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Chasse au marché bancaire européen: quel lien avec l’accord UBS-CS?

Le siège d'Unicredit domine tout Milan.
Le siège d'Unicredit domine tout Milan.image: stefano porta

La saison de la chasse est ouverte sur le marché bancaire européen

La grande banque italienne Unicredit souhaite acquérir la Commerzbank allemande. Pourquoi ce «test pour l'Europe» pourrait bien tourner à l'échec et quel lien cela a-t-il avec l'accord UBS-Credit Suisse?
27.09.2024, 18:5327.09.2024, 18:54
Daniel Zulauf / ch media
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L'Europe est-elle prête pour le marché unique? 31 ans après que les pays de l'UE l'ont scellé dans le Traité de Maastricht, la réponse n'est toujours pas claire. Le marché intérieur est inachevé, notamment dans le secteur financier. Le système bancaire est resté en grande partie national. Il n'existe pas de géants bancaires de dimension américaine sur le Vieux Continent.

C'est ce qu'UBS cherche à changer en s'inspirant, selon son propre aveu, de la banque Morgan Stanley, établie à Wall Street. L'ancien manager d'UBS, Andrea Orcel, aspire, lui aussi, à un saut quantique avec son Unicredit. Ces dernières semaines, l'Italien de 61 ans, s'est approché de la Commerzbank allemande sans détour et a déjà racheté, selon ses propres dires, directement ou indirectement plus de 20% des parts de cette banque, connue sous le nom de «banque des PME».

Selon Orcel, Unicredit pourrait associer la Commerzbank à sa filiale allemande Hypovereinsbank déjà existante à Munich et «réaliser de grandes choses» ensemble. Le manager fait référence aux grands progrès réalisés par le groupe qu'il dirige, et plus particulièrement par Hypovereinsbank, en termes de rentabilité et d'efficacité au cours des trois dernières années.

Bien sûr, il ignore volontiers le fait que la Banque centrale européenne a augmenté le taux d'intérêt de 0% à 4,5% entre 2021 et 2023, permettant ainsi à toutes les banques d'augmenter considérablement leurs marges bénéficiaires dans le domaine des crédits et des dépôts.

Mais le fait est qu’il y a beaucoup de banques et «trop de banquiers», sur le marché bancaire allemand qui attestent que le secteur n’est pas très efficace, comme l’a déclaré il y a quatre ans Raimund Röseler, chef de l’autorité de surveillance allemande Bafin.

Andrea Orcel, PDG d'Unicredit.
Image: dr

En 2021, le célèbre analyste bancaire britannique Stuart Graham expliquait que les quinze plus grandes banques de la zone euro ne représentaient qu'une part de marché combinée de 45%. Dans un marché ajusté sans surcapacités, cette part laisserait tout juste assez de place pour quatre grandes banques.

Le big bang du CS a des conséquences pour l'Europe

Mais depuis, il n'y a pas eu de grands rachats de banques ou de fusions dans la zone euro. Au lieu de cela, le rachat du Credit Suisse par l'UBS, en mars 2023, a fait l'effet d'une bombe en Suisse. Cette opération n'est pas non plus sans conséquences pour le marché bancaire européen. D'une part, il a probablement eu un effet motivant sur les managers en quête de grandeur comme Andrea Orcel. D'autre part, on peut supposer qu'il a rendu les autorités et les gouvernements plutôt plus prudents.

Souvenons-nous: en 2022, alors que le Credit Suisse était déjà en difficulté, les autorités américaines et britanniques ont interdit à la banque de transférer des fonds propres de New York et de Londres vers Zurich par le biais de changements organisationnels, afin de donner plus d'air à la maison mère en difficulté. «En temps de crise, les gouvernements et leurs autorités adoptent des modes d'action nationalistes», explique un connaisseur du monde bancaire qui souhaite rester anonyme et qui a acquis cette expertise en passant de nombreuses années dans les plus hautes fonctions du secteur.

Orcel: «Un cas-test pour l'Europe»

Le fait que l'Union bancaire européenne ne soit toujours pas achevée n'atténue pas le problème. Il manque un système de garantie commun pour les dépôts bancaires. En l'absence d'une communauté de responsabilité transnationale, les autorités nationales ne peuvent presque pas s'empêcher d'agir jalousement et mettre des bâtons dans les roues des banques lorsqu'elles engagent des capitaux au-delà des frontières nationales.

C'est pourquoi Andrea Orcel, le patron d'Unicredit, a déclaré hier à Londres:

«Notre approche de la Commerzbank est un cas test pour l'Europe»

Le dirigeant ne souhaite réaliser son projet de reprise que s'il peut être assuré d'un soutien suffisant de la part des politiques et de toutes les autres parties prenantes. A Berlin, l'enthousiasme pour l'avancée d'Orcel est toutefois très limité. Un peu comme il y a cinq ans, lorsque la Deutsche Bank avait manifesté son intérêt pour sa voisine, mais que les politiques avaient fait la sourde oreille. Aujourd'hui comme hier, les syndicats sont en état d'alerte. Une reprise de la Commerzbank pourrait entraîner la suppression de deux tiers des 42 000 emplois, disent-ils.

Orcel devra encore faire preuve de beaucoup de persuasion pour défendre son projet. La référence aux banques américaines, bien plus grandes, ne lui permettra toutefois pas de marquer suffisamment de points. A juste titre: les banques européennes sont spécialisées dans les opérations de bilan, c'est-à-dire dans le crédit. Aux Etats-Unis, une grande partie du financement des entreprises se fait sur le marché des capitaux.

Rien que pour cette raison, les comparaisons bancaires transatlantiques sont un exercice périlleux. Mais l'ambition et la fierté des managers de diriger les plus grandes structures possibles sont les mêmes des deux côtés. C'est pourquoi la saison de chasse ouverte par Andrea Orcel sur le marché bancaire européen pourrait être rejointe par d'autres de sa trempe.

(Traduit et adapté par Chiara Lecca)

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