Un défi immense attend la Suisse, mais il peut être résolu avec créativité
Selon plusieurs prévisions démographiques, la population suisse commencerait à diminuer dès 2029, si on cesse toute immigration. Dans 4 ans donc.
En clair, si nous voulons pouvoir continuer à profiter de nos assurances sociales, comme l’AVS par exemple, la Suisse, dont la population est vieillissante, serait mathématiquement dépendante de l’immigration. Le constat semble limpide.
Une dichotomie difficile à cerner
Pourtant, il suffit d’écouter les gens sur les marchés le samedi matin pour comprendre que la démographie galopante de ces dernières années pose de nombreux défis, à commencer par le plus important: l’acceptation sociale. Nul doute que, si le peuple a refusé l’extension des autoroutes, ou encore qu’il s’oppose régulièrement au développement de nouveaux quartiers, ce n’est pas tant pour des considérations purement écologiques, que pour des motifs clairement exprimés de vouloir préserver une certaine verdure.
Et cette exaspération doit être entendue. Mais que faire alors, dans cette situation qui semble inextricable?
Les grands défis du monde du travail
Une voie encore très peu exploitée, mais qui permettrait pourtant de faire d’une pierre deux coups, c’est de permettre aux Suisses qui le souhaitent, de travailler plus. Ça peut paraître saugrenu dit comme ça, mais des Suisses qui désirent travailler au-delà de 65 ans et qui en sont empêchés, il y en a.
Il ne s’agit pas ici de faire travailler plus longtemps des gens qui ont exercé une profession pénible, mais bien de permettre à celles et ceux qui ont encore la motivation de s’engager au-delà de l’âge de référence de la retraite, et pour qui le travail donne un sens à leur vie, de pouvoir le faire.
A l’heure actuelle, plus on est âgé, plus on coûte à son employeur en termes de charges salariales, alors qu’un jeune venu de l’étranger sera moins cher. Or, on pourrait imaginer réduire les charges salariales en introduisant un taux unique pour le 2e pilier, afin que ces charges soient les mêmes pour les jeunes et les personnes âgées. Ainsi, les travailleurs expérimentés resteraient attractifs pour les entreprises et ne seraient pas remplacés par une main-d'œuvre immigrée bon marché. Ceci permettrait également aux personnes au chômage après 50 ans de retrouver plus facilement du travail.
Les causes du manque de jeunes travailleurs
Et puis, au-delà de ces mesures en fin de carrière professionnelle, on peut également se demander pourquoi les Suisses entrent toujours plus tard sur le marché du travail. On assiste en effet à une diminution régulière du nombre de personnes actives sur le marché du travail dans la classe d’âge des 15-24 ans, et ça depuis 1970, malgré une augmentation du taux d'activité global des femmes.
Certes, le vieillissement de la population y est pour quelque chose (il y a moins de jeunes d’une manière générale). Mais pas que. L’allongement en partie artificiel du temps de formation, par exemple à cause de semestres perdus entre le service militaire et les études, ou encore entre la fin de l’école obligatoire et le début d’un apprentissage, y est aussi pour beaucoup.
Ainsi, une meilleure coordination permettrait de raccourcir ces temps d’attente. En outre, de plus en plus de jeunes souhaitent travailler à temps partiel dès le début de leur carrière professionnelle, alors qu’ils ont encore tout à apprendre, et pas de famille à charge. C’est compréhensible, dans la mesure où notre système fiscal, voire même l’octroi de certains subsides, les y incite.
Cependant, non seulement cela pose problème sur le plan économique, mais il faut également plus de personnes pour un même poste. Ainsi, au vu de ces statistiques, il devient évident qu’il ne faut pas seulement vouloir repousser l’âge de la retraite, mais qu’il faut aussi prendre des mesures pour une entrée plus précoce sur le marché du travail, et ne pas décourager les jeunes de travailler à plein temps.
Enfin, une meilleure conciliation entre vie professionnelle et vie familiale permettrait aussi, pour celles et ceux qui le souhaitent, d’augmenter leur taux d’activité.
Pour conclure
Mis bout à bout, toutes ces mesures permettraient, selon plusieurs études, d’occuper près de 200 000 places de travail, et ce, sans faire venir une seule personne de l’étranger. De là à dire qu’il faut cesser toute immigration, ce n’est clairement pas le propos défendu ici.
Ceci dit, en nous montrant créatifs, et en nous engageant pour une croissance économique responsable et durable, nous pouvons (nous devons même) prendre les préoccupations de la population au sérieux, tout en maintenant un niveau de vie permettant aux Suisses de rester également à l’avenir un peuple de gens majoritairement heureux, comme ils le sont aujourd’hui si on en croit un récent sondage de la SSR.