Les rumeurs de démissions du Conseil fédéral font partie du paysage médiatique de l'été, au même titre que les embouteillages du Gothard. C'est maintenant au tour de Viola Amherd. Le journal fribourgeois La Liberté évoque jeudi un possible départ de la présidente de la Confédération et ministre de la Défense. De son côté, le département d'Amherd, le DDPS, a clairement démenti.
Pour le moment, il n'y a pas de preuves tangibles. La seule déclaration concrète émane d'un membre du parti du centre, dont le nom n'est pas cité:
Les spéculations sur un départ de la Haut-Valaisanne de 62 ans, d'ici la fin de l'année, circulent depuis des mois. Au cours de ses six années de mandat, elle a accompli beaucoup de choses. Elle a fait venir l'Office fédéral de la cybersécurité au DDPS et a créé un Secrétariat d'Etat à la politique de sécurité.
Viola Amherd a profité de la revalorisation du DDPS suite à la guerre en Ukraine. Après son élection fin 2018, elle est devenue ministre de la Défense à contrecœur, mais elle a saisi cette opportunité avec détermination. Jusqu'à présent, le point culminant de son année présidentielle a été la conférence sur l'Ukraine au Bürgenstock, même si le contenu n'a pas été très concluant.
Parallèlement, Viola Amherd a ressenti très fortement le mécontentement des pays occidentaux face à la politique de neutralité de la Suisse. Le départ embarrassant de l'ancienne cheffe du groupe d'armement Ruag et le retrait de Jean-Daniel Ruch en tant que secrétaire d'Etat désigné pour la sécurité ont également été des points de discorde.
Selon les partis bourgeois, l'armée, dont les effectifs ont été réduits, doit recevoir nettement plus d'argent. Mais le Parlement se dispute violemment sur la manière de financer cette idée. La conseillère fédérale en charge du dossier semble étrangement passive dans ce débat. Un observateur l'a comparée à une marmotte auprès de La Liberté:
Cela se répercute sur la popularité des conseillers fédéraux. Viola Amherd a longtemps été au top, mais elle a dégringolé à la cinquième place dans un sondage Tamedia de mars. La photo qui la montre étrangement souriante devant le pont détruit par les récentes intempéries dans le Val Maggia n'aide pas non plus.
Il y a donc des raisons qui parlent pour une démission prochaine et d'autres qui vont contre cette idée.
La raison la plus importante porte un nom: Brigitte Hauser-Süess. Elle est la collaboratrice personnelle et la confidente la plus proche de Viola Amherd. En septembre, elle aura 70 ans et devra, selon le règlement du personnel de la Confédération, prendre définitivement sa retraite. Certains pensent qu'Amherd ne veut pas continuer sans sa «soeur jumelle» haute valaisanne.
D'autres problèmes se profilent en outre au DDPS. Les Etats-Unis veulent livrer leur système de défense antiaérienne Patriot en priorité à l'Ukraine, snobant la Suisse qui devrait passer avant selon les contrats conclus. Des retards sont également prévisibles pour l'avion de combat F-35, contre lesquels les critiques mettent en garde depuis longtemps. Viola Amherd pourrait être heureuse de laisser ces chantiers à un successeur.
Viola Amherd pourrait toutefois rester au moins une année de plus, par exemple en raison du championnat d'Europe de football féminin, qui se déroulera en Suisse du 2 au 27 juillet 2025. C'est une affaire de cœur pour la ministre des Sports. Et un départ du département de la Défense pourrait aussi être interprété comme une désertion en cette période de bouleversements.
Viola Amherd ne restera pas longtemps au Conseil fédéral. Elle ne fait pas partie de ces «animaux politiques» qui s'accrochent au pouvoir. Des noms de successeurs potentiels issus du parti du centre circulent déjà. Parmi eux, le conseiller aux Etats saint-gallois Benedikt Würth, le conseiller national grison Martin Candinas ou la conseillère aux Etats fribourgeoise Isabelle Chassot.
Le président de son parti, Gerhard Pfister, est également un sujet de discussion. Pour ce Zougois de bientôt 62 ans, un départ d'Amherd à la fin de l'année 2024 serait peut-être la dernière chance de réaliser ses ambitions de conseiller fédéral. Mais pour l'instant, ce ne sont que des spéculations. Le Conseil fédéral sera de retour de vacances à la mi-août. On verra ensuite si ces rumeurs sont plus qu'un simple remplissage du creux estival.
(Traduit et adapté par Chiara Lecca)