Le titre officiel de l'initiative populaire est «Pour l’avenir de notre nature et de notre paysage». En effet, la campagne de votation autour de l'initiative sur la biodiversité vise en priorité la question de savoir comment stopper la disparition des espèces. D'après les premiers sondages, cette préoccupation rencontre un écho favorable auprès de la population.
On a souvent tendance à l'oublier, mais les initiants ne s'intéressent pas seulement aux truites, aux abeilles sauvages ou aux prairies fleuries. La protection du patrimoine fait également partie du lot. Il ne s'agit pas uniquement de préserver «les éléments caractéristiques des biotopes, paysages et localités dignes de protection», mais aussi de «ménager la nature, le paysage et le patrimoine bâti également en dehors des zones protégées.»
Dans une période de pénurie croissante de logements, cela risque de susciter des critiques. L'association suisse de l'économie immobilière (SVIT) qualifie l'initiative sur la biodiversité de «cheval de Troie». Elle aggrave «les blocages de la construction déjà nombreux aujourd'hui» et menace ainsi «la construction de logements dont la Suisse a un besoin urgent», estime-t-elle. La Société suisse des entrepreneurs (SSE) rejette également le texte. Un oui le 22 septembre risque «d'aggraver» la pénurie de logements.
La pierre d'achoppement est l'Inventaire fédéral des sites construits d'importance nationale à protéger en Suisse (ISOS). Selon le secteur de la construction, il est déjà appliqué trop rigoureusement aujourd'hui. Et en cas de «oui» à l'initiative, les obstacles devraient être encore plus importants. «Je peux confirmer qu'en cas d'acceptation de l'initiative, l'application de l'ISOS deviendrait plus stricte», déclare Maria Lezzi, directrice de l'Office fédéral du développement territorial (ARE), à la NZZ.
Les initiants doivent batailler également avec le secteur de l'électricité. Les acteurs concernés craignent qu'un «oui» ne compromette le développement des énergies renouvelables et donc la mise en œuvre de la loi sur l'électricité, qui a été clairement acceptée par les électeurs en juin dernier.
L'Association des entreprises électriques suisses (AES) a rejoint le comité contre l'initiative. Les auteurs de l'initiative répondent à cette crainte par un avis de droit. Selon ce dernier, le Parlement pourrait, lors de la mise en œuvre, créer une réglementation qui concilierait la protection de la biodiversité avec l'acte modificateur unique.
L'association «Patrimoine suisse» s'en mêle. Elle s'est opposée à plusieurs reprises aux installations solaires sur des bâtiments qu'elle estime dignes de protection. watson a documenté le cas d'une grange à Zurich, dont le toit se prêterait parfaitement à la production d'électricité solaire. Mais «Patrimoine suisse» a fait recours.
En effet, la grange se trouve dans une zone ISOS-A, et l'installation solaire est donc «une provocation» pour Martin Killias, le président de «Patrimoine suisse». Si l'application de l'ISOS devenait plus stricte en cas de «oui» à l'initiative, comme l'explique l'Office fédéral compétent, ce n'est pas seulement l'immobilier qui serait rendu plus difficile, mais aussi le développement du solaire.
Ces deux arguments pourraient être fatals l'initiative. On se demande pourquoi les initiants ne se sont pas limités à cela, mais se sont attirés une opposition supplémentaire avec la protection des sites.
Le lien entre la protection de la nature et du patrimoine est «tout à fait logique», répond Manuel Herrmann, porte-parole de l'initiative pour la biodiversité. Dans l'article 78 de la Constitution fédérale, que l'initiative populaire veut compléter, les deux thèmes sont réglés ensemble - de même que dans la loi. L'implication de différentes associations rend la campagne «plus percutante».
«Nous ne percevons pas la branche de la construction comme très active dans la campagne de votation, déclare le porte-parole du texte. Il fait remarquer que la Société des ingénieurs et des architectes (SIA) est favorable à l'initiative. L'alliance du «non», dont fait partie le ministre de l'environnement Albert Rösti, tente de «se concentrer sur la protection du patrimoine, car ils sont à court d'arguments en raison du mauvais état de la biodiversité en Suisse.»
La campagne de l'initiative se concentre principalement «sur nos bases vitales, que nous voulons préserver», dit Manuel Herrmann. Nous verrons dans trois semaines et demie si cette stratégie fonctionne ou si le comité d'initiative ne s'est pas fait trop d'ennemis en chemin.