Suisse
Santé

Benu et Just Eat vont lancer un projet inédit en Romandie

Il s'allie à Just Eat pour «réduire drastiquement les coûts de la santé»

Les pharmacies Benu ont signé un partenariat avec Just Eat, qui assure désormais la livraison à domicile de certains articles. Cette étape doit permettre au groupe de s'imposer dans le domaine de la santé. Le directeur général de Benu, Martial Barbier y voit «le seul moyen de réduire les coûts».
31.10.2025, 18:5731.10.2025, 18:57
Florence Vuichard / ch media

Directeur de la filiale suisse du groupe Phoenix, Martial Barbier est également responsable de la deuxième plus grande chaîne de pharmacies du pays derrière Amavita. Benu totalise en effet 103 sites sur le territoire. Et ce chiffre devrait encore grimper, comme le révèle ce cadre de 58 ans.

Martial Barbier est directeur général du groupe Phoenix en Suisse, qui comprend notamment la chaîne de pharmacies Benu.
Martial Barbier est directeur général du groupe Phoenix en Suisse, qui comprend notamment la chaîne de pharmacies Benu.image: zvg

Il a passé toute sa carrière dans la santé, changeant régulièrement de camp: du canton à la caisse maladie, de la société de conseil spécialisée à l'entreprise pharmaceutique. Et ses points de vente expérimentent de nouvelles coopérations, avec le réseau de télé-médecine Medgate par exemple. Ou, depuis peu, avec le service de livraison Just Eat.

Qu'attendez-vous de ce partenariat avec Just Eat?
Martial Barbier:

«Nous voulons placer la pharmacie au centre du système de santé»

C'est pourquoi nous souhaitons élargir les possibilités de contact. Nos clients peuvent désormais commander des produits qui leur seront livrés à domicile en moins d'une heure.

Un délai de livraison inférieur à une heure, une promesse ambitieuse.
C'est notre objectif.

Et qui paie la livraison?
Elle coûte pour l'heure entre deux et six francs, selon la distance entre le domicile du client et la pharmacie. Les quelque 1000 références disponibles en ligne chez nous coûtent en moyenne 10% de plus à cause des frais de livraison. Nous les intégrons dans le prix de vente afin de couvrir les coûts de livraison.

Est-ce que cela suffit?

«Nous démarrons actuellement dans quinze succursales, dans six villes: Lausanne, Fribourg, Zurich, Winterthour, Coire et Lucerne»

Si cela fonctionne bien, nous souhaitons nous développer le plus rapidement possible.

Vous proposez entre autres des lentilles de contact, des tests de grossesse ou de la crème solaire. Mais pas de médicaments.
A travers Just Eat, nous ne pouvons livrer que des produits en vente libre, c'est-à-dire tout sauf un médicament.

«C'est un peu absurde: nous pouvons vendre des articles dits "en vente libre" dans nos enseignes, c'est-à-dire des médicaments sans ordonnance, mais nous ne pouvons pas les expédier»

Pourquoi?
Parce que la loi dispose qu'un professionnel doit encadrer la vente. Avec cette réglementation, nous sommes une exception, un cas particulier en Europe.

Par contre, on peut envoyer les médicaments soumis à ordonnance médicale.
Oui, en principe. Mais là, c'est la sécurité des médicaments qui entre en jeu. La Poste est autorisée à les expédier. On ignore en revanche si Just Eat peut le faire. Il y a là un blocage que nous travaillons à résoudre.

Ne craignez-vous pas de créer de la frustration: on peut commander du liquide pour lentilles, mais pas d'analgésiques?
Nous aimerions démarrer ainsi aujourd'hui et voir si la livraison de médicaments sur ordonnance est possible à l'avenir. Nous ferons tout notre possible pour satisfaire nos clients.

Ce nouveau service ne fait-il pas concurrence à vos propres pharmacies?
Non. Les produits proviennent de nos pharmacies. L'objectif est que celles-ci deviennent le premier point de contact pour toutes les questions de santé.

«On observe partout des pénuries. Les cabinets sont bondés, surtout à l'approche de la saison de la grippe»

Conseillez-vous donc simplement d'aller à la pharmacie lorsqu'on est malade?
Oui. Il y a beaucoup trop de consultations médicales qui ne sont pas absolument nécessaires. Ou de visites aux urgences. Sur ce point, on pourrait vraiment économiser. C'est pourquoi nous avons récemment mis en place une large coopération avec Medgate.

En quoi consiste-t-elle?
Si nos pharmaciens ne peuvent pas aider ou pensent qu'il faut consulter un médecin, celui-ci peut être contacté virtuellement tout de suite. Et si le médecin ne peut pas régler le cas, ou estime qu'il est préférable de se rendre dans un cabinet ou aux urgences, alors il oriente le patient vers un autre professionnel. La pharmacie permet un triage étant placée en première ligne. Et bien sûr, elle peut prendre en charge de nombreuses tâches qui ne nécessitent absolument pas de consultation médicale.

«Cela nous permettrait de réduire drastiquement les coûts de la santé»

De combien exactement?
C'est difficile à chiffrer. Plusieurs études parlent d'environ 30% de consultations superflues, pour des problèmes solutionnables autrement.

N'est-ce pas plutôt le contraire qui se produit? Tout ce que le pharmacien faisait seul auparavant, il le confie au médecin de Medgate.
Non. Nous procédons par étapes. Tout ce que le pharmacien peut et a le droit de faire seul, il le fait. S'il a soudainement un doute et a besoin d'un docteur, il l'appelle.

Benu a enregistré une forte croissance ces dernières années et compte aujourd'hui 103 pharmacies. Combien en aura-t-elle à terme?
Nous visons 150 à 200 pharmacies au plus vite pour assurer une présence partout en Suisse.

Une pharmacie Benu.
Une pharmacie Benu.image: zvg

La Suisse compte environ 1800 pharmacies. Si elles cherchent à s'imposer comme premier point de contact pour toutes les questions de santé, elles voudront aussi certainement gagner davantage.
Historiquement, les pharmacies ont toujours fourni des services gratuits. Cela perdura probablement. Une rémunération correcte de ces prestations serait en revanche évidemment souhaitable. Nous soutenons donc les réformes tarifaires envisagées pour les pharmacies, qui tiennent mieux compte de cela. C'est une bonne chose. Pas seulement pour nous.

«En effet, tout ce qui est payé dans les pharmacies ne l'est pas ailleurs. Et les coûts ont tendance à baisser. Comme pour la vaccination, par exemple»

Contrairement à la vaccination chez le médecin, celle en pharmacie n'est pas entièrement prise en charge par l'assurance maladie obligatoire.
Oui, il en va encore malheureusement ainsi aujourd'hui. Mais le parlement y a remédié: à partir de 2027, elle le sera, à condition de se conformer aux spécifications du plan national de vaccination. Ce qui me dérange, c'est de toujours attendre que les fonds nécessaires à une réforme soient alloués. Nous devrions être proactifs en amont et exploiter notre marge de manœuvre dans le secteur.

Comment, concrètement?
Benu a, par exemple, adopté une politique pour les génériques en 2017, soit plusieurs années avant que la Confédération n'adopte de nouveaux modèles tarifaires pour promouvoir ces remèdes. Depuis lors, nous privilégions, dans la mesure du possible, un produit générique plutôt qu'un original.

«Résultat: la part de génériques dans nos ventes de médicaments atteint aujourd'hui 80%. C'est énorme et cela contribue à réduire les coûts»

Mais nous pourrions aller plus loin. Je travaille dans le domaine depuis 35 ans et je dois dire que le protectionnisme reste très présent dans notre branche.

Qu'entendez-vous par là? Réclamez-vous des importations parallèles?
Oui, cela nous permettrait de baisser les coûts des produits et des médicaments. Mais on devrait aussi s'aligner sur la réglementation des pays voisins dans d'autres domaines. Prenons la mélatonine, qui peut aider à lutter contre les troubles du sommeil. On la trouve en vente libre partout en Europe, sauf en Suisse, où elle est soumise à prescription. Une autre mesure très protectionniste. En effet, toute personne souhaitant s'en procurer doit d'abord consulter un médecin. Cela engendre des frais. Ou alors, cette personne doit se rendre à l'étranger. En outre, trois facteurs contribuent à renchérir notre système de santé.

Lesquels?
Il y a l'absence de dossier électronique du patient, qui entraîne la répétition de trop nombreux examens et analyses sanguines, l'absence de planification sanitaire intercantonale, qui explique pourquoi il y a encore trop d'hôpitaux, et il y a un catalogue de prestations qui ne cesse de s'allonger.

«Tant qu'on n'aura pas résolu ces problèmes, on tournera en rond»

Traduit de l'allemand par Valentine Zenker

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