Mercredi matin, dans une salle du Tribunal correctionnel de Lausanne, la question planait comme une ombre: où sont les 1,4 million de francs subtilisés par un comptable? Le mystère a obsédé les magistrats, les plaignants et même le président de séance, perplexe devant les explications du prévenu.
Selon nos confrères de 24 heures, ce quadragénaire, ancien employé d’une société fiduciaire vaudoise, est jugé pour abus de confiance qualifié. Maître dans l’art de manipuler les chiffres, il a siphonné 1,4 million de francs grâce à l’émission de factures fictives.
Grâce à un logiciel comptable, il introduisait de fausses factures dans les comptes de plusieurs entreprises clientes de la fiduciaire. Ces paiements fictifs, présentés comme légitimes, atterrissaient sur le compte bancaire de son épouse.
Parmi les victimes, le Domaine de la Ville de Morges a été dépouillé de 260 000 francs, un pub lausannois a perdu plus de 400 000 francs, entraînant au passage sa faillite, tandis qu’une société de restauration vaudoise, elle, s’est vu délester de 750 000 francs.
C’est Yves Ferrari, ancien député et nouveau directeur de la Fondation Maisons pour étudiants Lausanne (FMEL), qui a mis en lumière les erreurs comptables en 2020, déclenchant l’ouverture d’une enquête.
Lors du procès, l’homme a expliqué que l’argent détourné avait été dépensé dans la drogue, assurant avoir consommé jusqu’à 20 grammes de cocaïne par semaine. «Invraisemblable», a calculé le président du tribunal. Même au prix de 100 francs le gramme pendant plus de dix ans, le compte n’y est pas.
Le prévenu, qui reconnaît avoir pris conscience des montants astronomiques «seulement lors de l’enquête», est resté évasif. Sa situation financière actuelle est tout aussi chaotique: il traîne 400 000 francs de poursuites et admet ne pas avoir payé ses assurances ou ses impôts.
Ce qui lui a valu une remarque bien sentie du président du Tribunal:
Faute de réponses satisfaisantes, la justice a opté pour un compromis. Le prévenu a bénéficié d’un arrangement avec le Ministère public. Résultat: une peine allégée de trois ans, dont un an ferme et aucun appel possible.
Pour les parties civiles, l’issue laisse un goût amer, sans parler de certaines victimes, pour lesquelles les fraudes ont été fatales. Et pour le tribunal, une question reste en suspens: outre un train de vie cocaïné, qu’est-il advenu de ce magot? (max)