Comme chaque dernière semaine de juillet, depuis 48 ans, le peuple romand a commencé son exode en direction de la Plaine de l'Asse pour assister au plus grand festival open air de Suisse. Un voyage entrepris machinalement vers cet endroit si familier où chaque élément trouve sa place, à l’exception notable des installations décoratives massives, qui prennent une nouvelle forme chaque année, et du Village du Monde, cette édition étant dédiée au Maghreb.
Fidèle à lui-même, Paléo s'ouvre avec une sélection dédiée à tous les genres musicaux. Sur la grande scène, les Anglais de Skunk Anansie ont ouvert le bal, suivis du rap bienveillant de Macklemore et de l’électro tapageuse du duo Justice. Quant à la scène Vega, l'autre grande scène du festival, la soirée s’est teintée de nostalgie, avec des performances du Saïan Supa Crew et de Simple Minds, avant de se conclure avec La Femme et leur rock audacieux. En parallèle, la musique orientale a été savourée autant que la nouvelle scène, apportant une diversité qui a comblé tous les goûts.
Comme bien souvent, l'ouverture du festival se veut timide, le public étant souvent bien trop occupé à se remplir le gosier à coup de bière et de saucisses (ou de merguez cette année). Skunk Anansie aura néanmoins réussi à sortir son auditoire de sa torpeur, un brin léthargique, car frappé par un soleil de plomb. Les Anglais ont montré que leur rock, bien qu’il ait plus de trente ans, n’a pas pris une ride.
C’est véritablement vers 21h que la marée humaine a déferlé sur la Plaine de l'Asse. Pour sa deuxième apparition sur la scène de l’Asse, le rappeur américain Macklemore a conquis son public à qu'il porte un amour sincère, agglutiné en masse devant la grande scène. Un concert placé sous le signe de l'inclusivité, Macklemore en mode McDo, n’ayant cessé de rappeler «venez comme vous êtes». Au-delà du côté feel-good, le show du rappeur a aussi été un concert politiquement engagé, dénonçant la famine à Gaza avec un plaidoyer touchant pour la cause palestinienne.
Dans le public, des cris de révolte. On comptait les étendards aux couleurs de la Palestine, brandis tout au long de la soirée, comme de petites piqûres de rappel qu’en dehors de cette bulle d’insouciance et de communion, l’horreur continue de se dérouler.
Quant au duo Justice, la chaleur communicative de Macklemore semblait définitivement s'être dissipée une fois leur moment venu. Plongée dans l’obscurité, la scène affiche des messages de prévention, rappelant que les épileptiques ne sont pas les bienvenus. On comprend vite pourquoi, tant leur installation lumineuse est impressionnante.
On ne saurait dire si les Français présents sur scène sont vraiment en train de jouer ou s’ils ont simplement appuyé sur «play» en fermant les yeux pour ne pas finir aveugles, mais peu importe: Justice en live, c’est une expérience. On en ressort certes avec un acouphène et une cataracte, mais satisfait, tant le spectacle est grandiose, pour peu qu'on ait réussi à ne pas abdiquer face à ces stroboscopes qui donnent l'impression d'avoir regardé le soleil. Ce qui est certain, c'est que les frenchies n'ont pas volé leur Grammy Award du meilleur album électronique.
L'exode prend le chemin de retour, laissant les derniers festivaliers finir leur nuit. Un premier soir de convivialité qui, à défaut d'être mémorable, aura été politique.