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Les prisons vaudoises sont pleines à craquer: voici pourquoi

Les prisons suisses sont surpeuplées.
Les prisons suisses sont surpeuplées.Image: Shutterstock

Pourquoi les prisons vaudoises sont bien trop pleines

Le taux d'occupation dans les prisons suisses atteint des niveaux records. Dans le canton de Vaud, qui fait l'objet de vives critiques à ce sujet, un établissement est occupé à 166 % de sa capacité. On vous explique les raisons de cette surpopulation.
11.02.2025, 16:5811.02.2025, 16:58
Julian Spörri / ch media
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Sept mètres carrés, pas de fenêtre ni de raccordement à l'eau, mais un lit en béton: voilà à quoi ressemble une cellule de l'Hôtel de Police de Lausanne. L'endroit n'est en fait prévu que pour des séjours de 48 heures maximum, jusqu'à ce que les détenus soient transférés dans une prison régulière.

Mais comme ces dernières sont surchargées dans tout le canton, les détenus doivent parfois rester jusqu'à 49 jours dans leur cellule exiguë. C'est ce qu'a rendu public en janvier la commission des visiteurs du Parlement cantonal vaudois.

Leur rapport a jeté une nouvelle lumière sur un problème bien connu: les prisons romandes sont pleines à craquer. Les organisations de défense des droits de l'homme ou, plus récemment la Commission contre la torture du Conseil de l'Europe, ne cessent de critiquer la situation. Il y a deux ans, même la Russie a cloué la Suisse au pilori devant le Conseil des droits de l'homme de l'ONU pour cette raison.

Le boom de la détention provisoire

Actuellement, les prisons vaudoises sont occupées à 114% - un taux plus élevé que dans n'importe quel autre canton. Le cas extrême est celui de la prison du Bois-Mermet, qui compte 100 places mais héberge 166 personnes. «Les conditions de détention ne sont plus acceptables dans certains établissements», a admis lundi devant les médias le directeur vaudois de la sécurité Vassilis Venizelos (Verts).

La prison de Bois-Mermet, en arriere plan, ou a eu lieu une evasion de plusieurs prisonniers ce mardi 14 mai 2013 a Lausanne. (KEYSTONE/Christian Brun)
La prison de Bois-Mermet a été le théâtre d'une évasion en 2013.Image: KEYSTONE

Quelles sont les raisons de cette surpopulation carcérale chronique avec laquelle le canton de Vaud se bat depuis 25 ans? Deux rapports scientifiques commandés par le canton se sont penchés sur la question. Ils ont été rédigés par Benjamin Brägger, expert renommé en matière de justice, et Christophe Champod, criminologue à l'Université de Lausanne.

Les travaux montrent que dans le canton de Vaud, la détention provisoire est particulièrement privilégiée. En outre, elle dure en moyenne deux fois et demi plus longtemps que la moyenne suisse.

Même lorsqu'une condamnation est prononcée, la justice vaudoise se distingue: elle prononce souvent des peines de prison ferme, c'est-à-dire non assorties d'un sursis. Rien que pour les délits liés aux stupéfiants, un quart de toutes les peines de prison ferme prononcées en Suisse reviennent au canton de Vaud. Dans des cantons comme Zurich, les tribunaux prononcent plus souvent des peines avec sursis, selon Benjamin Brägger.

Une région attractive pour les criminels

Pour les autorités vaudoises, la lutte contre le trafic de drogue est une priorité. Brägger y voit l'un des nombreux facteurs qui pourraient expliquer la surpopulation carcérale vaudoise. A cela s'ajoutent le boom économique et la proximité de la France, qui rendent la région attractive pour les criminels. De même, il mentionne les particularités culturelles de la Suisse romande. «L'autorité de l'Etat a une valeur plus élevée qu'en Suisse alémanique», estime l'expert en exécution des peines, qui réside à Fribourg. Cela se traduit par des poursuites pénales plus sévères.

Les cantons alémaniques ne sont pas pour autant épargnés par la problématique de la surpopulation carcérale. En avril dernier, l'Office fédéral de la statistique a annoncé qu'en janvier 2024, 6881 femmes et hommes étaient derrière les barreaux dans tout le pays - un chiffre qui n'avait plus été atteint depuis dix ans. En moyenne, les prisons étaient occupées à 95%. Depuis, le taux est redescendu à 91%, mais plusieurs cantons se trouvent dans la zone critique. Parmi eux, Soleure (101%), Berne et Schaffhouse (tous deux 100%).

Au cours des trente dernières années, les prisons suisses ont toujours connu des phases avec un taux d'occupation élevé, selon Brägger. Actuellement, le système est sous pression. Cela est probablement lié aussi aux flux migratoires et à la croissance démographique. «L'infrastructure de détention n'a été adaptée que lentement. En même temps, il y a une attente de la part des politiques et de la population pour prononcer des peines plus sévères.»

«Eviter des situations dramatiques»

Selon certaines études, des prisons surpeuplées augmentent également le risque de suicide des détenus. La NZZ am Sonntag a récemment rapporté que le taux de suicide dans les établissements pénitentiaires suisses était élevé en comparaison européenne.

Dans le canton de Vaud, on ne constate pas de «situation alarmante» à ce sujet, a déclaré le directeur cantonal de la sécurité Vassilis Venizelos. Mais il est clair que de meilleures conditions de détention contribuent indirectement à «éviter des situations dramatiques».

Le Conseil d'Etat a présenté un plan d'action. Le nombre de places de détention doit être augmenté. A court terme grâce à une coopération avec le canton de Fribourg et à la construction d'installations modulaires, à long terme grâce à la mise en service d'une nouvelle prison pour 410 détenus prévue pour 2032.

Des bracelets électroniques pour les longues peines?

Mais Venizelos est conscient qu'il n'est pas possible de construire indéfiniment de nouvelles prisons. C'est pourquoi le canton de Vaud tente à l'avenir de promouvoir davantage les alternatives à l'incarcération. Ainsi, les peines de prison de moins de six mois peuvent, dans certaines circonstances, être converties en travail d'intérêt général.

Pour les peines d'emprisonnement entre 20 jours et 12 mois, l'utilisation de bracelets électroniques est en outre possible, à condition que les détenus acceptent la mesure. Venizelos veut s'engager au niveau national pour légaliser à l'avenir la surveillance électronique même pour les peines de plus d'un an, si les personnes concernées ne représentent pas un risque pour la sécurité.

Selon l'expert en justice Brägger, le canton de Vaud est déjà en tête en ce qui concerne l'utilisation des bracelets électroniques et du travail d'intérêt général. Il attribue cela à la «grande pression d'agir». Sur ce point au moins, il vaut donc la peine pour les autres cantons de regarder par-dessus le Röstigraben lorsque leurs prisons débordent.

(Traduit et adapté par Chiara Lecca)

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