Un nouveau souffle. A l'image de l'envolée vocale déchaînée d'Emily Armstrong sur le titre qui fascine la Toile, Heavy Is the Crown.
@mehdidonk Mais respire frr @Linkin Park #humour ♬ Heavy Is the Crown - Linkin Park
Pour le monde de la critique comme pour nous, aucun doute: Linkin Park a su renaitre de ses cendres (emojis flammes, flammes, flammes). Et ce, malgré le malheur qui s'est abattu sur le groupe voici sept ans, lorsque son co-chanteur Chester Bennington s'est suicidé, le 20 juillet 2017, laissant une fanbase, tout comme la formation, dans le désarroi le plus total. L'univers de ce néo-métal d'un genre particulier, qui fusionnait bestiales embardées vocales et rap qui tache, sans sacrifier le côté mélodique, en est alors devenu «numb».
Quand le groupe a annoncé qu'Emily Armstrong prenait le relais et se tiendrait aux côtés de Mike Shinoda, le monde entier a scruté ces idoles d'un ancien temps avec intensité. Pour certains, le doute était permis. Qui est- elle, cette blonde chanteuse de 38 ans, qui ose prendre la place de Bennington? Et que peut-elle donc apporter dans un marasme qu'ont connu tant de groupes qui ont périclité, faute d'avoir su réécrire de nouveaux chapitres de leur carrière, sans se trahir, et sans céder aux sirènes du mainstream, juste pour continuer d'exister?
Il faut dire que la réputation de la chanteuse n'était pas dénuée de casseroles, elle qui était autrefois proche des scientologues, et qui avait aidé un ami désormais condamné dans un procès pour viol. A cette cacophonie d'avis, ce sont ajoutées les protestations de la famille de Bennington, irritée de ne pas être tenue au courant des plans de succession du groupe.
Malgré les lourdes attentes, et les critiques déjà sceptiques de la presse internationale, la chanteuse originaire de Los Angeles, et ex-membre de Dead Sara, a su trouver sa place (presque) comme si ce fût toujours la sienne. Une seconde vie sous la lumière, alors que son premier groupe n'a jamais su trouver la sienne sur la scène internationale (et malgré le soutien de Courtney Love, comme nous le rappelle avec justesse TF1).
Mais avec l'album From Zero, c'est bingo. La tessiture légèrement rauque mais toujours harmonieuse d'Emily Armstrong s'encastre avec un naturel désarmant dans celle de Shinoda. Emily chante comme elle crie, sans chichis, avec une franchise engageante. Pas de similitudes dans les voix de ce monstre bicéphale - pas comme dans les vieilles années - mais une complémentarité qui fait mouche presque à chaque titre. Imprévisible, cette valse musclée Armstrong-Shinoda, dont l'intensité fait les montagnes russes, permet de switcher d'énergie et d'éclabousser de mille nuances chaque séquence musicale.
Ce qu'on apprécie surtout avec cette formation flambant neuve (Emily Armstrong, Mike Shinoda, Brad Delson à la guitare, Dave Farrell à la guitare basse, Colin Brittain batterie et Joe Hahn au mixage), c'est qu'on nous propose du rarement vu.
Avec son mélange de genres qui a fait tache d'huile dans l'univers du métal des années 2000, en allant puiser du rap jusqu'à la pop mélodique, Linkin Park a toujours dérangé et polarisé. D'aucuns l'assurent, ce n'est pas du métal du tout, mais un package commercial idéal à enfoncer dans la gorge formatée des radios. En jetant son dévolu sur une femme comme co-lead vocal, le groupe prouve une fois de plus que les critiques, il n'en a eu cure.
De cette galette de 32 minutes qu'on a consommées sans modération (après sept longues années d'attente, on avait faim), on a gardé le meilleur pour la fin, avec le très mélodique Good Things Go, où voix masculine et féminine se mélangent en glissant sur les riffs dans une fusion parfaite.
La nostalgie n'est jamais loin avec The Emptiness Machine, le premier single lancé comme une bouteille à la mer, qui nous offre une palette polarisée de beats, entre couplets placides et refrains qui envoient du lourd. Pas étonnant que, quelques heures après sa diffusion, les charts s'étaient déjà affolées. La chanson est même restée numéro 1 du classement des singles suisses pendant cinq semaines.
Une vibe électro-punk vient même nous titiller sur le très entrainant Cut the Bridge. Et les réseaux sont déjà in love de Heavy the Crown, où la trentenaire fait carrément dans l'apnée en tenant ses notes.
Linkin Park nous sert bien sûr des explosions de colère pour régaler les fans de métal, comme sur IGYEIH, ou Two Faced, suivies de douces mélodies qui puisent dans une veine plus classique, comme Stained.
Avec ce disque, nul doute que Linkin Park saura fédérer toutes les générations: les anciennes qui ont été bercées au rythme de l’album Hybrid Theory, et les nouvelles, qui vont certainement les découvrir via des trends sur les réseaux. Selon le média Tagblatt, la fanbase de Linkin Park était déjà très féminine auparavant. Mais avec l'avènement d'Emily Armonstrong, il y a fort à parier que cette tendance va se renforcer.
Et comme une bonne nouvelle ne vient jamais seule, Linkin Park a annoncé une tournée mondiale 2025 - sa première depuis dix ans, jette le média Metalzone. Le groupe va venir en Suisse: ce sera le 20 juin 2025, au Bernexpo Areal Openair.
On peut souffler; the rock is not dead. Grâce à son ouverture d'esprit, alliée à un respect de sa sève musical dont se sont nourris les vieux briscards millénaux dans les années 2000 (comme moi), la vague Linkin Park n'est pas près de s'étioler.