le nombre de passagers franchissant la frontière en train entre Boncourt, côté suisse, et Delle, côté français, est passé de 200 à 400 par jour, une évolution positive».

Nouvelle déception

La région Bourgogne-Franche-Comté, qui gère le trafic ferroviaire régional, aura encore une fois déçu les attentes des Jurassiens:

«Nous aurions voulu une liaison tôt le matin, au départ de Delle, pour prendre le TGV de 6h00 à Belfort pour Paris, mais nous n'avons pas obtenu satisfaction»
David Asseo, délégué aux transports du canton du Jura

A noter que l’une des raisons avancées en 2023 par le président de la région Bourgogne-Franche-Comté, Michel Neugnot, pour mettre un terme au direct Bienne-Belfort-TGV, était que les CFF ne respectaient pas le «contrat» en prévoyant de supprimer en 2026 la liaison directe jusqu’à Bienne. Ce qui arrive aujourd'hui. Chez les Jurassiens, on fait observer que l'argument de Michel Neugnot à l'époque n’était qu’un prétexte. Le président de la région Bourgogne-Franche-Comté n'aurait témoigné aucun intérêt pour cette ligne. Au grand dam de Porrentruy, entre autres.

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Video: watson
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