«Trump? Que des paroles!» A Vereïa, joyau discret de la région de Moscou, les habitants ont du mal à croire aux promesses du président américain d'en finir au plus vite avec le conflit entre la Russie et l'Ukraine, déclenché par l'assaut de Moscou en 2022.
Avec ses halles marchandes du XVIIIe siècle au milieu de la place centrale, pavée et bordée d'églises aux coupoles dorées, Vereïa est une petite ville de 5000 âmes, à l'ambiance festive. Entourée de collines verdoyantes qui l'enveloppent dans un paysage presque alpin, la bourgade se tient à environ 100 kilomètres à l'ouest de Moscou.
Alissa, une jeune serveuse dans un café, se dit heureuse de vivre loin de la capitale russe, où «des drones volent partout. C'est vraiment fou».
L'offensive russe lancée contre l'Ukraine en février 2022 n'a pas beaucoup changé la vie paisible de la petite ville, hormis le fait que l'entreprise locale fabriquant des drapeaux ou des emblèmes nationaux a reçu plus de commandes de l'Etat russe, selon un employé de cette usine.
Le départ de Russie de nombreuses enseignes occidentales n'a pas eu d'impact direct sur le commerce local, les grandes marques y étant absentes. Mais les jeunes espèrent quand même le retour de McDonald's, qui assurait 80% du réseau de fast-foods en Russie il y a encore trois ans.
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«On aimerait tant que les anciennes entreprises, comme McDonald's, rouvrent et que tout soit comme avant», avoue Alissa.
Selon un récent sondage du Centre Levada, trois Russes sur quatre (75%) «soutiendraient (le président) Vladimir Poutine s'il arrêtait le conflit cette semaine».
Alissa a 20 ans et veut croire que «tout ira bien» pour la Russie, «grâce »aux discussions entre les présidents américain Donald Trump et russe Vladimir Poutine. Mais les habitants plus âgés de Vereïa se montrent, eux, beaucoup plus sceptiques.
Pour Igor, 65 ans, Donald «Trump est certes nettement meilleur que (son prédécesseur Joe) Biden qui refusait de nous parler», mais il a échoué, dit-il, à mettre fin au conflit «en 24 heures», comme il l'avait promis.
Rencontré à la sortie du cimetière de Vereïa, où des drapeaux russes et du groupe paramilitaire Wagner décorent une quinzaine de tombes de combattants morts au front, ce retraité conclut:
Employée d'un musée local, Natalia, 51 ans, avoue avoir cru initialement aux «belles paroles» du dirigeant américain. «Pendant un certain temps j'ai même cru les informations de réseaux sociaux suggérant que Trump était en réalité un agent russe», avoue la conservatrice avec un sourire gêné.
«Mais là, je n'ai plus d'illusion, parce que Trump refuse toujours de faire une chose simple et évidente: couper Starlink pour l'Ukraine aurait fini le conflit en 24 heures», dit-elle avec conviction, en référence au réseau de satellites d'Elon Musk qui aide l'armée ukrainienne.
Selon le sondage du Centre Levada, plus de la moitié des Russes (51%) estiment avoir une opinion «négative» des Etats-Unis, contre 30% qui ont un regard «positif» sur le rival américain.
Elena Solodkaïa, une mère de cinq enfants, dit elle aussi «se méfier des hommes politiques» comme Trump. Entourée de sa famille nombreuse, elle pense que le vrai objectif du président américain n'est pas la paix mais le «profit économique»: «Pour lui tout ça n'est qu'un business» estime cette Ukrainienne de Mykolaïv (sud de l'Ukraine), qui vit en Russie depuis 2014.
«Bientôt, on verra qui tirera profit des terres» en Ukraine, ajoute-t-elle, évoquant l'accord américano-ukrainien en préparation qui permettrait à Washington d'exploiter les ressources ukrainiennes en minerais.
Sur un pont de Vereïa qui enjambe la rivière locale, Protva Efim Semenikhine, vélo à la main, souhaite rappeler l'origine du conflit, à ses yeux.
Il dit aussi attendre avec «intérêt» un éventuel sommet entre Vladimir Poutine et Donald Trump. «Ces deux-là peuvent tout régler rapidement», affirme-t-il.