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Pourquoi Trump et les MAGA détestent l'Europe

epa11656441 A person with MAGA tattooed on the back of their head arrives to an election rally for former US president and current Republican presidential nominee Donald Trump in Coachella, California ...
Il a Trump dans la peau.Image: keystone
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Pourquoi Trump et ses copains détestent l'Europe

Le président américain et son vice-président ne sont visiblement pas nos amis.
01.04.2025, 20:4201.04.2025, 20:42
Philipp Löpfe
Philipp Löpfe
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Il y a quelques jours, le ministre américain de la Défense, Pete Hegseth a fièrement dévoilé les plans d'un nouvel avion de combat. En l'honneur de Donald Trump, il s'appellera F-47. Ce jet sera également vendu aux alliés d'Europe et d'Asie, mais il manquera quelques détails décisifs à la version non-étasunienne. Du point de vue du président américain, cela a du sens, car «un jour, ils pourraient ne plus être nos alliés».

Ce jour approche à grands pas. Les insultes de la Maison-Blanche envers l'Europe se multiplient. En amont de la conférence de Munich sur la sécurité, Pete Hegseth a choqué par ses déclarations sur la guerre en Ukraine. Lors de la conférence, le vice-président JD Vance a, lui, insulté les Européens de la pire des manières.

U.S. Secretary of Defense Pete Hegseth attends a joint news conference with Japan's Defense Minister Gen Nakatani at the Ministry of Defense in Tokyo Sunday, March 30, 2025. (Kiyoshi Ota/Pool Pho ...
Pete Hegseth, secrétaire à la Défense des Etats-Unis.Image: keystone

La publication des messages secrets des sbires de Trump sur Signal est venue confirmer cette impression. Dans cette conversation, dans laquelle il était question d'une attaque américaine contre les Houthis au Yémen, Vance a déclaré:

«Je déteste sauver la mise des Européens. Je partage entièrement votre aversion pour ces profiteurs. C'est pathétique!»

Cette déclaration est prise très au sérieux à Bruxelles, Berlin, Paris, Londres et Varsovie. L'historien britannique Andrew Roberts l'explique dans le Wall Street Journal:

«Il y a une grande différence entre un discours dans lequel on lève un doigt menaçant, comme Vance à Munich, et un texte dont on pense qu'il est échangé seulement entre collègues et où on ne mâche pas ses mots, où on dit ce que l'on pense. Apparemment, ces personnes détestent vraiment le continent européen.»

Même les initiés sont surpris par la véhémence des sentiments anti-européens à la Maison-Blanche. Analyste politique expérimenté, Charlie Cook explique dans le Financial Times:

«Vance est encore plus opposé à l'Europe que nous ne le pensions jusqu'à présent»
Charlie Cook

L'expert ajoute que «JD Vance n'a absolument pas le sentiment que les Etats-Unis doivent assumer une quelconque responsabilité, sauf s'il s'agit de leur propre intérêt».

Vice President JD Vance speaks at the U.S. military's Pituffik Space Base in Greenland, Friday, March 28, 2025. (Jim Watson/Pool via AP)
Vance
J.D. Vance, le vice-président des Etats-Unis d'Amérique.Image: keystone

De ce point de vue, il n'est pas surprenant que le vice-président ait pris le rôle du «détestable Américain» face à l'Europe. JD Vance ne fait d'ailleurs rien pour corriger cette image. Au contraire, il vient de froisser le Danemark, un allié de l'Otan. «Malheureusement, les Danois ont maltraité les habitants du Groenland pendant des décennies», a-t-il martelé avant sa visite sur l'île.

«Ils les ont traités comme des citoyens de seconde zone et ont laissé les infrastructures se détériorer»

Les sorties anti-européennes du vice-président étasunien sont parfaitement coordonnées avec celles du chef de l'Etat. Donald Trump a de nouveau souligné que les Etats-Unis étaient prêts à laisser tomber leurs alliés européens. Il l'a affirmé début mars:

«S'ils ne paient pas, nous ne les défendrons pas. Pensez-y, nous payons 100% de leur armée, et ils nous roulent dans la farine avec leurs exportations.»

L'idée de se faire rouler dans la farine par les Européens semble s'être installée de manière inébranlable dans le cerveau de Trump. L'Union européenne n'aurait «été créée que pour tromper les Américains», a déjà affirmé le président américain à plusieurs reprises. Comme Vladimir Poutine, il préférerait donc que l'alliance européenne se désintègre.

epa12000070 Demonstrators hold placards while participating in a protest against news media coverage of the Trump administration outside of CNN headquarters, in Atlanta, Georgia, USA, 30 March 2025. T ...
Une manifestation contre la politique de Donald Trump envers l'Union européenne.Image: keystone

Trump ne se contente pas d'insulter l'UE, il rabaisse également ses représentants, même les plus conservateurs d'entre-eux. Il a ainsi renvoyé le président polonais Andrzej Duda après seulement dix minutes, alors que celui-ci avait traversé l'Atlantique uniquement pour une visite à la Maison-Blanche. Kaja Kallas, la haute représentante des Affaires étrangères de l'Union européenne, a eu encore moins de chance. Elle n'a même pas été reçue par son homologue américain Marco Rubio.

Chez les conservateurs des Etats-Unis, la haine de l'Europe n'a pas seulement une dimension économique ou militaire. Celle-ci est aussi culturelle. Le Vieux Continent est pour eux un bastion de la prétendue culture woke, de l'intégration à tout prix, tandis que l'Europe de l'Ouest en particulier serait le refuge d'une élite mondiale.

En outre, les femmes européennes n'auraient pas assez d'enfants, les immigrés musulmans envahiraient le continent et les valeurs chrétiennes seraient en train d'y sombrer. «L'Europe est sur le point de commettre un suicide civilisationnel», tance JD Vance sur Fox News.

Les seuls Européens qui sont encore respectés à Washington sont des dictateurs autoritaires comme Viktor Orbán ou Vladimir Poutine, ou les leaders de partis populistes de droite comme Alice Weidel en Allemagne.

epa11970992 Alternative for Germany (AfD) party and faction co-chairwoman Alice Weidel attends a special plenary session of the German parliament 'Bundestag', in Berlin, Germany, 18 March 20 ...
La dirigeante de l'AfD, Alice Weidel, est dans les bons papiers de Trump.Image: keystone

Les relations entre le Vieux Continent et le pays de Trump ont souvent été agitées. A l'époque de la guerre du Vietnam et de la campagne en Irak, l'anti-américanisme était très répandu en Europe. Sur des murs, on pouvait parfois lire «Les Amerloques à la maison». Les Européens étaient - et sont encore en partie aujourd'hui - convaincus d'être intellectuellement bien supérieurs aux Américains. Le défunt président français Jacques Chirac avait ainsi l'habitude de plaisanter :

«Je regarde ce que font les Américains, et ensuite je fais le contraire. Ainsi, je suis sûr d'avoir raison»
Jacques Chirac

A l'inverse, les Etasuniens ont également distribué des coups contre les Européens. Lorsque les Français et les Allemands ont refusé de soutenir la deuxième campagne contre l'Irak, les Américains conservateurs ont traité les Français de «singes mangeurs de fromage» et ont même voulu imposer que les frites, appelées «French Fries» en anglais, soient rebaptisées «Freedom Fries».

Jusqu'ici, tout s'est bien terminé. Mais avec Trump, les choses pourraient bien devenir incontrôlables. Mercredi, le président américain annoncera l'ensemble de son paquet douanier. Il causera ainsi de nouveaux dommages économiques à l'Europe, et renforcera encore l'antagonisme entre les deux continents. Il n'y a pourtant que des perdants dans ce conflit des deux côtés.

Les insultes et les droits de douane punitifs ne désamorceront pas ce conflit. Dans le Financial Times, Henry Mace recommande donc une recette simple :

«Il y a peut-être une raison simple pour laquelle Trump est si hostile à l'Europe. Trump réagit aux flatteries, et il n'en reçoit pratiquement aucune de sa part»

Traduit de l'allemand par Joel Espi

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Des images de lapins, à travers les siècles
Fragment d'une peinture funéraire polychrome représentant des hommes portant du grain, une gazelle ou une antilope, deux lapins ou lièvres, tandis que le dernier porte un joug avec du grain et un certain nombre d'objets peu clairs.Thèbes, Égypte 18e dynastie, vers 1350 av.
source: universal images group editorial / florilegius
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