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Pourquoi les groupes de musique sont en voie d'extinction

La fin des groupes de musique, est-elle pour bientôt?
Les groupes ont laissé place aux artistes solo.
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Pourquoi les groupes de musique sont en voie d'extinction

Les groupes de pop et de rock ne sont pratiquement plus représentés dans les hit-parades. Pour le comprendre, retour sur l'histoire des groupes.
15.03.2025, 16:03
Stefan Künzli / ch media
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AC/DC, les Rolling Stones et Coldplay sont quelques des groupes de rock et de pop rock les plus célèbres. Ils remplissent encore aujourd'hui les plus grands stades du monde. Emmené par le chanteur Chris Martin, Coldplay bat des records avec son Music of the Spheres World Tour. Avec 10,3 millions de billets vendus, le groupe fait encore mieux que la performance de Taylor Swift, avec ses 10 millions de tickets écoulés.

Coldplay
Chris MartinImage: AP Invision

Mais Coldplay est un modèle en voie de disparition et le retour d'Oasis ou la reformation de Linkin Park n'y changeront rien. Selon les derniers chiffres de Datapulse, les groupes pop rock ne figurent plus dans les hit-parades. En 2024, seuls 74 groupes ont réussi à se hisser dans le top 100 des charts américains, soit 2% d'entre eux. Un chiffre extrêmement bas.

En revanche, les artistes solos comme Taylor Swift, Billie Eilish ou Beyoncé dominent les classements. L'année dernière, 2685 artistes solo, soit 71%, figuraient dans les charts. Les featurings, comme ceux de Lady Gaga et Bruno Mars avec Die With A Smile, ont bien plus figuré dans les hit-parades que les groupes. On comptait ainsi 1041 featuring dans les classements, soit 27%.

Ces chiffres peuvent étonner, car ce sont des groupes comme les Beatles et les Rolling Stones qui ont marqué l'évolution de la pop et le rock. Mais dans la musique grand public à travers l'histoire, le succès de groupes a été une parenthèse enchantée. Les chiffres récoltés par Database de 1958 à nos jours le démontrent de manière impressionnante. C'est en 1965 que les collectifs de musiciens ont pour la première fois été plus nombreux que les artistes solo dans les hit-parades. C'était le coup d'envoi d'une ère des groupes qui a duré jusqu'en 1993.

Tout démarre à l'ère des interprètes

L'invention du disque et de la radio a joué un rôle clé dans le développement de la pop.

C'est la diffusion massive de la musique qui a permis l'émergence de tubes et de stars

Le chanteur Bing Crosby (1903-1977) a connu son premier grand succès en 1931 avec «Out Of Nowhere». Il a ensuite interprété White Christmas (1942), devenue l'une des chansons les plus vendues de l'histoire. Son interprète, lui, a été le premier artiste solo à accéder au statut de pop star.

Bob Hope et Bing Crosby
Bob Hope et Bing Crosby.Image: AP

Bing Crosby était un excellent chanteur et entertainer, mais il ne composait pas lui-même la plupart de ses chansons. Tout comme l'actrice et chanteuse Judy Garland (1922-1969) ou Frank Sinatra (1915-1998). Les artistes les plus appréciés de l'époque étaient des interprètes. Ils chantaient des tubes composés par les frères Gershwin, Irving Berlin, Cole Porter ou encore Jerome Kern. Une collection de classiques surnommée le Great American Songbook.

A cette époque, il existait certes des groupes de jazz, de rhythm and blues ou de rock'n'roll, mais leur organisation était très hiérarchique. Le chef d'orchestre y occupait la place centrale, comme c'était le cas pour Louis Armstrong and His Hot Five ou Bill Haley & His Comets.

Le groupe de Buddy Holly, The Crickets, a été dans la deuxième moitié des années 1950 l'une des premières formations de rock'n'roll dans laquelle tous les membres avaient une influence sur la musique, et qui étaient perçus comme un collectif. Parallèlement, il existait des formations vocales, appelées groupes de doo-wop, comme les Platters ou The Drifters qui misaient sur l'harmonie des chants polyphoniques.

Et les Beatles ont débarqué

Ces sont les Beatles qui ont révolutionné l'idée de groupe et l'ont aidée à faire sa place dans le monde de la musique. Le concept: un collectif qui composait, arrangeait, développait et interprétait lui-même ses morceaux. Après les Beatles, une armée de bandes qui suivaient ce modèle est apparue: les Kinks, les Rolling Stones, les Beach Boys, The Animals, The Who et bien d'autres.

Et en 1965, pour la première fois, on trouvait plus de groupes que d'artistes solo dans les hit-parades américains. Deep Purple, Pink Floyd, Led Zeppelin, ABBA, Queen, U2 et bien d'autres, ont par la suite marqué l'évolution du pop rock dans les décennies suivantes. L'écriture et l'interprétation des chansons étaient alors considérées comme un tout, et les groupes avaient le contrôle sur ce qu'ils produisaient.

Queen
Queen en 1989.Image: AP dapd

Dans les années 1990, les groupes de grunge comme Nirvana ou Pearl Jam, les néo-punk Green Day, les britanniques Oasis ou Radiohead, et même les boys et girls bands comme Take That, Backstreet Boys ou les Spice Girls, figuraient au premier plan.

Les femmes au pouvoir

Mais dans le même temps, des artistes solos comme Madonna, Whitney Houston, Mariah Carey, Alanis Morissette, Céline Dion ou Britney Spears ont commencé à littéralement leur voler la vedette, et ont globalement rencontré un plus grand succès commercial.

Que s'est-il alors passé? L'ère des groupes a pris naissance dans un monde masculin.

On peut supposer que, historiquement, l'idée de groupe a eu moins de succès chez les femmes

A cause des normes sociales et des rôles attribués aux genres, on trouvait bien moins de musiciennes et e groupes de femmes.

Il est frappant de constater que le déclin des groupes de musique coïncide avec l'ascension des femmes dans la pop dans les années 1990. Et ce sont bien les progrès vers l'égalité et l'émancipation des femmes dans la musique pop qui ont favorisé le déclin des groupes, et donc l'ascension d'artistes féminines. Aujourd'hui, celles-ci dominent même la pop internationale.

L'ère du numérique a rebattu les cartes

Comme c'est toujours le cas dans la musique mainstream, le facteur financier s'avère décisif. Une carrière en solo coûte moins cher et offre des avantages financiers, car les recettes des concerts, du streaming et du merchandising ne doivent pas être réparties entre plusieurs membres d'un groupe.

Une carrière solo est également beaucoup plus efficace et flexible, alors qu'un groupe est censé fonctionner de façon démocratique en tenant compte des différents avis de ses membres. Les querelles comme celles qui ont opposé les frères Gallagher au sein d'Oasis sont légendaires. Pour diminuer de potentiels conflits, les labels préfèrent désormais signer des artistes individuels.

Liam Gallagher qui fait n'importe quoi sur scène en 1996.Vidéo: YouTube/Anna Oasis G

La numérisation joue également un rôle important. Dans la pop, la technique a toujours été un moteur pour les tendances et les développements. Alors qu'auparavant, les enregistrements en studio nécessitaient un ensemble de musiciens, les artistes peuvent aujourd'hui produire seuls des chansons depuis chez eux. Non seulement c'est moins cher, mais ils détiennent ainsi le contrôle exclusif de leur œuvre. Même les concerts ne posent plus de problème aux chanteurs solo, grâce au playback et aux loops.

De nos jours, c'est chacun pour soi

La pop est aujourd'hui devenue beaucoup plus individualiste à cause de facteurs culturels et sociaux. L'idée d'un collectif créatif qui prévalait de 1960 à 1990 a laissé la place aux individus à la personnalité forte, comme Taylor Swift ou Billie Eilish, facilement identifiables auprès de leurs fans.

La priorité accordée à l'artiste solo se manifeste également dans la culture du télécrochet et de la télé-réalité. Les artistes individuels y sont encouragés et non les groupes. De nombreux jeunes chanteurs et chanteuses choisissent donc dès le départ de s'orienter vers une carrière solo.

On n'est plus très rock'n'roll

La culture du groupe de musique a ses racines dans le rock. Or, c'est justement depuis le début du nouveau millénaire que le genre a perdu sa domination. Dans les années 1990, il y a certes eu quelques exceptions, avec des collectifs de rap comme le Wu-Tang Clan ou des groupes d'électro comme The Prodigy. Mais le hip-hop, le RnB et la musique électronique se sont rapidement tournés vers la production pop actuelle, dominée par des artistes solos.

Les producteurs de musique préfèrent aujourd'hui miser sur des featuring plutôt que des groupes fixes

Comme le montre Datapulse, depuis 2007, on compte dans les hit-parades américains plus de collaborations musicales que de bandes. Les producteurs ne sont ainsi pas cantonnés à un style de musique, mais peuvent réagir plus rapidement à l'évolution constante des tendances dans la pop. De plus, les collaborations promettent de multiplier les écoutes en streaming, car elles s'adressent à plusieurs fanbases, et augmentent ainsi les chances de figurer en haut des classements.

Il reste des héritiers

Bien sûr, il existe toujours des groupes. Parmi ceux nés dans les années 1990, seuls Coldplay, Linkin Park et les Foo Fighters connaissent encore un succès mondial. Au tournant du millénaire, Maroon 5 (fondé en 2001) et Imagine Dragons (2008), One Direction (2010) et les Sud-coréens BTS (2010) les ont rejoints dans le panthéon des collectifs à succès.

Mais c'est encore et toujours dans le rock, le punk, le métal, ainsi que dans le jazz et le blues, que l'esprit de bande continue de vivre. Elle continue même d'y être la grande règle. Mais ces groupes ont fait leur temps en tant que fournisseurs de tubes. (aargauerzeitung.ch)

Traduit de l'allemand par Joel Espi

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